L’armée russe étend son offensive en Ukraine

AWP

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Centre industriel situé sur le Dniepr, un fleuve qui marque la séparation entre l’Est en partie prorusse de l’Ukraine et le reste du pays, Dnipro a été la cible de raids qui ont fait au moins un mort, selon les autorités locales.

L’armée russe a étendu vendredi son offensive en Ukraine, frappant pour la première fois la ville de Dnipro et visant deux aéroports militaires dans l’ouest du pays, tandis que l’étau se resserre autour de Kiev, la capitale.

Le président russe Vladimir Poutine a aussi encouragé le recours à des combattants «volontaires» aux côtés des quelque 150'000 forces russes déjà engagées sur le terrain pour cette guerre qui a jeté jusqu’ici sur les routes plus de quatre millions de personnes. Parmi elles figurent 1,9 million de déplacés internes et plus de 2,5 millions de réfugiés à l’étranger, majoritairement en Pologne, selon le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés.

Centre industriel situé sur le Dniepr, un fleuve qui marque la séparation entre l’Est en partie prorusse de l’Ukraine et le reste du pays, Dnipro a été la cible de raids qui ont fait au moins un mort, selon les autorités locales.

Tôt vendredi matin, «il y a eu trois frappes aériennes sur la ville, sur un jardin d’enfants, un immeuble résidentiel et une usine de chaussures à deux étages où un incendie s’est ensuite déclaré. Une personne est décédée», ont annoncé les services d’urgence ukrainiens.

Deux soldats ukrainiens ont par ailleurs été tués et six blessés dans le bombardement de l’aéroport militaire de Lutsk, dans le nord-ouest du pays.

«A 05h45 (03h45 GMT), quatre roquettes ont été tirées, selon nos services, par un avion de chasse de l’armée russe sur l’aérodrome militaire de Lutsk», a indiqué sur Telegram le responsable de l’administration régionale, Youriy Pohuliayko.

Les forces russes ont également visé l’aéroport militaire d’Ivano-Frankivsk, dans l’extrême ouest du pays. Les deux bases aériennes ont été «mises hors service», a précisé le porte-parole du ministère russe de la Défense, Igor Konachenkov.

«Explosions du côté de l’aéroport. Tout le monde à l’abri! Ne publiez aucune photo, adresse ou coordonnées!», a averti de son côté le maire Ilhor Polichtchouk sur Facebook. Les explosions ont provoqué des interruptions de chauffage dans la ville.

Après avoir atteint les faubourgs de Kiev, l’armée russe tente aussi d’éliminer les défenses ukrainiennes dans plusieurs localités à l’ouest et au nord de la capitale - à Andriivka, Kopyliv, Motyjyne, Bouzova, Horenytchi, Boutcha et Demydiv - pour la «bloquer», a expliqué dans la nuit de jeudi à vendredi l’état-major ukrainien.

«Situation dantesque»

«Un mouvement de troupes» russes vers Brovary, à l’est de Kiev, n’est par ailleurs «pas exclu», a-t-il précisé.

Des combats ont été enregistrés à Irpin et Makarov, à l’ouest de la capitale. Des bombardements ont aussi visé Boutcha et des missiles la localité de Baryshivka, près Brovary, qui ont touché des immeubles d’habitation.

La région de Kiev se «prépare à évacuer la population des localités les plus menacées», ont annoncé les autorités régionales. Près de 20.000 personnes en ont été déjà évacuées mercredi et jeudi et quelque 100.000 au total ces deux derniers jours des villes en proie aux combats, selon les autorités ukrainiennes.

S’il reste un peu moins de deux millions d’habitants dans la capitale - la moitié de sa population ayant fui depuis le début de l’invasion russe le 24 février - «Kiev s’est transformée en forteresse», a dit le maire, Vitali Klitschko.

Des raids aériens nocturnes ont aussi frappé les villes de Tchernihiv (nord), Soumy (nord-est) et Kharkiv (est), déjà fortement touchées depuis le début de l’offensive russe, endommageant immeubles d’habitation et infrastructures d’alimentation en eau et électricité.

A Nizhyn, près de Tchernihiv, deux personnes ont été tuées et huit blessées par des lance-roquettes multiples Ouragan. Des combats ont également eu lieu près de Tchernihiv et dans la région de Kharkiv.

Dans le sud-est du pays, l’armée russe «concentre ses efforts» sur Severodonetsk et sur la ville assiégée de Marioupol, un port stratégique sur la mer d’Azov, où le bombardement d’un hôpital pédiatrique a fait trois morts mercredi et suscité une vague de condamnations internationales, selon l’état-major ukrainien.

Un représentant du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) a dépeint une situation dantesque à Marioupol où les habitants sont privés d’électricité, d’eau et de gaz: «Les gens ont commencé à se battre pour la nourriture. D’autres ont détruit la voiture d’une autre personne pour en retirer l’essence», raconte Sasha Volkov dans un enregistrement audio envoyé aux médias.

A Severodonetsk et Rubizhne, proches de la ville séparatiste prorusse de Lougansk, des tirs de lance-roquette multiples ont provoqué de nombreux incendies dans les immeubles d’habitation ainsi que dans une maison de retraite, ont indiqué les autorités locales.

«Démoralisés»

Les combats se poursuivent aussi pour le contrôle de Mykolaïv (sud), relève l’état-major ukrainien, notant que Moscou a essayé «d’entamer une offensive» vers les grandes villes de Zaporojie et Krivoï Rog.

«Les occupants russes sont stoppés, démoralisés et subissent de lourdes pertes», a-t-il assuré.

Dénonçant de son côté l’envoi de «mercenaires» par l’Occident, le maître du Kremlin a demandé à son armée d’aider les «volontaires» à rejoindre la zone de combat.

Les Etats-Unis ainsi que leurs alliés européens envisageaient, en réponse aux atrocités semblant «s’intensifier» contre les civils ukrainiens, des sanctions supplémentaires contre la Russie.

Ils s’efforcent aussi d’aider l’Ukraine militairement tout en évitant l’implication directe des Etats membres de l’Otan. Le Congrès américain a adopté jeudi une enveloppe faramineuse de près de 14 milliards de dollars pour la crise ukrainienne.

Après les premiers pourparlers à haut niveau entre les belligérants depuis le 24 février - qui se sont tenus en Turquie jeudi sans aboutir à un cessez-le-feu - Moscou a promis l’ouverture quotidienne de couloirs humanitaires pour permettre aux Ukrainiens fuyant les combats de gagner la Russie.

Mais l’Ukraine, où la population des villes assiégées par les troupes russes vit terrée en raison des bombardements, refuse d’évacuer vers la Russie et réclame des corridors humanitaires à l’intérieur de ses frontières.

Réunis en sommet à Versailles, près de Paris, pour élaborer les réponses économiques et militaires au choc de l’invasion russe, les chefs d’Etat et de gouvernement des Vingt-Sept ont exclu pour leur part une adhésion rapide de l’Ukraine à l’UE, tout en ouvrant la porte à des liens plus étroits.

Le Conseil de sécurité de l’ONU se réunira par ailleurs vendredi à 16H00 GMT à la demande de Moscou, sur la fabrication supposée d’armes biologiques en Ukraine, niée catégoriquement par M. Zelensky.

 

Plus de 2,5 millions de personnes ont fui l’Ukraine, selon l’ONU

Plus de 2,5 millions de personnes ont fui l’Ukraine, dont 116.000 sont des ressortissants de pays tiers, depuis le lancement de l’invasion russe le 24 février, ont indiqué les Nations unies vendredi.

«Le nombre de réfugiés venus d’Ukraine - tragiquement - a atteint aujourd’hui 2,5 millions. Nous estimons également qu’environ deux millions de personnes sont déplacées à l’intérieur de l’Ukraine», a indiqué le chef de l’agence de l’ONU pour les réfugiés, Filippo Grandi, dans un tweet.

«Des millions de personnes sont contraintes de quitter leur foyer à cause de cette guerre insensée», a-t-il ajouté.

Sur les plus de 2,5 millions de personnes qui ont fui l’Ukraine, 116'000 étaient des ressortissants de pays tiers, a indiqué séparément l’Organisation internationale pour les migrations (OIM).

La Pologne accueille de très loin le plus grand nombre de réfugiés depuis le début de l’invasion russe.

Depuis le 24 février, plus de 1,5 million de réfugiés sont entrés dans le pays, selon les garde-frontières polonais. Pour la seule journée de jeudi, ils ont enregistré 87.000 arrivants.

Au 9 mars, l’ONU estimait que quatre millions de personnes pourraient vouloir quitter l’Ukraine pour échapper à la guerre au cours des six premiers mois de l’offensive.

L’ONU estime par ailleurs que le conflit pourrait déplacer jusqu’à 6,7 millions de personnes à l’intérieur de l’Ukraine, dont 4,3 millions auront besoin d’une aide humanitaire vitale.

Avant l’offensive russe, les autorités ukrainiennes avaient enregistré 1,46 million de personnes déplacées à l’intérieur du pays, dont 854.000 résidaient dans les zones contrôlées par le gouvernement, selon l’ONU.

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