La BNS devrait poursuivre sa lutte contre l’inflation

AWP

2 minutes de lecture

Le chemin à parcourir pour atteindre la stabilité des prix est encore long, a averti Eric Scheidegger, chef de la direction de la politique économique du Seco.

La Banque nationale suisse devrait poursuivre jeudi prochain son tour de vis monétaire, face à une inflation affichant des signes d’accalmie mais qui reste toujours solidement ancrée. Dans ce contexte, les prévisions conjoncturelles de la BNS seront scrutées de près.

La semaine qui vient de s’écouler aura été mouvementée sur le front de la politique monétaire. La Réserve fédérale américaine (Fed) a ainsi marqué une pause mercredi avec la hausse des taux directeurs, après dix relèvements d’affilée qui les ont fait grimper de cinq points de pourcentage jusqu’à la fourchette de 5,00-5,25%.

La Banque centrale européenne (BCE) a par contre poursuivi jeudi sa lutte contre l’inflation, avec une huitième hausse en moins d’un an d’un quart de point de pourcentage.

En Suisse, la BNS a augmenté en mars son taux directeur de 50 points de base pour le porter à 1,5% - son quatrième resserrement monétaire depuis juin 2022. La banque centrale helvétique avait alors averti qu’elle «n’exclut pas que d’autres relèvements de taux soient nécessaires pour assurer la stabilité des prix».

Le chemin à parcourir pour atteindre la stabilité des prix est en effet encore long, a averti jeudi Eric Scheidegger, chef de la direction de la politique économique du Secrétariat d’Etat à l’économie (Seco). L’inflation pourrait encore être portée par le manque de main d’oeuvre et d’éventuelles hausses des salaires qui souffleraient sur les braises de l’accélération des prix.

L’inflation a ralenti en mai à 2,2% sur un an, après 2,6% en avril. Mais si les prix reculent sous l’effet d’une baisse des tarifs de l’énergie (-16,5% pour les produits pétroliers), le taux d’inflation n’a pas encore atteint la fourchette de 0% à 2% visée par la Banque nationale suisse (BNS) et qu’elle assimile à la stabilité des prix.

«Le renchérissement est toujours présent et reste une préoccupation», notamment au niveau de l’inflation de base - soit ajustée des prix de l’énergie et des produits frais - qui reste «tenace», selon Eric Scheidegger. Cette dernière est principalement portée par les prix de l’alimentaire et des services, notamment dans la restauration et l’hôtellerie, les loisirs et le logement. En mai, cet indicateur se situait à 1,9% sur un an, après 2,2% en avril.

Dans un contexte mondial d’accalmie des prix et de ralentissement économique, les projections de la BNS seront regardées de près. En mars, elle tablait encore sur une hausse des prix de 2,6% cette année et de 2,0% la suivante, ainsi que sur un produit intérieur brut en progression «d’environ» 1%.

Les analystes interrogés par l’agence AWP tablent sur une relèvement de 25 points de base du taux directeur par la BNS jeudi prochain. «Les principales raisons sont à mettre sur le décélération de l’inflation (l’inflation sous-jacente est passée sous les 2%) et de la croissance», les derniers indicateurs économiques étant clairement mauvais, a estimé John Plassard, spécialiste en investissements à la banque Mirabaud.

Pour Daniel Varela, directeur des investissements de Piguet Galland, «une hausse plus importante de 0,5% n’est plus justifiée alors que l’inflation se modère en direction du seuil de 2%». «Thomas Jordan a été clair (..), la BNS souhaite voir l’inflation passer sous ce seuil, ce qui justifie encore un léger tour de vis», a-t-il ajouté. Il est par ailleurs rare qu’une banque centrale passe d’une hausse de 0,5 point de pourcentage à une pause, une coupe plus faible de 0,25 point est «généralement un passage quasi obligé».

Attention aux réunions de septembre et décembre

Face à ces perspectives, les investisseurs portent leur regard vers les prochaines réunions de la BNS en septembre et décembre.

«L’incertitude principale est de savoir si la Fed et la BCE vont continuer à augmenter leurs taux en juillet. Ce scénario serait plutôt confortable pour la BNS, qui pourrait alors aussi augmenter ses taux en septembre» à nouveau de 25 points de base, a estimé Arthur Jurus, directeur des investissements chez Oddo BHF. La présidente de la BCE, Christine Lagarde, a d’ailleurs dévoilé jeudi qu’une autre hausse de taux était «très probable» dans un mois.

John Plassard anticipe quant à lui, après la prochaine annonce de la BNS, une pause jusqu’à la fin de l’année.

«En raison d’effets de base puissants ainsi qu’une désinflation qui s’accélère en amont de la chaîne de transmission des prix, notamment sur les cours des matières premières, la probabilité est grande de voir l’inflation suisse tomber sous le seuil de 2% d’ici la prochaine réunion de septembre, auquel cas une pause se justifiera», a abondé Daniel Varela.

Mais l’inflation pourrait à nouveau flamber en septembre au-dessus de 2%, revigorée par la hausse des loyers, «reportant la fin du resserrement monétaire», a averti Arthur Jurus. Les prix devraient ensuite refluer à partir du 4e trimestre et se situer tout juste autour de 2% en fin d’année. M. Plassard, plus prudent, s’attend à ce que les 2% devraient être atteint l’année prochaine.

A lire aussi...