Infrastructures: pourquoi, où et comment investir?

James Mazeau, UBS Global Wealth Management

3 minutes de lecture

Le scénario de base de la Recherche d’UBS pour le second semestre prévoit une baisse de l’inflation et le maintien des taux d’intérêt à un niveau élevé. Point de situation.

Une politique monétaire plus stricte pendant une plus longue période conduira probablement à un ralentissement progressif de l’activité des marchés développés, la croissance du PIB américain devant évoluer autour de zéro au début de 2024. A première vue, cette combinaison à court terme peut ne pas sembler favorable à des investissements importants de la part des entreprises.

Toutefois, les gouvernements et les entreprises devront certainement investir dans les infrastructures. Les buts: moderniser le parc ancien et stimuler la productivité à long terme, mais aussi aligner la stratégie commerciale sur les pressions géopolitiques par le biais de la délocalisation à proximité et soutenir des objectifs ambitieux de décarbonisation ou de neutralité carbone.

Le soutien des pouvoirs publics

Selon la Banque asiatique de développement, l’Asie émergente doit, par exemple, entre 2016 et 2030, investir chaque année 1700 milliards de dollars dans les infrastructures pour rester compétitive. Entre 2021 et 2030, on prévoit environ 40 à 50 mille milliards de dollars d’investissements dans la transition énergétique mondiale pour soutenir les efforts de neutralité carbone.

D’une manière encourageante, on constate que des politiques telles que la loi américaine sur la réduction de l’inflation et le plan industriel Green Deal de l’Union européenne témoignent du soutien continu des pouvoirs publics aux infrastructures.

Dès lors, comment investir? Réponse en trois points.

1. Les investisseurs peuvent rechercher des opportunités à court terme dans les actions industrielles mondiales

La préférence de la Recherche d’UBS va aux actions industrielles mondiales. La composition du secteur est devenue de plus en plus diversifiée et elle ne se comporte plus comme une approche cyclique traditionnelle. Ces titres devraient donc afficher une bonne performance, malgré une combinaison plus difficile de croissance et de politique au second semestre.

Le secteur devrait en effet bénéficier des incitations gouvernementales concernant la transition énergétique, la décarbonisation et l’amélioration de l’efficacité énergétique. Il devrait également profiter de l’augmentation des dépenses de défense après deux décennies de sous-investissement de la plupart des Etats membres de l’OTAN en Europe. En outre ces industries devraient bénéficier de l’augmentation des dépenses d’investissement dans les secteurs minier, pétrolier et gazier, pour rattraper les retards accumulés sur plusieurs années.

La relocalisation des économies à faibles coûts vers celles à coûts élevés pourrait favoriser l’utilisation accrue de l’automatisation et de la robotique.

Une amélioration des bénéfices semble également probable à mesure que les carnets de commandes sont résorbés, que les perspectives de production s’améliorent et que la visibilité des bénéfices augmente.

Les valorisations sont également favorables. En date du 24 juillet, l’indice MSCI AC World Industrials évoluait à un ratio cours/bénéfice à terme de 17,4, soit une prime de 5% par rapport à sa moyenne sur dix ans.

Bien qu’il reste supérieur à un multiple de 16,3 par rapport au marché élargi, le segment des valeurs industrielles semble relativement attractif par rapport aux valorisations élevées des technologies de l’information – un autre secteur à croissance séculaire qui se négocie à un multiple de 25,7 (MSCI AC World Information Technology), soit une prime de 36% par rapport à la moyenne sur dix ans.

2. Les investisseurs thématiques peuvent trouver des opportunités à plus long terme dans l’automatisation, dans la robotique et dans les technologies vertes

La relocalisation des économies à faibles coûts vers celles à coûts élevés pourrait favoriser l’utilisation accrue de l’automatisation et de la robotique, ainsi que la tendance vers une digitalisation de la production «sans contact». Cela pourrait augmenter la proportion des revenus des logiciels qui ont une marge élevée et atténuer le caractère cyclique du thème, car les investissements dans l’automatisation se généralisent à tous les secteurs.

L’accroissement de l’efficacité des processus de production est également un facteur clé de la fabrication écologique, qui contribue à réduire les émissions de CO2 du secteur. La Recherche d’UBS estime que le marché global de l’automatisation et de la robotique va croître de 269 milliards de dollars en 2022 à 334 milliards en 2024.

Un esprit positif est également de mise en ce qui concerne les opportunités dans les technologies vertes mondiales. Les progrès définitifs en matière de réduction des émissions de CO2 à un niveau mondial devront se concentrer sur les infrastructures de production d’électricité, de transport et d’industrie, telles que les systèmes de chauffage ou de refroidissement.

On peut également s’attendre à voir des avancées technologiques et un passage généralisé aux véhicules électrifiés à l’échelle mondiale (tels des véhicules électriques à batterie et des véhicules électriques hybrides rechargeables). De telles ventes pourraient se monter à une part de marché de 30% dans le monde en 2025, puis de 60 à 70% en 2030.

On décèle enfin des opportunités dans les technologies habilitantes telles que les énergies renouvelables, les transports, les batteries, l’hydrogène, la digitalisation et l’efficacité énergétique.

3. L’infrastructure du marché privé est en phase avec les projets pluriannuels et elle peut diversifier et favoriser les plans financiers

Les actifs en lien avec l’infrastructure fonctionnent souvent sur la base de contrats à long terme car ils peuvent nécessiter une longue période de temps pour se développer. Bien que les activités de levée de fonds aient ralenti dans un environnement de taux élevé, les 100 milliards de dollars levés l’année dernière sont en ligne avec la moyenne sur 2018-2020 (sur la base des données de Pitchbook).

Les barrières d’entrée élevées et le positionnement en monopole de nombreux actifs d’infrastructure tendent à les rendre moins sensibles aux cycles économiques, fournissant potentiellement une diversification du portefeuille dans un contexte de perspectives incertaines.

L’exposition à cette classe d’actifs peut aider les investisseurs à équilibrer leurs plans de dépenses à long terme avec des actifs de durée similaire, en particulier dans le cadre d’un plan financier pour la retraite et au-delà.

En outre, ils peuvent contribuer à stabiliser le revenu généré par un portefeuille multi-classes d’actifs, en particulier en tenant compte de l’inflation à long terme. Depuis 2003, les infrastructures ont généralement affiché les meilleures performances lorsque l’inflation mondiale était élevée (sur la base des données de l’indice Cambridge Associates Infrastructure).

Une exposition directe ou indirecte

Les investisseurs peuvent obtenir une exposition directe ou indirecte aux infrastructures. Pour les investisseurs individuels, l’exposition directe aux flux de trésorerie des actifs de services aux collectivités, de communication ou de transport peut être obtenue par le biais d’instruments du marché privé.

La Recherche d’UBS affiche sa préférence pour les actifs liés à la connectivité digitale (réseaux 5G et fibre, stockage de données) et à la transition énergétique (énergies renouvelables, stockage et transport).

Les risques du marché privé

Toutefois, les investisseurs doivent comprendre les risques inhérents aux marchés privés. Ceux-ci comportent notamment le manque de liquidité, les périodes de rétention plus longues, l’effet de levier, les risques de concentration, ainsi qu’un contrôle et une transparence limités des positions sous-jacentes.

Les risques ne pouvant être complètement éliminés, il est néanmoins possible de les atténuer via une due diligence accrue et une sélection rigoureuse du gestionnaire, ainsi qu’en diversifiant les années de référence, les stratégies et les zones géographiques.

Les allocations aux marchés privés devraient être par-dessus tout en ligne avec les objectifs financiers particuliers de l’investisseur, faire partie d’un portefeuille bien diversifié et être régulièrement réexaminées en fonction de l’évolution de la situation personnelle et des circonstances du marché.

A lire aussi...