La BCE, droite dans ses bottes, garde son cap expansif

AWP

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La BCE a maintenu toutes ses mesures de soutien à l’économie malgré la forte poussée de l’inflation en zone euro, renvoyant à décembre une normalisation progressive de la politique monétaire.

La Banque centrale européenne (BCE) a maintenu jeudi toutes ses mesures de soutien à l'économie malgré la forte poussée de l'inflation en zone euro. L'institut d'émission renvoie à décembre la décision concernant une normalisation progressive de sa politique monétaire.

Les vingt-cinq membres du conseil des gouverneurs de la BCE ont, comme attendu, confirmé l'arsenal monétaire en place, pour permettre aux États, ménages et entreprises, de se financer dans de bonnes conditions et ne pas compromettre la reprise. Sous pression pour justifier la nécessité de poursuivre ces soutien, en pleine flambée des prix, la présidente de l'institution Christine Lagarde est restée droite dans ses bottes.

«Nous continuons à prévoir que l'inflation à moyen terme restera inférieure à nos objectifs de 2%», a martelé Mme Lagarde. «Nous sommes absolument déterminés à atteindre cet objectif (...). Nous devons être patients", a ajouté la Française.

Les marchés européens jugent probable une hausse des taux directeurs au troisième trimestre de 2022, un véritable tournant après une décennie de baisse continue. Mais pour planifier une éventuelle hausse de taux, la BCE se fonde sur les prévisions d'inflation à l'horizon 2023. Or pour l'instant, la banque s'attend à que l'inflation n'atteigne que 1,5% à cette date.

«Les conditions de relèvement des taux d'intérêt sont assez bien définies (...). Selon l'analyse actuelle, elles ne sont pas satisfaites», a insisté Mme Lagarde. Lors de la réunion de jeudi, les taux directeurs ont été maintenus à leur plus bas niveau, notamment celui, négatif, de -0,5% qui taxe les dépôts en excès des banques, lorsqu'ils ne sont pas distribués dans l'économie.

Réaction attendue

Autre instrument de la BCE pour soutenir l'économie, les rachats de dette dans le cadre du programme «PEPP» vont également se poursuivre durant l'automne, à un rythme moins élevé que lors des précédents trimestres. Le volume du programme, soit 1850 milliards d'euros, dont près de 80% sont déjà dépensés, n'a pas changé.

Ce dispositif exceptionnel expirera fin mars 2022, du moins si la crise liée au Covid-19 est jugée terminée, et les analystes parient sur la mise en place d'un nouveau dispositif pour assurer une transition en douceur. Christine Lagarde s'est là aussi gardée de dévoiler les intentions de la BCE : «Ce qui suivra [le PEPP] sera débattu en décembre», lors de la dernière réunion de l'année, a-t-elle répété.

Cette discussion s'annonce délicate sur fond d'opposition grandissante au conseil de la BCE entre «faucons", favorables à un resserrement monétaire, et «colombes» voulant maintenir un cap expansif. Essence, services, matériaux... les prix s'envolent, faute d'offre suffisante, et les opinions publiques en Europe sont chauffées à blanc, accentuant les attentes vis à vis des gardiens de l'euro pour qu'ils réagissent.

En zone euro, le taux d'inflation a atteint 3,4% en septembre, sur un an. La hausse s'annonce encore plus marquée en octobre, alors qu'en Allemagne, le taux d'inflation a grimpé à 4,5%, selon une première estimation communiquée jeudi. «Nous avons parlé inflation, inflation, inflation», a souligné Mme Lagarde à propos de la réunion de jeudi.

Certes «l'actuelle hausse de l'inflation va durer plus longtemps que prévu», a-t-elle reconnu, mais «nous nous attendons à ce qu'elle ralentisse au cours de l'année prochaine», à la faveur d'une amélioration sur le front des chaînes logistiques et des prix de l'énergie.

La BCE se justifie

Les banques centrales sont prises en étau entre retour de l'inflation et menaces sur la croissance, en raison de la crise mondiale des chaînes logistiques. L'élan de la reprise «ralentit», a ainsi mis en garde jeudi la BCE.

Mais d'autres grands argentiers ont déjà choisi de passer à l'action pour dompter l'inflation. La Fed a préparé le terrain pour une annonce de réduction de ses achats d'actifs. Le gouverneur de la Banque d'Angleterre Andrew Bailey, a affirmé que la banque centrale britannique «devrait agir» sur l'inflation à l'avenir, ce qui a déclenché des spéculations sur une hausse prochaine des taux.

«Nous ne parlons pas des mêmes économies. Les perspectives sont différentes», a là encore expliqué Mme Lagarde. «Certaines d'entre elles ont déjà atteint ou dépassé l'objectif [d'inflation], ce qui justifie pleinement qu'elles adoptent des approches différentes».

 

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