France: créations d’emploi trop faibles pour réduire le chômage

AWP

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Le marché du travail a enregistré un quatorzième trimestre de créations nettes d’emploi salarié de suite, selon l’Insee.

Le secteur privé français a continué de créer des emplois au troisième trimestre, mais à un niveau trop faible (+0,2%), conséquence en partie du ralentissement de la croissance cette année, pour faire refluer fortement le chômage.

Côté pile, selon l’estimation provisoire de l’Insee publiée mardi, le marché du travail a enregistré un quatorzième trimestre de créations nettes d’emploi salarié de suite, avec 30’200 nouveaux postes, plus qu’au trimestre précédent (+22’400). Sur un an, les entreprises ont créé 211’100 emplois salariés (+1,1%), pour atteindre un record de 19,43 millions de postes.

Par secteur, la hausse est la plus forte dans la construction (+0,5% sur le trimestre, soit +6’800), confirmant l’enquête de la Banque de France publiée lundi faisant état de carnets de commande «bien garnis». La progression reste modérée dans les services marchands, moteur de l’économie (+0,2%, soit +23’300), en raison d’un recul de l’intérim (-10’300) alors que l’industrie se stabilise.

Mais, côté face, «la dynamique de l’emploi reste beaucoup plus réduite que l’an dernier», relève Philippe Waechter, chef économiste chez Ostrum Asset Management.

En 2018, il a été ainsi créé 33’800 emplois en moyenne par trimestre contre 82’100 sur les trois premiers trimestres de 2017.

Cette évolution reflète d’abord le ralentissement de la croissance du début de l’année (+0,2% lors des deux premiers trimestres), même si elle a rebondi au troisième à +0,4%, un niveau qui devrait également être atteint au quatrième, selon la Banque de France.

«L’expansion de l’activité a franchement ralenti depuis le début de l’année et l’emploi a suivi (la même tendance) mais de façon plus marquée. Le rebond du PIB au troisième trimestre, bien que limité, a été beaucoup plus rapide que celui de l’emploi», constate M. Waechter.

Pour lui cela pose la question du «retard» de réactivité du marché du travail sur la croissance, «beaucoup plus marqué en France que dans les autres pays de la zone euro».

Hausse de la population active

Une analyse partagée devant la presse mardi par le président du Medef, Geoffroy Roux de Bézieux. «Quand la croissance repart dans tous les pays autour de nous, le mouvement (à la baisse du chômage) est plus fort», a-t-il dit, s’inquiétant «qu’on commence à dire qu’au fond le chômage structurel est à 9%».

Le dirigeant patronal met en avant «l’inadaptation de nos compétences par rapport à la demande des entreprises», comme le gouvernement qui veut entreprendre un effort massif de formation pour les chômeurs de longue durée et les jeunes non qualifiés.

Mais pour Eric Heyer, directeur du département analyse et prévision de l’OFCE, les chiffres de mardi ne viennent pas confirmer ces difficultés de recrutement des entreprises.

«0,2% de créations d’emploi quand on a 0,4% de croissance, ça veut dire 0,2% de productivité, c’est un chiffre tout à fait stable, sans surprise. Il n’y a pas de hausse de la productivité, le marché du travail fonctionne normalement», juge-t-il.

«Les difficultés de recrutement ne se voient pas dans le rythme de créations d’emploi, ni dans les progressions de salaires qui restent modérées», analyse-t-il.

L’indice du salaire mensuel de base, également publié mardi, a ainsi augmenté de 0,3% au 3e trimestre et de 1,5% sur un an, un chiffre à mettre en regard avec les 1,9% de hausse des prix.

Si l’économie a donc continué de créer des emplois au troisième trimestre, le rythme risque d’être insuffisant pour faire baisser sensiblement le taux de chômage.

Au deuxième trimestre, il était de 9,1%. Le prochain chiffre sera connu le 20 novembre.

Mais ce taux est difficilement prévisible, selon M. Heyer, car il faut prendre en compte également la diminution de l’emploi public et surtout la hausse de la population active.

Or, «on a en ce moment des mouvements de population active assez violents d’un trimestre à l’autre qu’on a du mal à anticiper», du fait notamment de personnes qui reviennent sur le marché du travail après s’en être durablement éloignées, explique M. Heyer.

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