Condamné en Suisse, Gunvor concède deux tiers de milliard de dollars aux USA

AWP

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Pour sa responsabilité pénale en lien avec des actes de corruption en Equateur, le groupe genevois devra verser près de 87 millions de francs et 661 millions de dollars.

Le Ministère public de la Confédération (MPC) condamne Gunvor pour sa responsabilité pénale en lien avec des actes de corruption en Equateur. L’entreprise genevoise devra payer un montant de près de 86,7 millions de francs, dont 4,3 millions d’amende. La société de la rue du Rhône a parallèlement été contrainte de régler plus de 661 millions de dollars (582 millions de francs au cours du jour) à l’issue d’une procédure de «plaider coupable» aux Etats-Unis dans le même dossier.

En se basant sur des documents judiciaires provenant d’une enquête menée par les autorités américaines, le MPC a ouvert en juin 2021 une instruction pénale contre inconnu, indique-t-il vendredi soir dans un communiqué. La procédure a été ouverte pour des soupçons de corruption d’agents publics étrangers, notamment équatoriens.

Dans ce cadre, le MPC a procédé à diverses mesures d’instruction et a obtenu l’entraide judiciaire des Etats-Unis. En janvier 2023, l’instruction pénale a été étendue à Gunvor.

Au terme de la procédure, la société genevoise a finalement été reconnue pénalement responsable de corruption active d’agents publics étrangers. Elle n’a pas fait opposition à l’ordonnance, qui est donc entrée en force.

L’ordonnance pénale du MPC s’inscrit dans le cadre d’une issue coordonnée avec les autorités américaines, qui ont conclu en parallèle un accord avec Gunvor portant sur les mêmes faits. Cet accord a été approuvé vendredi par un tribunal de New York et contraint Gunvor à une amende de 374,5 millions en plus du remboursement de 287,1 millions en gains mal acquis. «La peine inclut des crédits pouvant représenter jusqu’à un quart des montants concédés par Gunvor pour résoudre les enquêtes menées par les autorités helvétiques et équatoriennes sur les mêmes fautes, pour autant que le réglement soit effectué d’ici un an au plus tard», précise le DoJ dans un communiqué vendredi,

Le directeur général (CEO) de Gunvor, Torbjonr Torniquist reconnait dans une prise de position des erreurs commises à l’époque et s’en excuse au nom de la compagnie. Le patron assure que la corruption ne sera «jamais plus tolérée» par la société.

La société doute en outre que les peines prononcées dépasse nettement les provisions constituées par le groupe pour la résolution de ces affaires.

Processus insuffisants

L’instruction conduite par le MPC a permis d’établir qu’au moins entre février 2013 et février 2017, des paiements corruptifs de près de 7,5 millions de dollars (6,6 millions de francs au taux actuel) ont été effectués en faveur d’un agent public équatorien occupant une fonction dirigeante auprès de la société pétrolière étatique Petroecuador.

Ces paiements ont notamment été effectués avec le concours d’un ancien employé du groupe Gunvor ainsi que de deux intermédiaires ayant agi à travers une société offshore. Tous trois ont plaidé coupable aux Etats-Unis.

Selon le MPC, ces paiements, dont une partie a transité par la place financière suisse, ont directement profité à Gunvor. Ils ont en effet permis que Petroecuador adjuge des contrats pétroliers à deux sociétés avec lesquelles le groupe genevois avait conclu des contrats connexes.

Le MPC constate ainsi que l’analyse des risques, les mesures et processus de lutte contre la corruption en vigueur au sein du groupe Gunvor dans les années concernées, ainsi que leur mise en œuvre, ont été «manifestement insuffisants pour empêcher la réalisation des risques de corruption importants inhérents à ses activités dans le secteur pétrolier avec une société étatique en Equateur».

Collaboration de l’entreprise

L’amende de 4,3 millions de francs prend en considération la collaboration de l’entreprise à l’avancement de l’enquête, note le MPC. Ce dernier relève également que certaines mesures mises en œuvre par l’entreprise, quoique tardivement, l’ont conduite à mettre un terme à la relation avec les intermédiaires.

Le restant de la somme à payer, soit 82,3 millions de francs, équivaut à une créance compensatrice, correspondant à une partie des profits réalisés par Gunvor grâce aux contrats entachés de corruption, explique le MPC. Les profits visés par cette mesure ont été établis d’entente entre les autorités suisses et américaines.

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