Les perspectives de croissance pour les médias de publicité extérieure (Out of Home, OOH) restent prometteuses. En particulier pour le leader du marché suisse: APG SGA, dont NZZ est désormais un actionnaire de référence avec 25%. APG SGA, présent également en Serbie (moins de 5% des ventes), a enregistré un chiffre d’affaires de 325,6 millions de francs en 2023 et emploie 550 personnes. Sa valeur boursière avoisine 580 millions de francs. L’action affiche un gain d’environ 6% cette année. Entretien avec son CEO, Markus Ehrle.
La prise d’une participation de 25% par le groupe NZZ dans APG SGA à un prix de 220 francs par action aura-t-elle pour conséquence une stratégie multi-canale à l’instar de TX Group, sous le toit Goldbach, avec Neo et Clear Channel?
Ça n’est pas prévu, car une telle approche, cross-media, conduit à une complexité et à une dilution. Cette espèce de cross-selling n’est pas la plus efficace à notre avis. Regardez, à ce sujet, ce qui s’est passé dans le secteur financier avec la bancassurance. Cela n’a pas vraiment marché, sauf exception.
Cela n’a pas fonctionné chez Publigroupe, Admeira et, maintenant, qu’insuffisamment, selon toute vraisemblance, chez Goldbach (TX Group) où Tamedia et 20 Minutes travailleront de nouveau avec leur propre force commerciale dès 2025.
«Notre portefeuille d’offres a pu être encore étoffé sur le marché des partenaires, en particulier avec le centre commercial Glatt, ainsi qu’avec Jungfraubahnen Management AG «Top of Europe» et Zermatt Bergbahnen.»
Un rachat complet d’APG SGA par NZZ n’est donc pas prévu…
Vous devez le demander à NZZ. De fait, APG SGA dispose aujourd’hui d’un actionnariat plus équilibré avec NZZ, JCDecaux (une part de 16,4%) et le Groupe Frère, soit la Compagnie Nationale à Portefeuille à travers Pargesa Asset Management (13,9%). C’est positif pour APG SGA, qui demeure autonome, renforce son ADN suisse et peut ainsi se concentrer pleinement sur le coeur de ses affaires: la publicité extérieure.
Pourtant JCDecaux n’excluait pas l’acquisition complète d’APG SGA par une autre entreprise…
En février dernier, nos deux actionnaires principaux de longue date, JCDecaux et Pargesa Asset Management SA, nous avaient informé qu’ils avaient conclu un accord visant une potentielle cession coordonnée de leurs positions dans APG SGA. Dans ce contexte, le conseil d’administration d’APG SGA avait décidé d’entamer un processus visant à trouver un acquéreur potentiel pour l’ensemble de la société et respectant les intérêts des différentes parties prenantes. Ce processus pouvait ou non conduire à une transaction impliquant APG SGA et/ou à une cession des actions détenues par les deux principaux actionnaires.
Si un repreneur avait acquis plus de 33 1/3% des actions APG SGA, une offre aurait dû être faite à l’ensemble des actionnaires au même prix, ce qui aurait alors pu conduire à une reprise complète de l’entreprise. Une telle possibilité eût été le rachat par une firme de private equity, en fonction du schéma d’une plus grande efficience, de coûts plus bas, d’une stimulation de la croissance, d’une hausse du résultat d’exploitation avant amortissements, intérêts et impôts (Ebitda) et d’un multiple de valorisation plus élevé.
Cependant, APG SGA réalise déjà beaucoup sur le plan des coûts, de l’efficience et de la croissance. Un autre avantage est que nous exploitons un portefeuille avec 7000 contrats et partenariats ainsi qu’une répartition entre les espaces publicitaires sur le domaine privé et public, qui sont sont équilibrés.
Quelle est aujourd’hui la part du marché suisse d’APG SGA?
Elle dépasse 60%. Le rachat de Clear Channel Suisse par TX Group signifie qu’il y a aujourd’hui deux gros concurrents qui couvrent l’ensemble des services et produits (analogiques et numériques) de la publicité extérieure sur le marché suisse. D’autres plus gros concurrents sont La Poste à travers Livesystems, qui est uniquement active dans la publicité digitale extérieure (DOOH), et ESH Médias (groupe Hersant).
Quelle est la situation actuelle du marché suisse de la publicité extérieure?
Après le trou causé par la Covid-19, il y a eu un retour à la normale en ce qui nous concerne. Et ce malgré un climat de consommation qui reste morose. Cependant, il faut distinguer selon les segments de clientèle. Les secteurs du commerce de détail, des télécoms et de l’automobile, en particulier, sont plutôt maussades. Contrairement à des branches telles que les loisirs, l’alimentation et la finance.
D’autre part, notre portefeuille d’offres a pu être encore étoffé sur le marché des partenaires, en particulier avec le centre commercial Glatt, qui a le chiffre d’affaires le plus élevé de Suisse dans son domaine, ainsi qu’avec Jungfraubahnen Management AG «Top of Europe» et Zermatt Bergbahnen.
Sans oublier la concession à nouveau octroyée par la ville de Zurich (VBZ) des affiches lumineuses premium, sur la place de la Gare, depuis août dernier. En outre, nous attendons la décision de la ville de Genève concernant l’adjudication de ses espaces publicitaires analogiques, qu’APG SGA pourrait de nouveau remporter après de nombreuses années.
Le cash-flow d’exploitation s’est établi à plus de 30 millions de francs en 2023. Il était également en hausse au 1er semestre 2024. Est-ce durable et cela laisse-t-il présager un free cash-flow ou cash-flow disponible annuel d’au moins 20 millions dans un environnement normal?
C’est possible, mais la situation géopolitique et économique reste volatile. C’est pourquoi rien n’est garanti, sans perdre de vue les aspirations de certains milieux à vouloir supprimer la publicité par affichage. Mais je suis optimiste à cet égard.
Une certitude: notre capacité bénéficiaire et notre situation financière demeurent robustes. APG SGA n’a pas de dettes financières. Nous allons continuer à innover et à renforcer notre position concurrentielle.
Avec la capacité de continuer à verser un dividende attractif?
Une politique favorable aux actionnaires devrait se poursuivre en la matière.
Visez-vous comme Goldbach une marge d’exploitation (Ebit) de 12% à 14% dans la publicité extérieure?
Nous ne donnons pas de «guidance» à cet égard, mais nous tenons pour très ambitieux les objectifs annoncés par notre concurrent, même si les normes comptables ne sont pas tout à fait comparables.
Une étude de PwC estime à plus de 500 millions de francs les revenus publicitaires dans votre secteur sur le marché suisse en 2026. Le potentiel de croissance n’est pas épuisé…
Nous tablons, pour notre part, sur une croissance annuelle de 2% à 3%. Grâce à la publicité extérieure digitale, au développement systématique du portefeuille de prestations numériques et à l’extension ciblée des solutions de données et de technologies publicitaires. APG SGA va, par ailleurs, maintenir sa rigueur en matière de prix, productivité, coûts et capital.
La publicité extérieure et la communication numérique sont des médias de croissance, alors que la TV/vidéo et la presse s’inscrivent en recul, s’agissant des revenus publicitaires. L’OOH et le DOOH se révèlent incontournables face à la fragmentation des médias.
La croissance du digital ne s’effectue-t-elle pas au détriment de l’affichage extérieur analogique…
Non, il n’y a qu’une cannibalisation ponctuelle. Le digital croît, au moyen des écrans, des données et de la programmatique (ndlr: l’automatisation des campagnes de communication), tandis que l’affichage traditionnel s’avère stable. La programmatique, en particulier, permet de gagner des nouveaux budgets du marché online et/ou TV, grâce à de la précision, rapidité et flexibilité.