Le point sur les marchés des dettes subordonnées – Février 2024

Paul Gurzal & Jérémie Boudinet, La Française AM

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Les AT1 poursuivent leur chemin comme si de rien n'était, avec un marché primaire actif, et des remboursements d’AT1 à la première date de call.

Environnement de marché

Dans l’ensemble, les marchés des dettes subordonnées ont été plutôt calmes ce mois-ci. Les AT1 poursuivent leur chemin comme si de rien n'était, avec un marché primaire actif, et des remboursements d’AT1 à la première date de call. En effet, de nombreuses banques sont venues sur le marché primaire. On note parmi eux le retour de grands mastodontes comme UBS, BNP Paribas, ING Groep ou encore Standard Chartered mais aussi Swedbank ou la petite banque danoise Jyske Bank. Du côté des Tier 2, la tendance est la même avec des émissions d’émetteurs «core» qui attirent les investisseurs malgré des primes qui se réduisent. Par ailleurs, les banques exercent leurs rachats à la première date de call. BBVA a annoncé le call de son AT1 d’1 milliard d’euros (ES0813211010), Danske Bank a annoncé le call de son AT1 de 750 millions de dollars - à noter que l'obligation n'a pas été refinancée (XS1586367945), ING Groep a annoncé le call de son AT1 de 1,25 milliard de dollars, refinancé dernièrement (XS1956051145). Du côté des dettes hybrides, nous notons un primaire de la part d’Enel (900 millions d’euros à 4,75%). Par ailleurs, les performances sont en légère baisse sur toutes les classes d’actifs depuis début février, avec une remontée de la performance, en milieu de mois, pour les AT1 en EUR et USD.

Deux banques sont en difficulté et pourraient, selon nous, faire l’objet d’une résolution.

La première banque concernée est New York Community Bancorp (NYCB), une banque régionale américaine avec un actif de 116 milliards de dollars (à fin 2023). NYCB a considérablement réduit ses dividendes pour augmenter son capital, afin de répondre à des exigences plus strictes, après l'acquisition de Signature Bank. En outre, elle a pris des provisions contre d'éventuelles tensions dans son portefeuille immobilier multifamilial et de bureaux. De plus, NYCB a identifié des faiblesses importantes dans les contrôles internes liés au processus d'examen des prêts. NYCB a également pris rétroactivement une charge de dépréciation du goodwill de 2,4 milliards de dollars, annoncé un nouveau PDG ainsi qu’un retard de sa publication annuelle (10-K). Sur le mois, Moody's a abaissé la note de NYCB de Baa3 à B3, qui reste sous surveillance en vue d'une nouvelle dégradation. A notre avis, la banque pourrait bientôt ne plus être viable et pourrait éventuellement être placée en résolution.

La deuxième banque qui retient l'attention des investisseurs est Deutsche Pfandbriefbank (PBB), une banque allemande axée sur le financement de l'immobilier commercial (principalement des bureaux) en Europe et aux Etats-Unis. PBB a été placée sous le feu des projecteurs lorsque les risques de NYBC ont fait surface avec les expositions à l’immobilier commercial, et ont commencé à effrayer les investisseurs. La réaction des investisseurs ne s’est pas fait attendre. Depuis début février, le cours de l'action a chuté de 31% et la capitalisation boursière n'est plus que de 500 millions d’euros. Du côté des obligations, le risque de résolution est très important et est déjà pris en compte par le marché. L'AT1 (PBBGR 8,474% PERP - XS1808862657) a perdu 40 points depuis début février. Même son de cloche pour les Tier 2. Par exemple, PBBGR 4,679% 28/06/2027 (XS1637926137) a également perdu 40 points. La banque a tenté de rassurer les investisseurs en publiant deux communiqués en pré-annonçant leurs résultats de l’année 2023. Malgré une première réaction positive, les obligations ont effacé leurs premiers gains, les investisseurs restant sceptiques quant au montant des provisions nécessaires. Les niveaux de provisions semblent plafonnés par la capacité bénéficiaire de la banque. Le principal risque reste, selon nous, celui de la liquidité/du financement. En effet, la banque est très dépendante des financements de marché, notamment via les covered, et les marchés ne lui font plus confiance. Heureusement, PBB dispose principalement de dépôts à terme, ce qui lui permet d'évite un «bank run» à court terme. Selon nous, cela ne suffira peut-être pas à la survie de la banque. Une autre banque allemande ayant un modèle économique similaire pourrait également être en danger: Aareal Bank. Le risque est le même, même si elle a été moins mise en avant ces dernières semaines mais pourrait être les prochaines. Les résultats d’Aareal étaient correctes malgré une hausse considérable des provisions pour pertes sur prêts et une hausse du ratio NPL, en augmentation de 4,9% (+0,7pt en glissement trimestriel), tirée par la partie américaine.

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