Le crédit américain peu exposé au marché russe

Salima Barragan

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Terence Wheat de PGIM Fixed Income favorise les banques et les sociétés énergétiques.

Le marché de la dette d'entreprises américaines résiste mieux aux tensions géopolitiques que d’autres marchés obligataires en raison de sa faible exposition aux marchés russe et ukrainien. Du 28 février au 1er mars, les spreads de l’indice dédié n’ont bougé que de 12 points de base. Terence Wheat, Co-Responsable de l'équipe obligataire du marché US chez PGIM Fixed Income favorise les banques américaines, dont les fondamentaux sont peu affectés par les agitations en Europe ainsi que les acteurs de l’énergie qui profitent de la flambée de l’or noir. Entretien.

Face à la flambée du pétrole et les tensions en Ukraine, la Réserve fédérale américaine se retrouve dans une position peu confortable. Comment va-t-elle ajuster sa politique monétaire?

Avant le début des hostilités, nous craignions que la Fed ne commette une erreur de politique dans son combat contre une inflation plus revue depuis 30 ans, ce qui aurait pu ralentir la conjoncture américaine. Or, sa mission est devenue bien plus compliquée, car les pressions en Europe alimentent davantage le renchérissement. La hausse des prix sur les matières premières avec le risque de nouveaux embargos sur le pétrole russe est le principal danger. En conséquence, les perspectives de croissance économique aux États-Unis seront probablement révisées à la baisse, mais moins que celles des économies européennes.

Comment le marché du crédit américain a-t-il réagi aux récents développements géopolitiques?

Depuis le coup d’envoi de l’invasion, les spreads du crédit d’entreprises américaines se sont élargis autour de 15 points de base, un chiffre raisonnable et modéré. En fait, entre le 28 février et le 1er mars, les spreads de l'indice des obligations d’entreprises se sont élargis de 12 points de base. Nous restons prudents, car ils pourraient s’amplifier davantage compte tenu des pressions sur le pétrole. Sur le marché primaire, les sociétés qui cherchent à émettre des titres doivent faire des concessions.

Plusieurs entreprises du S&P 500 ont annoncé leur intention de stopper leurs activités en Russie et, pour la plupart, il s'agit d'un moyen raisonnable de minimiser encore plus leur présence dans ces marchés.   
Comment les levées de fonds des entreprises américaines sont-elles impactées?

La volatilité significative dans les marchés de taux et de spreads a réduit le nombre de jours durant lesquels les émetteurs Investment Grade sont prêts à tenter d'émettre de nouvelles obligations. Néanmoins, les émissions depuis le début de l'année jusqu'en février ont été les deuxièmes plus élevées jamais enregistrées et légèrement supérieures au rythme de 2021. Plus récemment, les concessions sont passées à environ 10 points de base en moyenne, mais avec des taux historiquement bas et des spreads encore un peu plus serrés que la moyenne post-crise financière. Le coupon moyen des nouveaux titres est inférieur aux coupons moyens qui arrivent à échéance. Le segment du haut rendement a toutefois connu un ralentissement considérable du rythme des nouvelles émissions, avec des volumes en baisse de 65% depuis le début de l'année jusqu'en février. Un détaillant américain noté BB a lancé une nouvelle opération au début du mois de mars, qui a suscité une demande massive et s'est très bien comportée sur les marchés secondaires, ouvrant potentiellement la voie à de futures émissions de titres à haut rendement de qualité lorsque les conditions du marché se stabiliseront.

Comment avez-vous ajusté vos perspectives d’investissement depuis le début du conflit?

Les actifs américains sont moins impactés que les européens où les écarts de crédit ont nettement sous performés en raison d’une menace de récession plus sérieuse. Nous essayons de réduire légèrement le risque et de rester dans notre région étant donné les incertitudes du marché.

Quelle est l’exposition des émetteurs américains aux marchés russe et ukrainien?

La plupart sont très peu liés à ces marchés. Plusieurs entreprises du S&P 500 ont annoncé leur intention de stopper leurs activités en Russie et, pour la plupart, il s'agit d'un moyen raisonnable de minimiser encore plus leur présence dans ces marchés.    

Dans quels secteurs les investisseurs peuvent-ils se tourner?

Bien que la période soit globalement difficile pour les actifs risqués, nous avons favorisons les banques américaines, dans la mesure où elles sont très peu exposées au marché russe. Ainsi que les acteurs de l’énergie, car ils profitent directemment de la flambée du pétrole.