La Banque du Japon plie mais ne rompt pas l’assouplissement monétaire

AWP

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En raison des très grandes incertitudes qui pèsent sur les économies et les marchés financiers, il est approprié pour la Banque d’accroître la flexibilité de son contrôle de la courbe des rendements obligataires japonais à dix ans.

La Banque du Japon (BoJ) a annoncé mardi un nouvel assouplissement de son contrôle des rendements obligataires sans cependant renoncer à son cap monétaire ultra-accommodant, un entre-deux qui a provoqué une chute du yen face au dollar.

En raison des «très grandes incertitudes qui pèsent sur les économies et les marchés financiers», il est «approprié pour la Banque d’accroître la flexibilité» de son contrôle de la courbe des rendements obligataires japonais à dix ans, a expliqué l’institution.

Qualifiant désormais son plafond précédent de 1% comme une simple «référence», elle a évoqué les «effets secondaires considérables» que pourrait entraîner le maintien d’une telle limite, mais tout en promettant de poursuivre «patiemment son assouplissement monétaire» pour soutenir l’économie japonaise.

La BoJ avait déjà fait deux pas de loup sur la voie de la normalisation monétaire ces derniers mois, fixant en juillet ce plafond de 1% aux rendements des obligations publiques japonaises (JGB) à dix ans.

Leur progression s’était cependant accentuée ces dernières semaines sur fond de flambée des rendements du Trésor américain à dix ans, jusqu’à frôler la limite fixée par la BoJ: mardi matin, ils ont dépassé les 0,95%, un nouveau plus haut depuis 2013, avant de redescendre à 0,94% à la fin des échanges.

Cette tendance avait obligé la BoJ à muscler ses rachats déjà massifs d’obligations japonaises, alourdissant davantage son bilan déjà démesuré et accentuant encore les distorsions du marché obligataire nippon.

Le yen dans les abysses

Le changement annoncé mardi «s’explique d’abord par le fait que nos estimations sur l’évolution des prix ont été revues à la hausse, et ensuite - et peut-être surtout - par le fait que les rendements américains ont augmenté de manière substantielle, au point d’affecter les taux au Japon», a expliqué le gouverneur de la BoJ Kazuo Ueda lors d’une conférence de presse.

Mardi, la Banque centrale a retiré de son communiqué la mention habituelle de ses «opérations de rachats quotidiens», sans préciser jusqu’où elle tolérerait la montée des rendements.

Elle a cependant maintenu inchangé le taux négatif (-0,1%) qu’elle applique depuis 2016 sur les dépôts des banques chez elle dans le but de les inciter à prêter davantage aux entreprises et aux ménages.

«Même si l’issue de la réunion monétaire est moins +hawkish+ (en faveur du resserrement monétaire, NDLR) que ne le pensait une partie du marché, le signal est que la BoJ est proche d’un changement de politique», a commenté Stephen Innes dans une note de SPI Asset Management.

Mais alors que la monnaie japonaise avait rebondi dans la nuit à la publication de rumeurs sur un possible infléchissement du contrôle de la BoJ, le yen a de nouveau chuté après l’annonce officielle, et le dollar s’échangeait pour 150,35 yens vers 08H30 GMT.

Cela «suggère que les traders ne voient pas l’écart entre les rendements américains et japonais se réduire de sitôt», a commenté Taro Kimura de Bloomberg Economics.

La BoJ insatisfaite de l’inflation

La BoJ, dont le mandat principal est de garantir la stabilité des prix en maintenant l’inflation autour de 2%, a par ailleurs relevé mardi ses prévisions dans ce domaine, estimant cependant que la hausse des prix est principalement due à la répercussion de celle des coûts d’importation et des cours du pétrole, et à l’allègement des subventions du gouvernement japonais sur les factures d’énergie.

L’inflation dans l’archipel est constamment au-delà des 2% depuis un an et demi, mais la BoJ estime que celle-ci n’est pas tirée par la demande et accompagnée d’une croissance des salaires, qui alimenterait à son tour la consommation.

«Nous ne sommes pas encore dans une situation où nous pouvons prévoir avec suffisamment de certitude la réalisation stable de l’objectif de stabilité des prix», a assuré M. Ueda.

La Banque centrale table sur une augmentation des prix à la consommation hors produits frais de 2,8% sur l’exercice 2023/24 qui se terminera fin mars prochain, contre 2,5% lors de sa dernière estimation en juillet, puis de 2,8% en 2024/25 et 1,7% en 2025/26.

La BoJ a aussi rehaussé sa prévision de croissance du PIB (Produit intérieur brut) nippon en 2023/24 à 2%, contre 1,3% précédemment, mais l’a abaissée à 1% pour 2024/25, la voyant stable à 1% en 2025/26.

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