Multi-Asset Solutions de J.P. Morgan Asset Management

Michael Hood, J.P. Morgan Asset Management

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Au cours de ces derniers mois, la différenciation entre les économies a été très discrète en comparaison du choc commun auquel elles ont toutes été confrontées.

SYNTHèSE
  • Nous anticipons une accentuation de la différenciation, concomitante à la poursuite du rebond économique, après le choc commun massif qui a provoqué une synchronisation de la récession mondiale et du début de la reprise.
  • Nous identifions plusieurs axes pour cette évolution, incluant la maîtrise locale du contrôle de l’épidémie, la capacité à tirer parti de l’évolution des tendances de la demande mondiale et la pérennité du soutien politique.
  • L’Europe du Nord et l’Asie du Nord obtiennent actuellement de relativement bons résultats dans ces domaines, encore queles évaluations sur les données épidémiques soient sujettes à des évolutions rapides.
  • Cette différenciation possible renforce notre intérêt pour les marchés d’actions de la zone euro et ceux des pays émergents, exposés au cycle.
DU CHOC COMMUN A LA DIFFÉRENCIATION INTERNATIONALE

Au cours de ces derniers mois, la différenciation entre les économies a été très discrète en comparaison du choc commun auquel elles ont toutes été confrontées. La Chine et ses proches voisins ont commencé à traverser la crise du coronavirus un mois ou deux avant le reste du monde et, par conséquent, ces économies sont en avance dans la dynamique du processus récession/reprise. Les économies des marchés développés (DM) se sont cependant, presque universellement, effondrées en mars et avril, ont subi un trou d’air vers la fin du mois d’avril et ont ensuite commencé rapidement à reprendre de la vigueur en mai et juin. Les restrictions de déplacement, qui pendant un certain temps ont semblé similaires dans l’univers des marchés développés et qui ont été assouplies en respectant des calendriers dans l’ensemble proches, ont eu une incidence déterminante sur ce schéma.

Maintenant que la phase initiale très rapide de la nouvelle expansion impulsée par la normalisation est désormais globalement derrière nous, nous prévoyons une accentuation du contraste entre les économies développées, se matérialisant au cours du second semestre de cette année et particulièrement en 2021. Pour le moment, nous identifions trois axes possibles de différenciation entre les pays: leur réussite dans le contrôle local de l’épidémie, leur capacité à tirer parti des changements de modèles de la demande mondiale et la pérennité du soutien politique. A l’inverse de ce que l’on aurait pu attendre en entrant dans la crise, les Etats-Unis ne semblent pas se démarquer sur ces instruments de mesure, alors que la zone euro, particulièrement ses pays du nord, semblent particulièrement bien placés.

Pour autant, les différences dans la composition des marchés d’actions signifient que ces trois évaluations pourraient ne pas dresser clairement la carte des préférences en matière d’allocation d’actifs.

Le niveau de maîtrise de l’épidémie par les pays au sein de leurs frontières affectera les économies à la fois par les restrictions contraignantes pesant sur l’activité et par leur influence sur les comportements personnels, en particulier la volonté de s’engager dans une activité présentielle, concernant principalement le secteur des services. A vrai dire, nous estimons que les dirigeants politiques essayeront d’éviter les mesures de confinement généralisées qui ont caractérisé les mois de mars et avril, et opteront à la place pour des mesures plus localisées et des paliers intermédiaires (comme l’obligation du port du masque). Les zones de forte propagation devraient connaître cependant des expansions moins fortes même en l’absence de confinement formel, les comportements s’adaptant.

Nous prévoyons que les évaluations dans ce domaine vont fluctuer, du fait de l’imprévisibilité du virus, et probablement des évolutions soudaines du flux des nouvelles informations. Par exemple, l’Australie, qui apparaissait comme une brillante réussite dans le contrôle de l’épidémie il y a quelques semaines, a subi une forte progression des cas de contamination qui l’a conduit à imposer des restrictions de déplacement à Melbourne.

Pour le moment, nous continuons à considérer que ce pays se comporte relativement bien dans le contrôle de l’épidémie, de même que la zone euro et le Japon. Les Etats-Unis semblent moins efficaces en ce domaine, le Canada et le Royaume-Uni occupant pour leur part une position intermédiaire. Nous constatons également une différenciation au sein des économies émergentes, l’Asie du Nord étant relativement en bonne forme, ce qui est moins le cas de l’Asie du Sud et de l’Amérique Latine.

Si nous ne pouvons pas encore bien comprendre dans quelles directions le monde pourrait évoluer en réaction au choc du virus, certains changements intervenus dans les modèles de la demande mondiale sont devenus apparents. Une nouvelle impulsion en faveur de l’adoption des technologies, en partie lié aux initiatives du télé-travail, a soutenu les exportations de l’Asie du Nord, en particulier celles de Taiwan. Les Etats-Unis pourraient bénéficier dans une certaine mesure de cette évolution, du fait de leurs fortes positions dans la propriété intellectuelle technologique.

A l’inverse, si le cours du pétrole a rebondi au cours de ces deux derniers mois, il reste inférieur à son niveau antérieur au choc, frappant ainsi les producteurs à coûts élevés du Canada, de l’Europe émergente, du Moyen-Orient et de l’Afrique. De même, les économies relativement dépendantes du tourisme et de l’hôtellerie devraient continuer à subir une attrition de leurs revenus, y compris la partie sud de la zone euro, le sud-est asiatique et dans une certaine mesure l’Australie (avec le risque supplémentaire dans son cas d’une réduction du flux de l’immigration).

Finalement si toutes les économies ont bénéficié du soutien des politiques monétaires et budgétaires pendant la crise, des questions se posent désormais sur la pérennité de cette aide. Les banques centrales, pour leur part, semblent déterminées à maintenir un positionnement accommodant dans un futur prévisible. Si la vague initiale de désinflation en réaction au choc se dissipe, nous ne décelons qu’une faible probabilité d’accélération de l’inflation prochainement, permettant la persistance de taux d’intérêt directeurs proches de zéro. Les inquiétudes persistantes sur le fonctionnement du marché encourageront également la poursuite des achats d’actifs.

Sur le plan budgétaire cependant, des préférences et des capacités différentes commencent à émerger. Alors que les États-Unis ont fourni une impulsion budgétaire agressive au début de la crise, l’élansemble désormais s’éloigner d’un nouveau soutien de grande ampleur. Nous prévoyons le vote parle Congrès d’un autre dispositif vers la fin du mois de juillet ou début août, qui comprend une extension partielle des allocations de chômage complémentaires, une aide pour les Etats et les gouvernements locaux ainsi que les dépenses de santé. La sortie du positionnement accommodant devrait se réaliser progressivement.

Pour autant, nous prévoyons un risque de baisse pour cette anticipation de nouvelles aides aux Etats-Unis et, sur la base des plans actuels, la politique budgétaire pourrait représenter un frein à la croissance en 2021. A l’inverse, en zone euro, où la politique budgétaire a répondu jusqu’à présent plus modérément au choc, nous prévoyons un potentiel pour une assistance accrue en 2021, particulièrement si le fonds de relance mutualisé proposé, financé par un emprunt au niveau régional, est approuvé. Nous anticipons aussi un soutien d’envergure, bien que modéré en regard des normes historiques, de la politique budgétaire en Chine où les dirigeants politiques présentent une forte sensibilité aux conditions locales du marché de l’emploi.

En considérant ces axes possibles de différenciation économique, nous admettons qu’ils pourraient ne pas interagir directement avec les décisions d’allocation d’actifs.

D’une part, comme relevé, les évaluations de la maîtrise de l’épidémies ont sujet tes à des évolutions rapides et importantes. Déjà au cours des premiers mois de la crise, le Japon semblait par exemple capable d’éviter de sévères répercussions, avant d’évoluer brutalement vers un confinement national qui, à son tour, a été levé plus rapidement qu’attendu. Pour sa part, la zone euro n’avait rien d’une success story dans sa gestion de l’épidémie pas plus tard que mi-avril. Un processus d’allocation d’actifs tactique concentré sur la captation de tendances persistantes ne peut pas baser toutes ses décisions sur un facteur comme celui-ci. Deplus, les marchés d’actions individuels pourraient ne pas offrir d’expositions qui profitent ou qui souffrent des tendances de l’économie domestique ou du virus — comme le démontrent les grandes capitalisations américaines (U.S.) apparaissant comme les vainqueurs des perturbations engendrées par le virus.

Enfin, pour ce qui concerne les marchés obligataires, du fait de l’uniformité d’orientation des politiques monétaires et de la nature à évolution lente de l’inflation, des différences même importantes de perspectives de croissance à court terme devraient entraîner des implications limitées sur les décisions relative - value parmi les obligations d’Etat.

IMPLICATIONS POUR LES CLASSES D’ACTIFS

En se fondant sur notre analyse selon laquelle l’économie mondiale enregistre un rebond de début de cycle puissant et synchronisé après sa profonde récession, nous avons favorisé les surpondérations sur les marchés d’actions européens et émergents. Tous deux présentent habituellement une forte cyclicité et une capacité à tirer parti de la croissance manufacturière mondiale. Les facteurs locaux d’une différenciation possible renforcent cette opinion, étant donné qu’ils apparaissent actuellement comme un soutien pour les économies de la zone euro et de l’Asie du Nord qui dominent l’indice EM Equity. En même temps, nous recommandons de considérer les actions des petites capitalisations U.S. et les obligations d’entreprises high yield comme un bloc unifié: ils présentent des expositions économiques similaires et une sensibilité commune aux risques de baisse associés à la performance relativement médiocre des Etats-Unis dans le contrôle de l’épidémie, ainsi qu’au risque de resserrement prématuré de la politique budgétaire de ce pays.

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