L’IA va révolutionner le secteur des sciences de la vie

Yves Hulmann

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Selon Pascal Mischler, CEO de Kieger, l’intelligence artificielle contribuera à réduire considérablement le nombre de tests à effectuer.

Gérant d’actif indépendant basé à Zurich, Kieger est spécialisé notamment dans les sciences de la vie, les marchés privés et les fonds multi-actifs. La société gère entre autres un fonds de placement spécialisé dans le domaine de la santé qui intègre d’emblée des critères de durabilité dans son processus de sélection. Entretien avec Pascal Mischler, directeur (CEO) de Kieger depuis le début de 2022.

Pourquoi avoir choisi de combiner durabilité et sciences de la vie et comment faites-vous le lien entre ces deux aspects chez Kieger?

Etablir un lien entre le secteur des sciences de la vie et les aspects liés à la durabilité s’est fait de façon très naturelle chez Kieger. D’une part, car ces différents aspects figuraient déjà parmi les différentes stratégies que nous avions mises en place. D’autre part, parce qu’il y avait une demande de la part de nos clients pour disposer de solutions d’investissement dédiées aux sciences de la vie qui tiennent compte des critères de durabilité. En outre, de manière plus générale, on essaie dans les sciences de la vie de trouver des solutions à différents problèmes qui ont pour but d’aider l’être humain et d’améliorer sa santé, ce qui passe aussi par la préservation de l’environnement. Il y a ainsi une convergence naturelle entre durabilité et les investissements dans le domaine de la santé.

«En investissant de manière diversifiée, le segment des biotech reste attrayant dans une perspective de long terme.»
Parmi les critères ESG, quels sont les aspects les plus importants dont il faut tenir compte lorsque l’on investit dans le secteur de la santé?

Dans notre domaine, le biais est porté davantage sur le «S», soit les critères sociaux, que sur le «E» pour l’environnement. Le secteur des sciences de la vie est par nature moins polluant en tant que domaine d’activité que certaines autres branches qui produisent beaucoup plus d’émissions de CO2. De plus, il s’agit d’un secteur où tout est déjà très encadré et très réglementé. Il y a, par exemple beaucoup de règles qui encadrent ce que l’on fait avec les médicaments usagés, etc. S’y ajoute le fait que les apports de la technologie elle-même vont contribuer à réduire la quantité de ressources nécessaires pour certains traitements. Par exemple, le dosage d’insuline est aujourd’hui réglé de manière beaucoup plus fine que par le passé grâce aux nouvelles technologies disponibles.

En parlant de technologies, il est difficile de ne pas évoquer les développements en lien avec l’intelligence artificielle (IA). Quel en sera l’impact sur le secteur de la santé?

L’IA va révolutionner le secteur des sciences de la vie, comme elle le fera aussi pour d’autres domaines. Sans l’IA, il est nécessaire dans la recherche d’analyser un très grand nombre de fragments pour ensuite évaluer lesquels sont les plus prometteurs pour une maladie donnée. Avec l’IA, beaucoup d’étapes de la recherche peuvent être effectuées de manière beaucoup plus rapide, en éliminant d’emblée un grand nombre de mauvaises pistes. Au lieu de tester un million de solutions possibles, vous vous concentrez seulement sur celles qui sont les plus prometteuses. Ainsi, l’IA apportera une contribution intéressante à la recherche en réduisant considérablement le nombre de tests à effectuer. Par ailleurs, l’IA apportera des progrès importants dans le dépistage: des systèmes basés sur l’IA parviennent à détecter beaucoup plus rapidement certaines maladies que les meilleurs médecins spécialistes de ces domaines.

Quelles thérapies ou domaines de recherche vous paraissent les plus attrayants et les plus prometteurs actuellement dans les sciences de la vie?

Il y en a évidemment plusieurs. On peut citer en particulier tous les développements en lien avec les ARN messagers, les traitements destinés à lutter contre Alzheimer tout comme ceux se rapportant à l’obésité ou au diabète, sans oublier des domaines comme la robotique et la chirurgie, y compris à distance.

«UnitedHealth est une entreprise bien gérée, avec une excellente position sur le marché, un bilan solide et des rendements élevés sur le capital investi.»

Enfin, il vaut aussi la peine de s’intéresser aux solutions qui visent à répondre aux besoins en lien avec le vieillissement de la population. En Suisse, la population âgée de plus de 85 ans devrait tripler au cours des vingt prochaines années.

Quelles entreprises seront les mieux à même de tirer parti de cette capacité d’innovation: les grands laboratoires pharmaceutiques ou les sociétés biotech?

Cela varie bien sûr en fonction des thèmes et produits. Les sociétés biotech sont davantage à même de fournir les solutions innovantes de demain car elles travaillent sur des projets encore situés en début du cycle de recherche. A cet égard, les entreprises biotech sont davantage des sociétés de croissance que les grandes pharmas. En parallèle, les sociétés biotech ont aussi davantage recours au levier et à l’emprunt. Auparavant, lorsque les taux d’intérêt étaient très bas, elles ont largement profité de cet environnement de taux très faibles. Maintenant, la logique s’est inversée depuis 2022. Cela explique aussi que les entreprises biotech ont fortement corrigé l’an dernier. Toutefois, en investissant de manière diversifiée, le segment des biotech reste attrayant dans une perspective de long terme.

«C’est cette complémentarité qui rend aussi le secteur des sciences de la vie en Suisse particulièrement attrayant.»

Si l’on prend l’exemple de la Suisse, il faut aussi souligner la qualité de l’écosystème qui s’est constitué autour des sciences de la vie dans notre pays. Outre les deux géants pharmaceutiques basés à Bâle, vous avez aussi toute une série de sociétés de techniques médicales de moyenne taille, à l’exemple de Straumann, Sonova, Tecan, Mettler Toledo ou Ypsomed à quoi s’ajoutent les différentes sociétés biotechnologiques déjà évoquées. C’est cette complémentarité qui rend aussi le secteur des sciences de la vie en Suisse particulièrement attrayant.

La première position au sein du fonds durable de Kieger dédié au secteur de la santé est UnitedHealth Group. Pouvez-vous nous dire quelques mots au sujet de cette société, pas si connue en Europe?

UnitedHealth est un assureur de référence aux Etats-Unis qui propose une variété de services à des groupes et à des particuliers aux Etats-Unis. L'entreprise est très diversifiée et propose des plans de santé HMO (Health Maintenance Organization), PPO (Preferred Provider Organization) et POS (Point of Service), Medicare, Medicaid ainsi que des options complémentaires pour les soins de la vision et les soins dentaires. Elle opère dans quatre secteurs: UnitedHealthcare, OptumRx, OptumHealth et OptumInsight. L'entreprise a déclaré un chiffre d'affaires de 324 milliards de dollars en 2022 et un flux de trésorerie disponible de 23 milliards de dollars. Avec des positions de premier plan dans les domaines environnemental, social et de la gouvernance, UnitedHealth respecte nos critères ESG. UnitedHealth est une entreprise bien gérée, avec une excellente position sur le marché, un bilan solide et des rendements élevés sur le capital investi.

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