ANZ dernière grande banque australienne à tourner le dos au charbon

AWP

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Le groupe bancaire suit ses trois grands rivaux locaux en décidant de ne plus financer dès 2030 les mines de charbon thermique ou les centrales électriques au charbon.

La banque australienne ANZ a annoncé jeudi qu’elle allait à son tour se désengager du charbon, une décision qui devrait plomber davantage un secteur déjà confronté aux bouleversements des marchés d’exportation et à l’hostilité grandissante du public.

A compter de 2030, ANZ ne financera plus les mines de charbon thermique ou les centrales électriques au charbon, imitant ainsi les trois autres plus grandes banques australiennes qui ont déjà pris des engagements similaires.

Le charbon est depuis longtemps un pilier de l’économie du pays avec, en 2018, des exportations qui représentaient près de 50 milliards de dollars US, soit plus de 3% de son Produit intérieur brut, selon une étude de la Banque centrale australienne.

Mais malgré le soutien sans faille affiché par le gouvernement, les fondations de cette industrie semblent de plus en plus fragiles.

Elle est en effet confrontée aux engagements pris au cours des derniers mois par ses principaux clients, notamment la Chine, le Japon et la Corée du Sud, d’atteindre la neutralité carbone d’ici 2050. Soit une réduction probable de leur dépendance aux combustibles fossiles, en particulier au charbon, constituant près de la moitié des émissions mondiales de dioxyde de carbone.

Quant aux Australiens, ils affichent de plus en plus leurs réticences vis-à-vis de cette filière, après les feux de brousse sans précédent qui ont dévasté le pays et une sécheresse prolongée. Ainsi, selon un sondage publié cette semaine par The Australia Institute, quatre Australiens sur cinq se disent préoccupés par le changement climatique et seulement 12% soutiennent le projet du Premier ministre conservateur Scott Morrison d’un plan de reprise économique post-COVID s’appuyant sur le gaz.

Le gouvernement de M. Morrison tarde à mettre en place des mesures de lutte contre le changement climatique, évitant tout engagement à la neutralité carbone et promettant de continuer à soutenir les combustibles fossiles, notamment en donnant le feu vert à de nouvelles mines de charbon, malgré l’opposition de l’opinion publique.

Le gouvernement contre les «éco-guerriers»

ANZ a estimé jeudi être bien placée pour contribuer au recul des émissions de carbone.

«Nous sommes dans une position unique, grâce à nos décisions de prêt, pour soutenir les clients et les projets qui réduisent les émissions tout en soutenant la croissance économique», a déclaré la banque jeudi. «C’est pourquoi nous avons annoncé des changements importants à notre politique carbone, en soutenant la transition vers une économie à zéro émission d’ici 2050».

Cette décision a été très mal accueillie par le gouvernement. Le ministre des Ressources Keith Pitt a appelé ANZ à «se concentrer sur les prêts immobiliers, pas sur l’activisme» et à ne pas jouer les «éco-guerriers».

Le ministre de l’Agriculture David Littleproud a lui jugé que les banques «ne devraient pas interférer avec les marchés» et a brandi la menace de révoquer les garanties de dépôt du gouvernement qui protègent l’épargne des clients.

De son côté, l’industrie du charbon prédit que malgré les objectifs de bilan carbone affichés en Asie, la demande y restera forte au cours des dix prochaines années, en particulier en Inde et au Vietnam. Le Minerals Council of Australia, un puissant groupe de pression, estime que le secteur pourrait même contribuer à ces objectifs par des technologies plus propres.

Ces technologies, telles que le captage du carbone, «seront essentielles pour aider les pays à poursuivre leur développement économique dans le futur tout en réduisant les émissions», a déclaré sa directrice générale Tania Constable, dans un communiqué.

Outre son virage anti-charbon, ANZ a annoncé jeudi que son bénéfice après impôt pour son exercice annuel clôt au 30 septembre avait chuté de 40% à 3,58 milliards de dollars australiens (2,52 milliards de dollars US) après avoir mis de côté des milliards pour couvrir les prêts qui ne seront probablement pas remboursés en raison de la crise économique résultant de la pandémie de COVID-19.

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