Zurich n'a cessé de progresser dans l'investissement durable

Yves Hulmann

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Pour Dominik Scheck, responsable ESG chez Credit Suisse Asset Management, Zurich a su évoluer d’une position de niche au mainstream dans ce domaine.

Reportée à la dernière minute mercredi soir en raison de la situation sanitaire, l’édition 2020 du Zurich Forum for Sustainable Investment (ZFSI) devait accueillir jeudi à Zurich plus d’une trentaine d’orateurs, incluant aussi bien des gérants d’actifs spécialisés dans l’investissement durable, des fondateurs de start-up, des représentants de caisses de pension ou encore le vice-directeur de la BNS. Parmi les intervenants qui devaient s’y exprimer, Dominik Scheck, responsable des activités ESG pour la Suisse et la région EMEA (Europe, Moyen-Orient, Afrique) chez Credit Suisse Asset Management, fait le point sur les atouts de la place financière zurichoise dans le domaine de l’investissement durable.

Jusqu’à il y a quelques années, la place financière zurichoise n’apparaissait pas particulièrement être à la pointe dans le domaine de la finance durable. Il n’y a pas eu jusqu’ici à Zurich d’événements comparables à la conférence Building Bridges qui s’était tenue à Genève en octobre 2019. Comment la place financière zurichoise peut-elle se mieux se profiler dans la finance durable sur le plan international?

Nous voyons Zurich, à côté de Genève et de Bâle, plutôt en tant que pionnier pour les placements durables. Zurich disposait déjà tôt d’une offre importante dans ce domaine, qui a évolué d’une niche au mainstream. Les placements durables sont devenus un facteur important dans le choix des gérants de fortune et des stratégies d’investissement. Cela vaut aussi bien pour la catégorie souvent évoquée des «Millenials» et de jeunes investisseurs privés que toujours davantage pour les investisseurs institutionnels, tels que des caisses de pension, des family offices et des fondations. Il y a quelques jours, le 27 octobre 2020, le nouveau classement du Global Green Finance Index (GGFI) a été publié. Celui-ci évalue l’étendue de l’offre et la qualité de 74 centres mondiaux en rapport avec les investissements durables. Comme cela a déjà été le cas durant les années précédentes, Zurich a pu s’améliorer de manière significative et partage désormais la première place avec Amsterdam.

«Zurich a la capacité d’attirer les jeunes talents et de les former.»
Qu’est-ce qui a contribué à cette amélioration?

Certainement la capacité d’innovation des prestataires de services financiers zurichois mais également la possibilité de s’établir en tant que jeune entreprise ou start-up dans le secteur financier, à l’exemple des fintechs. S’y ajoute également le nombre de conférences et de forums consacrés à la thématique des investissements durables qui a augmenté dans la ville. De manière générale, l’offre de formation initiale ou continue dans ce domaine s’est étendue. Zurich a la capacité d’attirer les jeunes talents et de les former.

Beaucoup de représentants de caisses de pension devaient aussi s’exprimer lors du ZSFI. Avez-vous une offre de services spécifiques destinés à répondre aux besoins des investisseurs institutionnels, différente de celle proposée aux clients privés?

Les caisses de pension, respectivement les investisseurs institutionnels en général, ont certainement d’autres exigences que les investisseurs privés. Les caisses de pension, en particulier, sont en général soumises à des conditions cadre plus strictes, notamment s’agissant du risque et de la diversification. Ici, il est nécessaire de concilier l’optimisation en matière de durabilité avec d’autres exigences. Les investisseurs institutionnels doivent être pris en charge et conseillés de manière plus intensive. Cela implique, par exemple, le fait que des spécialistes et des gérants de portefeuille de Credit Suisse Asset Management participent régulièrement aux réunions concernant la politique de placement et qu’ils puissent discuter avec les clients des perspectives macroéconomiques, des marchés financiers et du portefeuille des clients. S’y ajoute aussi le fait que les clients institutionnels attendent un reporting détaillé sur les risques qui peuvent résulter d’aspects en lien avec la durabilité.

«Je ne pense pas que les grandes banques ne puissent pas apparaître
comme de purs spécialistes de l’investissement durable.»
Comparé à des gérants d’actifs ou des acteurs de niche, les grandes banques ne peuvent pas se présenter comme étant de «purs» spécialistes de l’investissement durable. Est-ce un défi particulier pour un institut comme Credit Suisse? Credit Suisse Asset Management devra-t-elle par exemple abandonner certaines activités ou renoncer à certains investissements pour pouvoir mieux se profiler comme investisseur durable?

Je ne pense pas que les grandes banques ne puissent pas apparaître comme de purs spécialistes de l’investissement durable. Credit Suisse Asset Management Suisse s’est par exemple fixé pour objectif d’orienter la plus grande part de ses fonds actifs en fonction de critères de durabilité. C’est seulement s’agissant des produits pour lesquels les données en matière de durabilité ne sont pas encore suffisamment disponibles, ou quand nous n’avons pas la possibilité de décider entièrement du choix des titres, que nous restons encore en retrait de ce processus de transformation.

Dans le domaine de l’asset management, nous allons, si possible, davantage nous concentrer sur les investissements de notre gamme de fonds en tenant compte de nouveaux aspects spécifiques. Par exemple en évaluant la manière avec laquelle une entreprise gère bien ou mal ses activités en termes d’émissions de CO2 comparé à la concurrence. L’analyse financière traditionnelle des sociétés pourrait aussi être complétée par des facteurs de durabilité. Les activités controversées dans la chaîne d’approvisionnement, la question du traitement et de l’égalité des femmes à l’intérieur de l’entreprise sont quelques-uns des aspects qui pourraient être pris en considération, tout comme ceux de la biodiversité ou de la qualité des denrées alimentaires.

Chaque gérant d’actifs ou banque développe sa propre approche dans le domaine ESG. Si vous deviez citer trois ou quatre caractéristiques spécifiques de l’approche de Credit Suisse en matière d’investissement durable, quelles seraient-elles?

Credit Suisse Asset Management suit une approche relativement large en matière de placements durables. Cela signifie que nous prenons en considération non seulement certains critères d’exclusion mais que nous intégrons aussi davantage des informations relatives à la durabilité dans le processus d’investissement. Nous agissons comme des investisseurs actifs (d’après le principe d’«Active Ownership») et nous nous engageons pleinement à placer l’intérêt des clients au centre de nos activités. Une autre caractéristique à mentionner celle de notre reporting très étendu pour les clients: pour les fonds, nous avons introduit une factsheet séparée pour les aspects ESG tandis que, dans le cadre de nos mandats, les clients ont la possibilité d’obtenir un reporting individuel.

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