La crise a porté un coup aux fusions-acquisitions

AWP

2 minutes de lecture

Même si la crainte d’une deuxième vague est dans tous les esprits, l’optimisme reste majoritairement de mise parmi les experts pour la suite.

Pas d’exception pour les fusions-acquisitions: la pandémie a, comme ailleurs, laissé des traces au premier semestre, mais passé l’effroi des premières semaines, la marmite frémit de nouveau et les perspectives sont loin d’être bouchées.

Six mois après un début d’année en fanfare, les séquelles de la crise sont là.

«Il y a un très net recul des opérations au plan mondial, sans surprise, avec un nombre d’opérations en baisse de l’ordre de 22% et en termes de valeur de 40%», détaillent auprès de l’AFP Frédéric Moreau et Alexandre Ancel, associés du cabinet Allen & Overy.

Néanmoins, une majorité de dossiers «déjà bien avancés est allée au bout du processus», il a fallu «des situations très particulières pour que cela coince», souligne Bruno Villard, responsable des fusions-acquisitions pour la zone Europe, Moyen-Orient et Afrique, chez BNP Paribas CIB.

«Nous avons connu deux phases. La première dans une ambiance de fin du monde, où certains dossiers ont quand même continué à progresser, et puis les banques centrales ont commencé à intervenir et cela a redynamisé les opérations», explique pour sa part Kyril Courboin, directeur général France de JPMorgan.

Opération XL en Europe

L’Europe s’en sort plutôt bien, grâce au rapprochement entre Virgin Media et 02 qui va donner naissance à un poids lourd dans les télécoms britanniques, valorisé plus de 40 milliards d’euros.

«Le continent enregistre ainsi une augmentation en valeur de 15% au premier semestre», notent MM. Moreau et Ancel, «mais il y a une baisse de 34% en nombre d’opérations».

«Le dynamisme de l’Europe est en train de se confirmer» et «nous voyons que nos grands clients ont des politiques de renforcement» sur le continent, constate de son côté Georges Holst, responsable de la clientèle grandes entreprises chez BNP Paribas CIB.

Aux Etats-Unis en revanche «la chute est des 61% en valeur et de 15% en volume», ajoutent MM. Moreau et Ancel.

Même si la crainte d’une deuxième vague est dans tous les esprits, l’optimisme reste majoritairement de mise parmi les experts pour la suite.

«Cela va rebondir, mais 2020 risque quand même d’être un mauvais millésime au niveau mondial, car il y a un laps de temps incompressible pour monter des opérations. En revanche, il y a pas mal d’ingrédients pour que 2021 soit une bonne année», estime Hubert Preschez, codirecteur de la banque d’investissement de HSBC.

«2020 sera forcément spécifique. Mais passée l’urgence, beaucoup de chefs d’entreprises se projettent à nouveau», estiment pour leur part Philippe Duval, président du comité de direction d’Edmond de Rothschild Corporate Finance et Arnaud Petit, directeur associé.

Et, complètent-ils, «alors que depuis quelques années, certains hésitaient à se lancer, ils sont désormais plus que jamais décidés à agir, ce qui entraîne un surcroît d’activité».

Baisse des prix

Par ailleurs, «les prix complètement délirants atteints avant la pandémie vont baisser, mais cela dépendra des secteurs», relèvent MM. Moreau et Ancel.

La santé, les technologies ou les télécoms devraient rester recherchés et à des prix similaires à ceux de l’avant-crise.

Sur le versant sombre, le tourisme ou le commerce de détail non alimentaire sont menacés par des restructurations.

Quant aux fonds activistes, qui achètent une participation minoritaire pour chercher à influencer la gouvernance de groupes, JPMorgan anticipe dans une étude «une poussée significative à la suite de la pandémie», facilitée par la baisse du prix des actions, la forte volatilité et la vulnérabilité de nombreuses entreprises fragilisées par le Covid-19.

Au-delà des opérations, la crise a aussi fait sentir ses effets sur la façon d’exercer le métier de banquiers d’affaires.

«Notre activité est d’ordinaire fortement basée sur des rencontres physiques, des visites de sites... et là tout s’est fait de manière virtuelle», relate M. Courboin.

«Cela a du coup plus favorisé les opérations bilatérales avec des échanges d’actions entre entreprises», ajoute Augustin d’Angerville, responsable corportate M&A France chez JPMorgan.

«La bonne surprise de ce confinement», relève M. Preschez, reflétant un sentiment partagé dans la profession, a été une «qualité du dialogue» renforcée avec les dirigeants de sociétés, moins accaparés par le quotidien et soucieux «d’analyser les tenants et les aboutissants de cette crise».

A lire aussi...