Le spécialiste genevois des parfums et des arômes Givaudan a dévoilé vendredi des résultats en progression pour l’exercice 2024 avec un bénéfice net dépassant le milliard pour la première fois. Malgré le possible durcissement des tarifs douaniers voulu par le gouvernement Trump et la consommation amère, la direction se dit confiante pour le bouclement de sa stratégie 2025.
De janvier à décembre, le chiffre d’affaires de Givaudan a augmenté de 7,2% à 7,4 milliards de francs. La croissance organique (corrigée des acquisitions, des cessions et des effets de change) a été de 12,3% contre 4,1% un an plus tôt, indique un communiqué paru vendredi. «De 2021 à 2024, elle a été de 7,2%», précise le directeur général Gilles Andrier à l’agence de presse AWP.
La division Arômes a augmenté de 4,1% à 3,75 milliards et la division Parfums de 10,5% à 3,66 milliards. Le patron souligne une forte croissance des ventes par des volumes élevés sur tous les marchés. «La consommation a baissé, et il a fallu réduire les quantités vendues tout en gardant le même prix. Nos clients sont revenus aux volumes avec plus d’innovations et de lancements de produits.»
Concernant la rentabilité, le bénéfice opérationnel brut (Ebitda) s’est affiché à 1,7 milliard de francs, soit en hausse de 19,8%. La marge afférente a atteint 23,8% contre 21,3% un an plus tôt. Ainsi le bénéfice net a atteint 1,1 milliard, soit 22,1% de plus.
Le conseil d’administration pourra proposer à ses actionnaires un dividende de 70 francs contre 68 francs un an plus tôt.
Ces résultats répondent aux attentes du consensus AWP dont les analystes tablaient sur des recettes totales de 7,4 milliards, une croissance organique de 12,1% et un bénéfice net de 1,11 milliard.
Une carte mondiale de mauvais goût
M. Andrier déplore «des conflits géopolitiques qui se perpétuent, sans malheureusement de changements», notamment après les attaques en mer Rouge qui avaient augmenté les délais de livraison un an plus tôt. «Les chaînes d’approvisionnement sont stables. Nous sommes revenus à la normale sur les délais et sur les problèmes connus après le Covid.»
Question devises, «nous avons une immunité par rapport au franc en pourcentage de profitabilité, pas en valeur absolue. L’effet des devises n’a pas d’effet notable grâce à un bon équilibrage», estime-t-il.
Par régions, les plus fortes progressions reviennent aux pays émergents. En données comparables, la hausse a été de 27,3% en Amérique latine et de 20,9% en Asie du Sud, en Afrique et au Moyen-Orient, alors qu’elle a été de 5,9% en Europe et 5,5% en Amérique du Nord.
La volonté du «made in America» de Donald Trump est déjà appliquée par Givaudan. «Non pas pour répondre à la politique américaine, mais parce que nous le faisions déjà», rétorque le patron. «Seulement, nous dépendons d’ingrédients nécessaires qui ne proviennent pas uniquement des Etats-Unis.» Dans l’éventualité de ces tarifs douaniers, «il faudra les répercuter sur les clients».
Toujours aux Etats-Unis, le site Givaudan Sense Color situé à Louisville avait explosé en novembre, faisant deux morts et plusieurs blessés. «Nous n’avons pas encore de conclusion sur l’enquête, et étudions les options possibles pour le site», explique M. Andrier. «En attendant, nous prenons soin de nos employés et de la communauté autour.»
Dernière ligne droite
Concernant l’exercice en cours et sa stratégie sur cinq ans, Givaudan est «sur la bonne voie. Pour ce mois de janvier, nous notons déjà une très bonne tendance», souligne le directeur général.
Givaudan augmentera ses prix de façon parcellaire. «Il ne s’agit pas d’une hausse globale comme il y a trois ans, mais sur des filières comme le citrus ou le patchouli», explique-t-il.
En filigrane, Givaudan a annoncé des changements en interne. Antoine Khalil prendra la tête de la division Arômes le 1er avril, dont il est actuellement le responsable commercial. Au sein du groupe depuis 21 ans, il succède à M. D’Amico qui prendra sa retraite après sept ans à ce poste, rapporte un communiqué.
Tous les membres du conseil d’administration se représenteront lors de l’assemblée générale du 20 mars, à l’exception d’Olivier Filliol. Melanie Maas-Brunner et Louie D’Amico seront proposés comme nouveaux membres.
Avec une ouverture boursière en dent de scie vendredi, l’action Givaudan ne rassurait que partiellement les investisseurs. Pour Daniel Bürki de la Banque cantonale de Zurich (ZKB), «il y aura probablement une normalisation de la croissance en 2025». Konstantin Wiechert de Baader Helvea parle de «position forte pour maintenir ou augmenter les prix et donc conserver les marges», rejoignant l’avis de son confrère Arben Hasanaj chez Vontobel. «L’inflation des matières premières redevient un sujet, mais Givaudan est connu pour gérer ce problème de manière proactive».
Aux douze coups de midi, le titre Givaudan perdait 1,8% à 3869 francs dans un SMI en hausse de 0,38%.