Peu d’avantages à l’introduction d’un franc virtuel, selon Credit Suisse

AWP

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Les experts de la banque préviennent qu’une devise numérique de détail pourrait affecter la demande en liquidités, et subséquemment les perspectives d’inflation.

L’introduction par la Banque nationale suisse (BNS) d’une devise numérique de détail n’est pas une priorité. Elle n’apporterait à l’institut d’émission que peu d’avantages pour l’accomplissement de son mandat, selon une étude de Credit Suisse publiée mercredi.

Soulignant que l’objectif premier de la BNS est d’assurer la stabilité des prix par le biais de l’approvisionnement monétaire, les experts de la banque aux deux voiles préviennent qu’un franc virtuel pourrait affecter la demande en liquidités, et subséquemment les perspectives d’inflation.

L’introduction à la fin des années 1980 d’un système de paiement interbancaire (SIC) avait radicalement changé les besoins des établissements bancaires en matière de liquidités. Surestimant la demande monétaire, la BNS avait alors injecté trop d’argent dans le système financier, causant une accélération notable de l’inflation, rappellent les auteurs de l’étude.

Un argument en faveur de l’introduction d’un franc virtuel serait que ce dernier permettrait d’autres innovations en matière de politique monétaire, notamment une rémunération, éventuellement à un taux négatif. Mais il faudrait pour cela que la devise numérique remplace les billets de banque.

Or, du fait de l’utilisation largement répandue de ces derniers comme moyen de paiement, ni la BNS ni le gouvernement helvétique ne devraient être disposés ne serait-ce qu’à envisager l’élimination progressive de l’argent en espèces dans un avenir proche. Une devise numérique ne donnerait donc pas de marge de manoeuvre pour enfoncer encore les taux directeurs.

Un autre avantage lié à l’introduction d’un franc virtuel serait la possibilité de créer plus d’argent en le distribuant directement aux ménages pour juguler l’inflation par «largage de liquidités» en cas de besoin. Mais là aussi, les coûts et le défi logistique que représenterait un tel dispositif pour la banque centrale sont rédhibitoires, selon les experts de Credit Suisse.

Risque de dollarisation

L’étude relève toutefois que l’essor de nouvelles formes de devises numériques - tant émises par des intérêts privés, comme le bitcoin ou le diem (ex-libra de Facebook) que par des banques centrales - a fait ressurgir le spectre d’une dollarisation de l’économie, l’expansion de la masse monétaire en réaction à la pandémie ayant érodé la confiance dans les outils monétaires traditionnels.

Les instituts d’émission courent dès lors le risque de voir une monnaie obsolète remplacée graduellement par une plus performante. Pour la BNS, cela pourrait devenir un problème, si elle devenait une des rares banques centrales européennes à ne pas émettre une devise numérique de détail.

Ce scénario semble cependant peu vraisemblable aux auteurs de l’étude, dans la mesure où la confiance dans la capacité de la BNS à maintenir le pouvoir d’achat du franc reste élevée, comme en témoignent l’utilisation des billets de banque ou encore les dépôts de la clientèle, libellés dans leur grande majorité en francs.

En conclusion, les experts de Credit Suisse jugent le besoin d’une introduction rapide d’une devise numérique en Suisse faible, tout en signalant que la situation est sujette à changement, notamment en cas de relèvement des taux et de la contraction de la demande pour les billets de banque qui s’ensuivrait.

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