MiCA: les règles sur les cryptos enfin promulguées dans l’UE

Nicolette de Joncaire

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Pas de surprise: le nouveau règlement européen sur les cryptoactifs impose un passporting pour exercer dans l’Union. Les remarques de Biba Homsy. 

Approuvé par le Parlement Européen lors d’une session plénière la semaine dernière, le règlement MiCA vise à établir un cadre réglementaire harmonisé pour les crypto-actifs, et les professionnels interagissant avec ses actifs, tels que les émetteurs ou les prestataires de services en matière de crypto-actifs au sein de l’Union européenne. Selon ses auteurs, «son objectif est de protéger les consommateurs de certains risques associés aux monnaies et produits crypto et de les aider à éviter les systèmes frauduleux»1. Toutefois, ces derniers affirment vouloir «éviter tout chevauchement avec la législation actualisée en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux, qui couvre désormais également les cryptoactifs».

En vertu du nouveau règlement, les prestataires de services en matière de cryptoactifs auront besoin d'une autorisation pour exercer leurs activités au sein de l’Union Européenne.  

La mise en application de ce règlement devrait être imminente.

Un peu d’histoire et quelques définitions

«Face au développement croissant des crypto-actifs ces dernières années et dans un souci de protection des investisseurs locaux, la plupart des pays européens ont rapidement mis en place des régimes d'autorisation ou d'enregistrement pour les prestataires de services en crypto-actifs afin de lutter contre le blanchiment d'argent et le financement du terrorisme» explique Biba Homsy, associée fondatrice de Homsy Legal.

«Cependant, compte tenu de l'ampleur de ce développement et du caractère extraterritorial inhérent aux crypto-actifs, il est rapidement apparu évident qu'un règlement européen était nécessaire. Les travaux ont débuté en 2019.»

MiCA a déjà subi de nombreuses modifications et des notes interprétatives supplémentaires de la part de l'ESMA sont à prévoir.

Et, effectivement, il s’agit bien d’un règlement et non d’une directive. L'Union européenne a considéré qu’il était important de ne laisser aucune marge de manœuvre à l'interprétation locale des Etats Membres. Un seul texte pour tous les pays de l'Union européenne sans interprétation locale.

Afin d’éviter les redondances avec d’autres textes majeurs en matière de marchés financiers (MiFiD, Prospectus, etx.), «MiCA énumère avec soin les réglementations hors de son champ d’application, telle que les instruments financiers ou les dépôts. Par conséquent, si le crypto-actif démontre toutes les caractéristiques d’un instrument financier (par. ex. une action ou une obligation), MiCA ne s’appliquera pas. Il n’en demeure pas moins, qu’il convient de prouver que le token ou le crypto-actif est ou n’est pas un instrument financier, en effectuant une analyse légale préalable.» précise Biba Homsy. «Cependant, il peut être souvent difficile de définir avec certitude les limites, car un crypto-actif peut revêtir de nombreuses caractéristiques, ce qui en fait un élément si intéressant».

Pour cette raison, MiCA détaille avec précision les actifs faisant l’objet de son application tel que les définitions de ce qu’est un cryptoactif. Mais surtout MiCA définit quels sont les activités des prestataires de service qui doivent être enregistrés et autorisés (telle que la conservation, l’administration de crypto-actifs, l’exploitation de plateforme, la gestion de portefeuille etc.).

À ce jour, tous les prestataires de services en crypto-actifs sont dans l'attente de la publication du texte, prévue pour ce mois de juin prochain, en vue d'une entrée en vigueur dans les 12 mois suivants pour les stablecoins, et dans les 18 mois pour le reste du texte.

Cependant, compte tenu de la complexité et de l'évolution rapide de l'univers crypto, les versions de MiCA élaborées depuis 2019 sont désormais obsolètes. En effet, MiCA a déjà subi de nombreuses modifications et des notes interprétatives supplémentaires de la part de l'ESMA sont à prévoir.

Comparaisons avec la Suisse

Avec une interprétation pionnière (2018), «la Suisse a adopté une approche plus neutre vis-à-vis des technologies et des actifs numériques, en se concentrant plutôt sur l'application de principes généraux plutôt que sur une législation spécifique aux actifs numériques. Cela permet une plus grande flexibilité et un pragmatisme dans l'application des règles réglementaires». Typiquement, la loi sur les établissements financiers ne fait pas de distinction entre actifs traditionnels et crypto-actifs. C’est l’usage de l’actif qui définit les règles auxquelles on doit obéir et non sa nature.

«Il n’y a pas non plus en Suisse de distinction entre activités traditionnelles et non traditionnelles: un gestionnaire de fortune en matière de crypto-actifs reste un gestionnaire de fortune, soumis aux mêmes règles que les autres» résume l’experte. Il n’existe donc pas de registre spécifique ni d’autorisation ad hoc aux crypto-actifs.

La législation n’a pas été créée de toute pièce comme MiCA, seuls certains points bloquants ont été adapté par le législateur. L’interprétation donnée par la FINMA en 2018 reste toujours applicable.

Points à relever

Le règlement MiCA impose un passporting pour exercer dans l’Union Européenne que les acteurs suisses ne pourront obtenir qu’en déployant des activités sur sol européen … tout comme c’est déjà le cas pour les autres activités financières.  

Reste encore à savoir quel Etat imposera sa compétence dans l’UE – comme le Luxembourg l’a fait pour les fonds de placement. Les paris restent ouverts.