L’indépendance financière au féminin

Salima Barragan

2 minutes de lecture

Anne-Sophie Tourrette lance le concept WomenInvest pour révéler le «money mindset» des femmes.

Révéler le potentiel de la gent féminine? C’est le leitmotiv d’Anne-Sophie Tourrette, fondatrice de la société de gestion Advisor One. A travers son expérience, elle a constaté de nombreuses lacunes en matière de finance auprès de sa clientèle féminine. D’où l’idée de lancer Women Invest, un programme d’ateliers en présentiel et en ligne, à l’attention des femmes qui souhaitent constituer un patrimoine. Des bases théoriques financières, des modules techniques, mais aussi une introduction à la psychologie de l’investisseur, structurent ce plan d’attaque. Entretien.

Vous vous dédiez aux femmes depuis 2018. Pour quelles raisons?

Cette date marque le dixième anniversaire de ma société de gestion. En établissant le bilan de la décennie écoulée et une projection sur les dix prochaines années, j’ai pris conscience que les femmes me renvoyaient un message positif: elles avaient considérablement appris lors de nos échanges. C’est en m’investissant pour les accompagner que j’ai souhaité donner une nouvelle impulsion au modèle d’affaires de ma société.

«Il s’agit d’apporter une approche de gestion à un plus grand nombre de femmes afin qu’elles se sentent à l’aise avec leurs placements et qu’elles puissent poursuivre leurs objectifs d’investissement.»
Pouvez-vous expliquez le concept de WomenInvest?

Il s’agit d’apporter une approche de gestion à un plus grand nombre de femmes afin qu’elles se sentent à l’aise avec leurs placements et qu’elles puissent poursuivre leurs objectifs d’investissement. Toutes les participantes à cette formation de base font partie d’un groupe fermé alimenté par des informations continues. Des modules plus techniques ainsi que la possibilité de suivis personnalisés sont également prévus. Le programme se structure avec un cours par mois; des ateliers en présentiel de 10 personnes maximum ou en ligne. La moyenne d’âge de situe entre 35 et 55 ans.

Comment avez-vous eu l’idée et quel est l’objectif final de la formation?

Avec mes 30 ans d’expérience bancaire, je me suis rendue compte qu’il y avait énormément de lacunes auprès de la clientèle féminine; que le jargon du milieu leur était totalement incompréhensible. Il s’agira donc de les mettre en position de réussite dans la gestion de leurs placements avec un «money mindset», par la compréhension du fonctionnement de la finance, mais aussi en prenant conscience de leurs réticences et de leur relation avec l’argent. C’est un parcours initiatique où elles apprendront les étapes à suivre de manière à transformer leur approche. Le but est d’amener ces femmes à acquérir leur indépendance financière.

Vous abordez donc également les aspects psychologiques liés aux investissements?

Oui, car ils sont fondamentaux. Adolescente, je voulais devenir psychologue. A la place, j’ai débuté ma carrière dans une banque mais je fais tous les jours de la psychologie dans la relation avec les clients. L’argent est un sujet très personnel, très sensible. Et le rapport à l’argent de chacune remonte bien souvent à celui de leurs parents. Lorsque les marchés sont agités, il faut réussir à rassurer son interlocuteur. Aussi, beaucoup de facteurs psychologiques sont liés à la notion de risque, qui se constate réellement au-delà d’un certain seuil de perte. Il faut être en mesure de décrypter chacun de ces aspects psychologiques pour maintenir une relation durable avec le client.

«Les femmes sont moins impulsives et moins dans la recherche du gain à court terme que les hommes.»
Comment qualifiez-vous l’approche de gestion des femmes vis-à-vis de leurs pairs masculins?

Très clairement, les femmes se préoccupent des problématiques ESG depuis déjà très longtemps, en demandant par exemple d’exclure les entreprises d’armement des portefeuilles. Plus généralement, elles sont moins impulsives et moins dans la recherche du gain à court terme que les hommes. Ce qui convient d’ailleurs parfaitement aux stratégies à long terme qui sont les plus prospères. Elles ont tendance à se fixer des objectifs dans le temps et les catégoriser - par exemple, pour les frais d’étude des enfants ou pour l’achat d’un bien immobilier secondaire - ce qui offre une vision claire sur un horizon de temps.

Pourquoi sont-elles moins représentées dans les postes de gestion à responsabilités?

Parce que les valeurs féminines axées sur l’humain et le relationnel ne concordent pas toujours avec les objectifs commerciaux ou de rentabilité dictés par les administrateurs. Or, les hommes sont naturellement plus motivés par les résultats et la recherche de performance. Aussi, durant leur scolarité, les femmes sont également moins nombreuses dans les filières économique et mathématique.

Envisagez-vous d’autres projets?

Je prépare une seconde formation dédiée aux jeunes. Pour ressentir leurs besoins, je collabore avec deux jeunes en formation. Mon objectif est de leur apprendre à gérer les premiers salaires et à mettre en place un patrimoine, notamment en les sensibilisant à l’importance de la prévoyance retraite. Je les aide à clarifier des objectifs afin d’économiser plus facilement et d’éviter le fléau de l’endettement des jeunes. En tant que mère, j’essaie de transmettre ces notions liées à l’argent, aux risques et à la volatilité à mes deux filles âgées d’une vingtaine d’années. D’ailleurs, j’ai constaté que la jeune génération perçoit les crypto devises comme des actifs non risqués...Il y a donc beaucoup à faire pour les sensibiliser.

A lire aussi...