L’Agence internationale de l’énergie ne voit «aucun signe d’un relèvement de la production» dans les pays qui le peuvent.
Les problèmes de production qui affectent plusieurs importants pourvoyeurs d’or noir dans le monde vont continuer de peser sur le marché cette année, alors que les marges de manoeuvre ailleurs vont devenir limitées, a alerté jeudi l’Agence internationale de l’énergie (AIE).
«Une partie de ces difficultés sur la production devrait se résoudre, mais le nombre important de perturbations nous rappelle la pression sur l’offre mondiale de pétrole», prévient l’AIE dans son rapport mensuel sur le pétrole.
Depuis plusieurs semaines, le Venezuela, le Canada, la Norvège ou encore la Libye, même si la situation semble s’améliorer pour cette dernière, ont vu leur production baisser ou être pénalisée par des problèmes sur certains sites.
D’autres producteurs, Arabie saoudite et Russie en tête, ont compensé en pompant davantage de brut et l’offre mondiale a quand même crû de 370.000 barils par jour (b/j) en juin à 98,8 millions de barils par jour (mbj), mais selon l’agence, «aucun signe» ne montre que ce relèvement de la production dans les pays qui en ont les capacités sera suffisant pour «apaiser les craintes d’une contraction du marché».
Et «cela deviendra un problème encore plus grand, dans la mesure où l’augmentation de la production dans les pays du Golfe et en Russie, aussi bienvenue soit-elle, se fait au détriment du matelas de sécurité des capacités mondiales disponibles, qui pourrait atteindre ses limites», prévient le bras énergétique des pays de l’OCDE.
En juin, l’offre libyenne a chuté de 260.000 b/j du fait de l’interruption de la majorité des exportations après la prise de contrôle de certaines installations par les autorités parallèles. La Compagnie nationale libyenne, reconnue par la communauté internationale, a toutefois annoncé mercredi avoir repris la gestion des terminaux pétroliers.
La production a continué de baisser au Venezuela (-60.000 b/j), sans espoir d’un rebond à court terme, selon l’AIE, comme en Angola (-60.000 b/j), ainsi qu’en Iran du fait d’un recul des exportations. Et selon l’AIE, l’impact du retour des sanctions américaines ne se fera pleinement sentir que plus tard dans l’année.
Dans les pays non membres de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep), des problèmes sur certains sites et gisements en Alberta (Canada) et en Norvège ont perturbé la production, alors que des tensions sociales entre la compagnie Shell et ses salariés dans ce pays pourraient encore limiter l’offre.
Par ailleurs, la hausse de la production au Brésil depuis le début de l’année est inférieure aux prévisions.
Conséquence: l’AIE a légèrement abaissé à 1,97 mbj (contre 2 mbj auparavant), sa prévision de croissance de la production hors Opep pour cette année, et table sur une hausse «modeste» de 1,84 mbj l’an prochain, avec un ralentissement attendu aux Etats-Unis.
«Cette vulnérabilité soutient actuellement les cours du pétrole et devrait continuer à le faire», constate l’agence. Si les cours ont globalement reculé en juin, ils sont repartis à la hausse à la fin du mois avec un rebond de 7% pour le Brent de la mer du Nord et de 13% pour le «light sweet crude» (WTI) à New York.
Pour assurer la stabilité du marché, l’Arabie saoudite et la Russie ont intensifié leur production. Le royaume saoudien a pompé 430.000 b/j supplémentaires, et la Russie près de 100.000 b/j. Et 24 pays, dont les membres de l’Opep et la Russie, se sont mis d’accord le 22 juin pour augmenter leur production. La Russie s’est dit prête à ajouter 200.000 b/j durant le second semestre 2018.
Mais seuls trois pays – l’Arabie saoudite, les Emirats arabes unis et le Koweït – disposent de capacités de production supplémentaires et immédiatement mobilisables pour continuer de compenser les baisses ailleurs dans le monde, estime l’Agence.
Ils pourraient ajouter 500.000 b/j dès juillet et Ryad projette notamment de pomper jusqu’à 11 mbj, ce qui ramènerait ses capacités encore disponibles sous les 1 mbj, un niveau «sans précédent», remarque l’AIE, qui alerte depuis plusieurs mois sur le manque d’investissement mondial pour mettre en service de nouvelles capacités.
En parallèle l’AIE a maintenu sa prévision de croissance de la demande mondiale de pétrole pour 2018 et 2019 à 1,4 mbj.