Evergrande, une restructuration en questions

AWP

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L’ex-numéro un national de l’immobilier est lesté par une dette de 260 milliards d’euros (271 milliards de francs), mais Pékin n’a toujours pas annoncé s’il volerait à son secours.

Le promoteur chinois Evergrande semble voué à une restructuration après avoir été incapable de rembourser un emprunt, un défaut de paiement qui risque de plomber l’économie du pays.

L’ex-numéro un national de l’immobilier est lesté par une dette de 260 milliards d’euros (271 milliards de francs), mais Pékin n’a toujours pas annoncé s’il volerait à son secours.

Voici les formes que pourrait prendre une restructuration du groupe pour ses clients, ses créanciers et ses investisseurs:

Qui aura la priorité?

Incapable de payer certains fournisseurs, Evergrande ne parvient pas à achever les logements qu’il a promis à ses clients. Plusieurs centaines ont manifesté en septembre dernier devant le siège du groupe à Shenzhen (sud).

Craignant par dessus tout l’agitation sociale, le régime communiste devrait faire en sorte de donner la priorité aux acheteurs, puis aux fournisseurs, afin d’achever les projets déjà en route, suppose Mark Williams, du cabinet Capital Economics.

«Ensuite, ce sera le tour des créanciers, des banques, des porteurs d’obligations», prévoit-il. «C’est là qu’il risque d’y avoir de la bagarre pour se partager les restes».

Les porteurs d’obligations à l’étranger risquent d’arriver en bas de la liste des priorités, selon M. Williams.

Y aura-t-il un plan de sauvetage?

Rien ne le laisse présager. Pékin tient à rester fidèle à sa ligne visant coûte que coûte à dégonfler la bulle immobilière, estime l’analyste Larry Ong, du cabinet SinoInsider.

Jeudi, le gouverneur de la banque centrale, Yi Gang, a laissé entendre que le sort du groupe serait laissé aux lois du marché.

Les autorités de régulation «se satisferont de voir Evergrande faire faillite et les investisseurs boire la tasse», estime Louis Kuijs, du cabinet Oxford Economics.

Pékin semble écarter le risque d’une catastrophe qui atteindrait l’ensemble du système financier.

«Les dirigeants chinois doivent se dire qu’après tout les banques qui ont prêté à Evergrande sont publiques et qu’elles peuvent survivre à leurs pertes», pense M. Williams.

Quel type de restructuration?

Les autorités pourraient laisser Evergrande continuer son activité principale, l’immobilier, mais pousser le groupe à céder ses autres actifs, suppose l’économiste Shujin Chen, de la banque d’affaires américaine Jefferies.

Les sommes récoltées seraient alors réparties entre les créanciers en fonction de leur priorité sur le plan légal, prévient-elle.

Ces dernières années, Evergrande a réalisé une multitude d’investissements, parfois hasardeux, dans des secteurs aussi divers que le tourisme, la santé ou encore la voiture électrique.

Pékin, via ses entreprises publiques, pourrait se saisir de ces différentes filiales et en confier la restructuration aux gouvernements locaux, estime M. Ong.

Les détenteurs d’obligations, quant à eux, risquent de porter l’affaire devant les tribunaux.

Quelle méthode?

Laisser sombrer le paquebot Evergrande sans générer trop de vagues: tel est le délicat exercice auquel sont confrontés les régulateurs.

Selon M. Kuijs, Pékin pourrait quelque peu desserrer sa politique et laisser les promoteurs lever davantage de fonds sur les marchés, afin d’amortir le choc d’une faillite d’Evergrande.

D’après M. Ong, l’Etat pourrait aussi forcer le patron d’Evergrande, le milliardaire Xu Jiayin, à vendre des actifs afin de payer une partie des dettes du groupe.

Y a-t-il des précédents?

Oui et non. Ces dernières années, la Chine a bien restructuré plusieurs conglomérats privés lourdement endettés.

Pour ce faire, Pékin les a placés directement sous sa tutelle.

C’est le cas de l’assureur Anbang, de la société d’investissements Tomorrow Group et sa banque Baoshang, ainsi que du géant du tourisme et de l’aviation HNA, qui ont été confrontés à d’importantes difficultés financières.

Mais la méthode risque de ne pas fonctionner pour Evergrande, compte tenu de la complexité du groupe, prévient Larry Ong.

«Il n’y a pas de précédent comparable».

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