Coup dur pour le nouveau CEO Christian Sewing qui essaie de relancer la grande banque allemande. L’action chute.
Les ennuis s’accumulent pour Deutsche Bank: la filiale américaine de la banque allemande a été classée par un régulateur américain dans la liste des banques dont les vulnérabilités menacent leur survie, a indiqué jeudi à l’AFP une source proche du dossier.
Cette décision est un coup dur pour le nouveau PDG Christian Sewing, qui essaie de relancer, via une cure d’austérité et un recentrage sur l’Europe, la première banque allemande actuellement en grande difficulté.
La Federal Deposit Insurance Commission (FDIC), l’organisme de garantie des dépôts bancaires, un des principaux régulateurs financiers, a ajouté Deutsche Bank dans sa liste de «banques à problèmes» ou des institutions financières à risques, selon la source qui a requis l’anonymat.
Ces établissements présentent des faiblesses opérationnelles, financières et managériales qui les fragilisent.
Le titre Deutsche Bank a terminé à son plus bas niveau historique à la Bourse de Francfort, en plongeant de 7,15% à 9,07 euros.
La FDIC ne dévoile pas les noms des banques figurant dans cette liste, mais donne le nombre d’institutions la composant et le total de la valeur des actifs qu’elles détiennent. Ainsi fin mars, le nombre des membres est ressorti à 92 contre 95 fin décembre mais le montant de leurs actifs a augmenté de 42,5 milliards de dollars sur la période.
Cette hausse s’explique par l’ajout de Deutsche Bank, a ajouté la source. Deutsche Trust Company Americas détenait pour 42,1 milliards de dollars d’actifs au 31 mars, selon ses derniers documents boursiers.
Contactée par l’AFP, la FDIC s’est refusée à tout commentaire.
«Notre politique est que nous ne commentons pas les remarques de régulateurs», a déclaré par courriel à l’AFP une porte-parole de Deutsche Bank.
Elle a ajouté que la maison mère était «très bien capitalisée et a des réserves de liquidités importantes».
«Nous avons déjà dit que les régulateurs ont identifié différents domaines en lien avec les contrôles (...) que nous devons améliorer. Nous nous efforçons de tenter de résoudre les faiblesses identifiées dans nos opérations américaines», a-t-elle encore déclaré.
La Réserve fédérale (Fed) a de son côté rangé Deutsche Bank dans la catégorie des institutions «en difficulté», a rapporté jeudi le Wall Street Journal, une sanction rare aux conséquences lourdes. Concrètement, Deutsche Bank doit désormais consulter la Fed pour des décisions stratégiques comme le recrutement et le licenciement de hauts cadres.
Les décisions de la FDIC et de la Fed s’apparentent à un cinglant désaveu pour Deutsche Bank et compliquent un peu plus la tâche de Christian Sewing, 47 ans, en poste depuis près de deux mois seulement.
Il a déjà annoncé plus de 7’000 suppressions d’emplois dans le monde, plus particulièrement dans les activités de marché, autrefois locomotive de l’établissement allemand.
La banque va également se recentrer sur l’Europe et renoncer à concurrencer les grandes banques américaines aux Etats-Unis et espère par ailleurs tourner définitivement la page des scandales à répétition nés des excès de ses activités de marché devenues un fardeau depuis près de 4 ans.
Les régulateurs américains ont ouvert, lors des dernières années, différentes enquêtes sur Deutsche Bank, allant des soupçons de manipulations des taux d’intérêt Libor et Euribor au blanchiment d’argent sale en passant par des violations d’embargo. Certaines investigations ont été soldées par des amendes importantes.
Les cartons rouges des autorités américaines relancent en outre les interrogations sur l’avenir de Deutsche Bank à Wall Street, où les grandes institutions financières doivent étoffer leurs équipes en charge de la gestion des risques et des procédures de contrôles depuis la loi de régulation financière Dodd-Frank.
En avril, l’établissement avait par exemple reconnu avoir viré par inadvertance 28 milliards de dollars à une partie tierce dans le cadre d’une opération financière de routine, un cas sans précédent illustrant les failles informatiques et les défaillances dans les systèmes de contrôle internes.
Si l’agence de notation Moody’s a confirmé récemment la note de solvabilité financière de Deutsche Bank, elle a averti qu’elle envisageait de l’abaisser à moyen terme.
L’an dernier, le groupe a vu ses recettes baisser sensiblement et a affiché une perte nette de 735 millions d’euros. Même le début de l’année 2018 est resté médiocre, le bénéfice net au premier trimestre plongeant de près de 80% sur un an.