«Plus de deux mille combinaisons de prix en une minute»

Levi-Sergio Mutemba

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Nadia Gouné explique comment IVM Markets introduit l’IA dans les phases pre-trade des émissions de produits structurés.


Il n’est pas possible de mémoriser les banques à appeler pour savoir quel panier de titres sous-jacents est le plus approprié pour un produit structuré. Il n’est pas possible d’appréhender les centaines de milliers de données entourant un secteur ou une thématique, voire un simple titre, avec les seules capacités humaines. Et tenter de gagner du temps en se passant d’analyser une foule de données réduit nécessairement le potentiel d’alpha pour le client final. De plus, l’émission de produits structurés est monopolisée par quelques grandes banques d’investissement. Basée à Genève, Nadia Gouné, advisor au sein de la société américaine IVM Markets, explique comment l’IA s’est introduite dans la phase pre-trade du processus d’émission de produits structurés.

Comment l’IA s’est-elle emparée de l’industrie des produits structurés?

Lorsque j’ai commencé ma carrière chez BNP Paribas il y a environ vingt ans, la question de la profitabilité et de la qualité de service étaient déjà présente. Les outils ont d’abord été déployés aux équipes front-office (profitabilité), puis adaptés pour les clients eux-mêmes (service). Le problème était que l’ensemble des banques d’investissement disposaient de plateformes émetteurs, ce qui posait le problème du choix pour le client parmi une vingtaine de plateformes d’émissions différentes.

De là sont nées les plateformes multi-émetteurs, afin de réunir toutes les offres en un seul site, facilitant ainsi le processus de recherche des prix pour les clients. Jusque-là, la technologie se focalise ainsi principalement sur les techniques de pricing, puis aux appels d’offre. Voilà pour la première génération des nouvelles technologies.

La seconde génération s’est focalisée sur le cycle de vie des produits. À savoir tout ce qui permets au client de réaliser un suivi détaillé de l’évolution du produit structuré au sein du portefeuille. Ainsi, les deux premières générations de technologies se sont focalisées sur le trading et les opérations post-trade. Mais nous n’avions rien au niveau pre-trade, c’est-à-dire la phase correspondant à la génération d’idées d’investissement. Ce que fait précisément IVM grâce à une technologie propriétaire.

«Si vous êtes un conseiller au sein d’une banque privée ou un courtier, votre capacité de pricing et d’autonomie est limitée.»

Générer des idées d’investissement... N’est-ce pas là justement la phase la plus créatrice du processus d’émission de produits structurés?

C’est en effet la plus créatrice et la plus intellectuelle. C’est également la phase la plus complexe et la plus consommatrice de temps, d’autant plus complexe et laborieux que vous n’êtes pas nécessairement un banquier d’investissement. Si vous êtes responsable de la structuration au sein d’une banque d’investissement émettrice de produits structurés, vous avez accès à tous les outils de pricing et de trading de cette banque émettrice.

En revanche, si vous êtes un conseiller au sein d’une banque privée ou un courtier, votre capacité de pricing et d’autonomie est limitée, dans la mesure où vous dépendez des banques d’investissement. Tout l’intérêt d’IVM est d’être en mesure d’offrir à aux gestionnaires de fortune, aux conseillers en investissement et aux courtiers toute l’autonomie de pricing et la liberté de générer de meilleures idées d’investissement.

Dans quelle mesure créer des idées d’investissement peut-il s’avérer complexe?

Un produit structuré est très complexe. Au sein d’une même thématique, vous trouverez de nombreux univers d’actions, au sein desquels il faut trouver le meilleur titre sous-jacent pour tel produit. Mais telle action peut ne pas être pertinente pour un autre produit. Il faut en outre tenir compte d’une foule de paramètres de marché présentant des milliers de combinaisons possibles que le cerveau humain ne peut pas traiter. Par exemple, IVM est capable de générer en une minute plus de deux milles combinaisons de prix.

De plus, le système ne se limite pas à créer des idées d’investissement. Après lui avoir soumis vos critères en termes de thématiques, de rendements et de risque, il cherchera la combinaison optimale entre l’actif sous-jacent et le produit. Mais IVM peut également générer la thématique elle-même sous-tendant l’idée d’investissement. Vous pouvez par exemple demander à l’outil de vous indiquer quelles sont les secteurs qui bénéficieront de l’élection de Donald Trump. L’outil va ainsi non seulement générer l’ensemble des titres concernés mais également les logiques d’investissement utilisant ces titres.

«La finance durable est le segment qui aura probablement le plus besoin de l’intelligence artificielle.»

Où les gains de temps sont-ils les plus conséquents pour les clients utilisant la plateforme intelligente d’IVM?

Il y a un gain de temps considérable au niveau de l’analyse des rapports de recherche des banques sur les titres et les secteurs. Typiquement, lorsque je travaillais au sein d’une maison de courtage, j’avais à analyser une vingtaine de rapports d’analystes des banques chaque semaine. Grâce à l’IA, c’est le système qui lit ces papiers de recherche pour vous, qui identifie les thèmes et qui vous accompagne durant tout le processus de génération d’idées. Et en plus de générer les titres sous-jacents adéquats, l’IA va également générer des critères d’investissement, tels que la perte maximale possible ou «draw-down», la volatilité, mais également des informations qualitatives telles que la réputation d’un titre dans les médias et la presse.

Évaluer la réputation d’un titre, voilà qui présenterait un intérêt particulier dans le cadre de la thématique ESG…

La finance durable est le segment qui aura probablement le plus besoin de l’intelligence artificielle. Il faut en effet passer son temps à lire tout ce qui existe sur chaque entreprise. L’outil est non seulement capable de le faire, mais le pricer intégré à l’outil, qui est un pricer propriétaire, recalibre les prix des émetteurs via l’IA. Ce qui signifie que vous n’allez pas chercher les prix des banques, mais le système va les formuler lui-même, garantissant ainsi une total indépendance de l’outil en termes de pricing, ce qui est fondamentale pour les conseillers en investissement et les courtiers, par exemple.

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