Economiesuisse veut une signature rapide de l’accord-cadre

AWP

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Le titre de l’initiative de l’UDC est inoffensif et trompeur, critique Monika Rühl, présidente de la direction. Il est en totale inadéquation avec le contenu.

Le Conseil fédéral doit signer l’accord-cadre cette année encore, demande mardi la faîtière de l’économie, economiesuisse, lors de sa conférence de presse annuelle. La place économique suisse est sous pression, notamment à cause de l’initiative de limitation de l’UDC.

Cette initiative sonne le glas de la voie bilatérale. Mais les relations stables sont indispensables, estime economiesuisse. Le vote du 17 mai est le plus important de l’année. Et la faîtière s’est dite prête à mener une campagne de votation intense.

Le titre de l’initiative est inoffensif et trompeur, critique Monika Rühl, présidente de la direction. Il est en totale inadéquation avec le contenu. Le texte prévoit que le Conseil fédéral disposera d’un an pour négocier l’abolition de la libre circulation des personnes avec l’UE et de 30 jours après ce délai pour résilier l’accord, si nécessaire.

Impossible exploit

Pour Mme Rühl, «c’est du pur bluff et les auteurs de l’initiative le savent parfaitement. Ils nous font miroiter que le Conseil fédéral réussira cet exploit.» Mais dans la réalité, le gouvernement n’aura pas d’autre choix que de résilier l’accord de libre circulation au plus tard en juin 2021. Et cela déclenchera la «clause guillotine».

En effet, l’ensemble des bilatérales I est lié à cet accord. Et le Brexit a montré que la participation au marché intérieur européen est indissociable de la libre circulation, a averti Mme Rühl. L’UE n’a rien cédé au Royaume-Uni au cours des trois dernières années.

De plus, les accords bilatéraux sont une solution sur mesure et il a fallu plusieurs années de négociations pour y parvenir. «Aucun accord d’accès au marché de cette ampleur n’a jamais été négocié en si peu de temps», prévient Mme Rühl. De plus, l’UDC ne propose pas d’alternative.

Un «oui» à l’initiative de limitation aurait un impact considérable sur la croissance économique du pays. «Nous ne pourrons pas simplement et rapidement envoyer nos exportations vers d’autres pays», affirme Heinz Karrer, président d’economiesuisse. Il est irréaliste de penser remplacer notre principal partenaire économique en intensifiant les échanges avec les Etats-Unis ou la Chine.

Le 17 mai, les Suisses devront donc choisir entre les accords bilatéraux ou un contrôle centralisé de l’immigration. L’un exclu l’autre, souligne Mme Kühl.

Impasse

La Suisse doit continuer à jouer un rôle pionnier dans la recherche, le développement durable, la protection du climat ou la numérisation. Les réformes ne doivent pas prendre de retard. Cela mettrait en péril la compétitivité helvétique.

Et le président de l’organisation de rappeler que l’impasse dans laquelle se trouve l’accord-cadre créer une grande incertitude pour les entreprises. La technologie médicale est le premier secteur industriel à en ressentir les conséquences négatives.

La branche perdra l’accès au marché intérieur de l’UE si l’accord sur la reconnaissance mutuelle en matière d’évaluation de la conformité n’est pas actualisé d’ici fin mai 2020. Les fabricants devront adapter leur gamme selon les exigences des pays tiers. Ce changement est long et coûteux, a averti M. Karrer.

Les entreprises doivent déjà prendre des décisions qui vont à l’encontre des intérêts de la recherche et de l’emploi, regrette economiesuisse. Certaines ont déjà annoncé des délocalisations d’emplois à l’étranger.

Le domaine de la recherche subit aussi l’incertitude. La disparition des accords bilatéraux aurait un effet négatif sur les PME qui obtiennent des subventions dans le cadre des programmes de recherche européens.

Près de la moitié des projets auxquels la Suisse participe consistent en des coopérations entre des hautes écoles et des entreprises. Dans 62% des cas, les PME ont pu créer de nouveaux emplois grâce à ces projets.

Beaucoup de défis pour l’économie suisse
Le vote sur l’initiative dite de limitation de l’UDC n’est pas le seul défi auquel devra faire face l’économie helvétique cette année. Climat, multinationales responsables ou encore 5G attendent les milieux économiques.
La révision de la loi sur le CO2 ne satisfait pas economiesuisse, faîtière de la branche. Des mesures basées sur l’économie de marché et favorables à l’économie peuvent permettre d’atteindre les ambitieux objectifs climatiques.
L’organisation faîtière s’oppose ainsi à la taxe sur les billets d’avion, «inefficace en termes de politique climatique et qui nuit à la place économique suisse». Elle rejette également le fonds pour le climat à cause de son caractère illimité. Elle soutient toutefois la prolongation du programme Bâtiments jusqu’en 2030. Le Conseil national se prononcera en mars.
Par ailleurs, elle recommande de ne pas augmenter la taxe sur le CO2. Le montant actuel est fixé à 96 francs par tonne et le plafond est de 120 francs par tonne. Une augmentation entraînerait de nouvelles délocalisations de l’industrie à l’étranger et nuirait à la place économique.

Multinationales

L’initiative sur les multinationales responsables représente un autre défi pour l’économie helvétique. De l’avis de l’organisation, le texte va trop loin. Elle peut toutefois s’accommoder du contre-projet adopté par le Conseil des Etats.
Celui-ci ne prévoit pas que les entreprises doivent assumer une responsabilité même en l’absence de faute. Il évite ainsi à la Suisse une solution unique au monde, qui «exposerait les entreprises à des chantages au procès et affaiblirait notre place économique», a souligné M. Karrer.
Avec ce concept, la Suisse adopte trois réglementations parmi les plus modernes et les plus ambitieuses en matière d’obligation de rendre compte et une obligation de diligence exhaustive quant au travail des enfants et aux minerais provenant de zones de conflit.

Technologie

La Suisse doit encore s’améliorer en ce qui concerne la 5G. Une infrastructure moderne de téléphonie mobile est importante pour implanter avec succès les nouvelles technologies. Jusqu’en 2030, la 5G permettra la création de 137’000 emplois et une augmentation annuelle de la production pouvant aller jusqu’à 42,4 milliards de francs, selon une étude de l’association suisse d’usagers de télécommunications.
Les Suisses se prononceront sur l’identité électronique. De l’avis d’economiesuisse, celle-ci déchargera les consommateurs, les autorités et les entreprises. La place économique s’en trouvera renforcée.

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