Un dilemme qui s’aggrave

Thomas Hempell, Generali Investments

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De nouveaux obstacles apparaissent pour l’euro et le dollar américain avant que la croissance ne reprenne dans le courant de l’année.

 

L’été a révélé une toile de fond macroéconomique mondiale de plus en plus disparate et difficile. La bonne tenue des données américaines suscite des inquiétudes quant à la persistance de taux d’intérêt élevés aux Etats-Unis. La Chine s’enfonce dans les incertitudes en matière d’immobilier et de croissance. Enfin, la zone euro est confrontée à un dilemme politique de plus en plus complexe, la persistance de l’inflation contrastant avec l’augmentation des risques de récession.

Les risques de récession dans la zone euro ont augmenté

Le dilemme politique de la Banque Centrale Européenne (BCE) se fait particulièrement sentir. La forte croissance des salaires dans la zone euro laisse présager des pressions persistantes sur les prix dans les services, où la main-d’œuvre représente une part importante du coût des intrants. Après avoir trop longtemps ignoré les dépassements de l’inflation post-pandémique, la BCE sera soucieuse de ne pas s’inquiéter prématurément de l’inflation. Mais les indicateurs d’activité se dégradent, les récents indices PMI, Ifo et ESI sont tous inférieurs aux attentes déjà modérées et indiquent une contraction au troisième trimestre, ce qui suscite des inquiétudes quant à une récession.

Étant donné que l’essentiel des hausses de taux passées ont été répercutées sur l’économie et que l’inflation de base s’est ralentie, les «colombes» de la BCE auront davantage d’arguments en faveur d’une absence de hausse en septembre afin d’assimiler davantage de données. Une pause dans le cycle de la BCE le 14 septembre semble désormais un peu plus probable, tout comme pour la Fed le 20 septembre.

Les marges seront soumises à la pression des coûts salariaux plus élevés, ce qui épuisera l’épargne excédentaire des consommateurs.

Cette situation, ainsi qu’une nouvelle faiblesse des données économiques, laisse présager une baisse modérée des rendements. Toutefois, le maintien d’un biais en faveur du resserrement monétaire dans la communication prévisionnelle de la Fed et de la BCE (qui n’exclut pas de nouvelles hausses et rejette les espoirs d’un pivot précoce) est susceptible d’empêcher un rallye obligataire plus important.

Il faut s’attendre à de nouvelles difficultés pour les actifs les plus risqués. Notamment les actions et les obligations High Yield, tandis que le crédit Investment Grade, plus sûr, pourrait se renforcer et bénéficier d’un portage attrayant. Les risques de récession dans la zone euro ont augmenté. La reprise des revenus réels pourrait contribuer à stabiliser l’activité plus tard dans l’année. Mais une nouvelle détérioration des perspectives mondiales et la répercussion d’un resserrement monétaire rapide pourraient maintenir la zone euro dans l’étau encore longtemps. En Chine, la fin prématurée du rebond de réouverture et les problèmes croissants dans le secteur de l’immobilier risquent d’ébranler davantage la confiance et la croissance, ce qui nuira également aux perspectives des exportateurs européens.

Les pressions sur les marges sont un fardeau

Cela n’augure rien de bon pour les perspectives de bénéfices, en particulier dans la zone euro, car les marges seront soumises à la pression des coûts salariaux plus élevés, ce qui épuisera l’épargne excédentaire des consommateurs et ralentira la demande globale. Les valorisations des actions restent également tendues. Le ratio cours/bénéfice de l’indice S&P500 oscille autour d’un niveau similaire à celui d’avril 2022. A l’époque, les rendements réels des obligations américaines à 10 ans étaient proches de zéro, alors qu’à la fin du mois d’août, ils avoisinaient les 2%. Enfin, le positionnement des investisseurs en matière de risque semble également optimiste. Le regain d’optimisme par rapport aux niveaux déprimés observés lors de la crise bancaire de mars a été à l’origine d’une grande partie de la hausse des actions au début de l’été, mais s’est transformé récemment en un léger frein. L’essoufflement de la croissance dans la zone euro, la prévision d’une récession plus légère aux Etats-Unis et un pivot attendu plus tard de la part de la Fed créeront d’autres obstacles à l’euro et au dollar américain avant que la croissance ne reprenne dans le courant de l’année.

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