Regain d’intérêt pour les actions domestiques du Royaume-Uni

Yves Hulmann

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Luke Newman, gérant chez Janus Henderson, réduit ses positions dans les grandes capitalisations américaines.

Générer un rendement positif quel que soit l’environnement de marché fait partie des ambitions de Luke Newman, expert du domaine Total Return et Hedge Funds chez Janus Henderson. Il explique sa stratégie pour obtenir des rendements constants sur la durée.

Vous cherchez à obtenir des rendements positifs quel que soit l’environnement de marché. Est-ce aussi possible lors d’importantes phases de turbulences, comme cela a été le cas au début de février 2018 ou en décembre de l’an dernier?

Il n’existe bien entendu pas de recette toute faite permettant de générer des rendements positifs à tout moment. Pour obtenir néanmoins les rendements les plus constants possibles, nous pratiquons une approche active de sélection de titres («stock picking»). En février et décembre 2018, tout comme en août 2015, nous sommes parvenus à protéger le capital investi. Durant ces trois périodes, il n’y a toutefois pas eu de ventes massives de titres comparables à celles que l’on avait connues en 2008, par exemple. En août 2015, en février et en décembre 2018, il s’agissait avant tout de phases de volatilité accrue, induite par des facteurs politiques ou économiques spécifiques qui ont recueilli l’essentiel de l’attention des marchés. Globalement, en 2018, la volatilité a été largement causée par l’actualité politique, alors que les données économiques fondamentales n’étaient pas si négatives. A fin 2018, les cours reflétaient la plupart des nouvelles négatives. A savoir les incertitudes autour du Brexit, le fait que l’on s’acheminait en direction d’un «no deal» au Royaume-Uni, etc.

Nous nous attendons à ce que la volatilité
reste élevée en 2019.
Ces pics soudains de volatilité constituent donc aussi des opportunités intéressantes pour vous.

Il faut nuancer: la volatilité est bonne tant que l’on peut analyser ses causes. C’est plus difficile quand elle est causée par un événement qui surgit de nulle part – comme un tweet déstabilisateur de Donald Trump par exemple. Dans le second cas, il est très difficile d’ajuster à temps son portefeuille, car il est impossible d’en analyser les causes, ni les conséquences.

Après le pic observé fin décembre, la volatilité est largement retombée durant le premier trimestre. Qu’attendez-vous pour le reste de 2019?

Nous nous attendons à ce que la volatilité reste élevée en 2019. On ne peut pas se dire simplement – relaxons-nous, le pire est passé.

Le fait que la Fed ne relèvera pas ses taux, au moins jusqu’en 2020, n’est-il pas un important facteur stabilisateur pour les marchés?

En théorie, oui. D’un côté, le fait que la Fed ait adopté un ton plus conciliant, ou «dovish» en anglais, allant dans le sens d’une politique monétaire à nouveau plus accommodante, est un facteur à même de soutenir les marchés des actions. D’un autre côté, on ne sait toujours pas exactement ce qui a amené la Réserve fédérale à adopter cette position – sait-elle des choses sur la situation de l’économie américaine qui n’apparaissent pas encore dans les statistiques officielles? Anticipe-t-elle déjà des signes allant dans le sens d’une récession? Quelles que soient ses raisons, il faut rester attentif. Il en va de même pour la Chine dont l’économie manque de souffle. Les mesures mises en place par le gouvernement chinois suffiront-elles à relancer la croissance de l’économie? Et quel sera l’impact des droits de douane appliqués par les Etats-Unis sur les exportations chinoises? Tous ces aspects restent encore très incertains. Il y a actuellement de très grands points d’interrogation sur le plan macroéconomique – il faut en tenir compte.

Nous pensons qu’énormément de mauvaises nouvelles
sont déjà incluses dans les cours des sociétés britanniques.
Dans un tel environnement, quels sont les actifs ou secteurs que vous favorisez?

Nous investissons par exemple dans les grandes entreprises du domaine médical, tout comme nous le faisons aussi à nouveau de manière sélective au Royaume-Uni.

Alors que beaucoup d’investisseurs fuient toujours le Royaume-Uni…

Nous pensons qu’énormément de mauvaises nouvelles sont déjà incluses dans les cours des sociétés britanniques actuellement.

Après avoir eu une vue négative sur les actions du Royaume-Uni pendant trois ans, nous sommes redevenus plus positifs envers certaines sociétés britanniques. Nous avons désormais une position « longue » sur les sociétés orientées sur le marché intérieur au Royaume-Uni.

Dans quels secteurs plus précisément?

Des sociétés d’assurances telles que Legal & General ou Aviva nous paraissent par exemple particulièrement bon marché actuellement. Ou alors dans l’immobilier avec des sociétés comme le promoteur immobilier résidentiel Bellway ou l’entreprise de construction Taylor Wimpey. Ces sociétés ont une faible exposition sur le marché londonien et proposent aussi des logements destinés aux personnes avec des revenus modestes. Ces sociétés disposent de bilans solides, un faible endettement et elles offrent des dividendes attrayants.

L’économie américaine
s’approche d’une fin de cycle.
Quels secteurs évitez-vous au contraire?

Jusqu’ici, nous avions des positions «longues» concernant les grandes capitalisations américaines. Nous sommes passés à une position «short» sur ces titres. Jusqu’à l’an dernier, la plupart des changements politiques opérés aux Etats-Unis avaient été plutôt «pro-business». Le gouvernement avait mis en place des mesures visant à rapatrier aux Etats-Unis le cash offshore conservé à l’étranger par les grandes entreprises américaines. Cet impact tend maintenant à s’affaiblir. L’effet des réductions d’impôts accordées aux entreprises s’estompe. Plus généralement, l’économie américaine s’approche d’une fin de cycle. En outre, après une longue période de faiblesse du dollar qui a duré jusqu’au début de 2018, le billet vert s’est à nouveau renforcé.

Investissez-vous aussi dans des sociétés suisses?

Nestlé et Roche font partie de nos positions «longues». Il s’agit d’entreprises de grande qualité avec des caractéristiques défensives.

Elles s’inscrivent bien dans un scénario où les défensives regagneront en attrait.