La Libra de Facebook peine à convaincre la communauté crypto

AWP

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«Les gens s’inquiètent de la manière dont va fonctionner la gouvernance de l’association qui va gérer la Libra», explique Helen Disney, fondatrice de Unblocked Events.

Les régulateurs ne sont pas les seuls à considérer avec méfiance le projet de Facebook de lancer une monnaie virtuelle: les partisans des cryptomonnaies jugent sévèrement l’initiative, même s’ils en espèrent quelques retombées positives.

«Ceux qui n’envisagent pas d’utiliser la Libra, levez la main!», demande le modérateur d’un débat sur la future cryptomonnaie lors de la Fintech Week, qui s’est tenue à Londres en début de semaine. Dans la salle, deux tiers de l’assistance lèvent le bras et expriment leur méfiance, une proportion notable pour un public acquis aux initiatives numériques.

«Les gens s’inquiètent de la manière dont va fonctionner la gouvernance de l’association» qui va gérer la Libra, explique à l’AFP l’une des participantes au débat, Helen Disney, fondatrice de Unblocked Events, une entreprise spécialisée dans la promotion de la blockchain, la technologie à la base de nombreuses cryptomonnaies.

Communauté libertaire

Facebook a officialisé mi-juin son projet de lancer une monnaie virtuelle au premier semestre 2020.

Mais si le bitcoin est totalement décentralisé, la Libra sera, pour sa part, cogérée par 100 entreprises partenaires, dont Calibra, une filiale de Facebook.

Les émetteurs de cartes bancaires Mastercard et Visa, les services de paiement Stripe et PayPal et les entreprises de réservation de voitures Lyft et Uber figurent parmi les acteurs connus qui géreront la devise virtuelle.

«Impatiente d’avoir une cryptomonnaie avec l’éthique d’Uber, la résistance à la censure de Paypal et la centralisation de Visa, le tout réuni dans le respect de la confidentialité éprouvé de Facebook», a ironisé sur Twitter Sarah Jamie Lewis, directice d’Open Privacy, une organisation de recherche dédiée au respect de la vie privée.

Facebook a beau marteler qu’il ne sera pas seul aux manettes et n’aura pas accès aux données de paiement, les partisans des cryptomonnaies demeurent sceptiques.

«Pétard mouillé» plus proche de Paypal que d’une cryptomonnaie, tance auprès de l’AFP Antoine Poinsot, un des fondateurs du groupe de discussion Crypto Lyon, une communauté française centrée sur les monnaies virtuelles. «On ne peut pas être pour», a résumé Alexandre, un autre membre du groupe.

Cette défiance s’explique par le fait qu’une grande partie de la communauté est «très libertaire dans sa façon de penser» et cherche à «rester loin des grosses banques et entreprises qui contrôlent l’économie», souligne Mme Disney.

Sas vers le bitcoin

Pour autant, les acteurs du secteur ne voient pas que des inconvénients à l’initiative lancée par le géant américain.

D’une part, le bitcoin a vu son cours progresser de plus de 50% dans les dix jours qui ont suivi l’annonce de Facebook, avant de reculer un peu.

De nombreux analystes ont jugé que le projet Libra a pu avoir un rôle dans le regain d’intérêt pour la cryptomonnaie, même si le lien de causalité est remis en cause par d’autres commentateurs - le bitcoin connaissant déjà une tendance positive depuis plusieurs semaines.

L’initiative de Facebook est «globalement positive» car elle peut rendre plus «conventionnel» le secteur, qui s’apparente aujourd’hui plutôt à «une niche», juge Mme Disney.

Selon elle, l’entreprise américaine va pousser les régulateurs à proposer un cadre légal autour des actifs numériques, ce que «nous attendons depuis longtemps».

Plus prosaïque, James Bennett, directeur de Bitassist, une entreprise de recherche sur les cryptomonnaies et la blockchain, table pour sa part sur le fait qu’»à long terme, les gens pourraient réaliser que Libra n’est pas une cryptomonnaie et ensuite utiliser de vraies cryptomonnaies pour leurs transactions».

Une opinion partagée par Cib, un membre de La Baleine, un autre groupe de discussion spécialisé sur les cryptomonnaies. Il estime ainsi que Libra, avec tous ses défauts, va servir de contre-exemple et «renforcer la confiance dans le bitcoin».

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