Repenser l’obligataire

Ritu Vohora, T. Rowe Price

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La forte hausse des rendements obligataires mondiaux depuis le début de 2022 a renforcé l'attrait envers cette classe d’actifs. Est-il trop tard pour s’y intéresser?

Après une décennie de conditions monétaires ultra-accommodantes qui ont réduit les rendements et l'efficacité des obligations pour diversifier les portefeuilles, les arguments en faveur des actifs obligataires semblent être irréfutables. La hausse des taux d'intérêt a augmenté les revenus qu'ils offrent, avec des rendements dans de nombreux secteurs atteignant des sommets depuis plusieurs années.

Toutefois, la hausse des rendements obligataires intervient alors que l'économie mondiale montre des signes de faiblesse.

Les sondages sur l'industrie manufacturière dans le monde s’orientent vers la récession, tandis que les services perdent de leur élan alors que les consommateurs ressentent les effets retardés des politiques monétaires restrictives des grandes banques centrales. Même la reprise économique tant attendue de la Chine, après la crise du COVID 19, s'est essoufflée.

De plus, les banques centrales risquent de commettre des erreurs de politique en cherchant à maîtriser l'inflation, leurs politiques monétaires restrictives menaçant de plonger leurs économies en récession. Le retrait des liquidités du système financier mondial, qui a amené bon nombre de turbulences dans les fonds de pension britanniques et les banques régionales américaines, pourrait révéler des structures de dette fragiles et des effets de levier cachés.

Trouver refuge sur les bons bateaux

Si les nuages de la tempête s’accumulent, tous les bateaux ne couleront pas, ceux bien équilibrés pouvant servir de refuge aux investisseurs. Il est essentiel de se concentrer sur la sélection de titres.

Que l’économie ralentisse ou non, les obligations s'affirment à nouveau comme une source de diversification dans les portefeuilles.

Les obligations mondiales à haut rendement offrent la possibilité de générer de la valeur dans des eaux agitées, étant donné leurs fondamentaux solides. Les valorisations se sont considérablement améliorées, les structures de capital sont solides et la classe d'actifs est de meilleure qualité qu’auparavant. De nombreuses entreprises se sont refinancées durant la pandémie et ont obtenu des financements à faible coût, de sorte que les bilans sont sains.  Même si les défauts augmenteront certainement, il est peu probable qu'ils atteignent les niveaux de la crise financière. La sélection des titres sera essentielle, mais en choisissant le bon bateau, vous pouvez obtenir de bons rendements.

La dette émergente semble également intéressante, étant donné la prime de croissance par rapport aux économies développées, associée à des rendements attractifs et des devises sous-évaluées. La banque centrale du Brésil, par exemple, a relevé ses taux pour la première fois en mars 2021, bien avant la Fed, et a procédé à plus de dix augmentations pour porter le taux Selic à 13,75%. Certains pays sont désormais prêts à réduire leurs taux, alors que les banques centrales des pays développés, comme la Banque d'Angleterre, doivent procéder à de nouvelles hausses de taux pour lutter contre une inflation persistante.

Si la hausse des coûts d'emprunt mondiaux pourrait nuire à certains marchés frontières tributaires de prêts en devises étrangères, les marchés émergents sont plus résistants que par le passé, grâce à des bilans sains et à de solides réserves budgétaires. L'Inde et l'Indonésie se distinguent par leur respect strict des cadres monétaires et budgétaires, tout en bénéficiant respectivement de la consommation intérieure et de la transition vers les énergies vertes.

Source de diversification

Que l’économie ralentisse ou non, les obligations s'affirment à nouveau comme une source de diversification dans les portefeuilles. Pour ceux qui sont peu enclins à prendre des risques sur les actions, les obligations à haut rendement semblent bon marché par rapport aux actions et ont une duration plus courte que les obligations classiques. Notre équipe d'allocation d'actifs surpondère le crédit - tant pour les obligations à haut rendement que pour la dette des marchés émergents.

La divergence des cycles de politique monétaire offre un terrain propice aux investisseurs obligataires actifs. Adopter une approche globale offre des opportunités sur les marchés présentant des courbes plus pentues et des pentes positives.

Les rendements des obligations à plus longue échéance resteront, selon nous, sous pression, car les marchés obligataires tentent d'absorber des émissions en hausse dans un contexte de resserrement monétaire. L'impact de la hausse persistante des taux d'intérêt pèsera sur la croissance économique. Dans ce contexte, nous privilégions une réduction de la duration et préférons les obligations de haute qualité (investment grade) comme couverture du risque. Dans le contexte actuel, la liquidité est reine, car elle offre une marge de manœuvre à mesure que des opportunités se présentent.

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