L’appétit des institutionnels pour le risque en berne

Salima Barragan

2 minutes de lecture

Michael Metcalfe de State Street Global Markets continuera de privilégier les valeurs de croissance.

Circonspects face une reprise économique qui tarde, les investisseurs institutionnels sont moins enclins à prendre des risques, selon l’indice de confiance des investisseurs (ICI) de janvier publié par State Street, qui rétrocède 3,8 points par rapport au mois de décembre. Basé sur les transactions effectuées sur la période d’observation, l’ICI mesure l’aversion au risque du «smart money». Entretien avec Michael Metcalfe, Head of Macro Strategy chez State Street Global Markets.

Comment fonctionne l’indice de confiance des investisseurs (ICI) dont la valeur en janvier est descendue à 100,7?

Il mesure quantitativement l’appétit pour le risque en analysant les habitudes d'achats et de ventes des investisseurs institutionnels. L'indice attribue une signification précise à ses variations: plus le pourcentage d'achat d’actions est élevé, plus l'appétit pour le risque – autrement dit la confiance - est élevé. Une lecture de 100 est neutre car il s’agit du niveau auquel l’allocation aux actifs risqués ne change pas.

Comment en êtes-vous venu à le créer et fait-il parti de votre boite à outil pour ajuster votre stratégie d’allocation d’actifs?

Il existe une pléthore de mesures de confiance des agents économiques, comme les consommateurs, mais nous voulions savoir où va réellement l’argent dans les marchés financiers.

Le déclin de la confiance des investisseurs d’Amérique du Nord
contraste avec les améliorations continues en Asie.

Oui, nous l’utilisons conjointement avec l’analyse fondamentale traditionnelle. Il s’agit d’un outil en plus pour comprendre comment les attentes des investisseurs évoluent, et quelle est leur attitude vis-à-vis des actifs risqués.

Avez-vous constaté des divergences régionales dans les tendances?

Le déclin de la confiance des investisseurs d’Amérique du Nord contraste avec les améliorations continues en Asie, qui ont été soutenues par un retour plus rapide à l'expansion économique par rapport aux pays occidentaux. Pourtant, en Europe, les valeurs ont également augmenté en janvier.

Basé sur les transactions réelles, et non sur les opinions, l'indice diffère des enquêtes. Les deux types d’indicateurs sont-ils très corrélés?

Oui, parce que l’ICI capture les flux placés dans les actifs risqués. Il a été conçu pour nous donner une indication sur la confiance des investisseurs associée à de mauvais marchés ou à une conjoncture défavorable.

Pourquoi le lancement des vaccins et la perspective d'une relance plus généreuse aux États-Unis n'ont-ils pas suffi à créer un contexte favorable au risque en début d’année?

L’index avait déjà substantiellement augmenté en octobre 2020 en réponse à la résolution des élections américaines, et bien sûr, à la perspective du lancement des vaccins. Mais durant le mois de janvier, les nouvelles étaient moins positives qu’espérées: des nouvelles restrictions sociales sont tombées. La normalisation économique ne viendra ainsi pas aussi vite qu’imaginé en décembre. Et les investisseurs y répondent en diminuant leur appétit pour les actifs risqués.

Les valeurs américaines de croissance continueront de bien se comporter
cette année en raison de la normalisation qui tarde.
A votre avis, comment l’ICI évoluera-t-il durant ces prochains mois?

La toile de fond économique reste très challenging et incertaine. Même s’il y a encore beaucoup d’espoir d’une reprise, une partie substantielle des fonds des investisseurs institutionnels est placée en cash. L’argent reviendra sur les actifs risqués en fin d’année lorsque la normalisation, soutenue par les politiques fiscales, progressera. Mais d’ici là, la route sera probablement chaotique.

Pourquoi êtes-vous actuellement surpondéré sur les actions vis-à-vis des obligations?

Nous sommes constructifs parce que le plus grand moteur des marchés - qui est la croyance que les politiques déployées peuvent réussir - ne montre pas de signes de faiblesse. C’est aussi la raison pour laquelle les marchés financiers ignorent la crise. D’une certaine façon, le stimulus semble sans limite malgré les déficits abyssaux des Etats car le marché occulte également la dette colossale qui s’accumule. Si la reprise tarde beaucoup trop, elle finira par aspirer l’économie dans une spirale déflationniste  

Il y a 4 mois, vous disiez sur la chaine Bloomberg qu’il était trop tôt pour vendre les valeurs technologiques. Est-ce toujours le cas aujourd’hui?

Oui, car les valeurs américaines de croissance continueront de bien se comporter cette année en raison de la normalisation qui tarde. Je m’attends ainsi à une pause de la rotation sectorielle dans les titres value.

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