Blanchiment: pour une surveillance «soft» des avocats-conseil

AWP/ATS

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Le Conseil des Etats a soutenu mardi par 34 voix contre 9 une réforme édulcorée.

Après avoir soutenu l’introduction d’un registre des ayants droit économiques pour lutter contre le blanchiment d’argent, le Parlement s’attaque au rôle des avocats. Le Conseil des Etats a soutenu mardi par 34 voix contre 9 une réforme édulcorée.

Le projet du Conseil fédéral, qui se base sur les normes internationales du Groupe d’action financière sur le blanchiment de capitaux (GAFI), vise à éviter que les criminels n’accèdent au système financier suisse via des entreprises ou des sociétés boîte aux lettres opaques. Les sociétés devront annoncer l’identité de leurs ayants droit économiques dans un registre fédéral électronique, qui ne sera pas public.

Ce premier volet de la réforme a déjà été assoupli par le Conseil des Etats et avalisé par le National. Le Conseil fédéral entend aussi soumettre les activités de conseil juridique qui présentent un risque élevé de blanchiment d’argent à la législation. Le Conseil des Etats avait toutefois décidé de discuter du rôle des avocats et des notaires dans un deuxième volet de la réforme, très technique.

Pression internationale

La création de sociétés et les transactions immobilières sont notamment dans le viseur. Il s’agit d’assurer l’intégrité de la place financière suisse, a dit le rapporteur de commission Daniel Jositsch (PS/ZH). La pression à l’international est forte.

L’UDC et quelques centristes ont tenté en vain de refuser l’entrée en matière. Plusieurs orateurs du camp bourgeois, même parmi la majorité, ont douté de l’efficacité des mesures prévues.

La bureaucratie risque d’augmenter, et les conséquences dans la lutte contre le blanchiment ne sont pas claires. La Suisse ne doit pas aller plus loin que les autres pays, a plaidé en substance Beat Rieder (Centre/VS).

«Rien changé»

La Chambre l’a suivi sur tous les points et restreint considérablement la liste des activités entrant dans le champ de la loi. Concrètement, les activités non financières, qui préparent les activités financières comme la création de sociétés ou la vente d’immeubles, ne seront pas soumises à la législation.

Ces activités permettent ensuite de créer les conditions pour blanchir de l’argent, a rappelé Carlo Sommaruga (PS/GE). «C’est l’élément principal du projet, si on ne change pas cela, on n’aura rien changé», a -t-il critiqué.

Et de rappeler que la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme est un enjeu mondial essentiel, aussi pour la place financière suisse. «L’argent de la cocaïne ne finit pas sous un matelas, mais est réinjecté».

De même, les catégories professionnelles des avocats et des notaires ne seront pas explicitement nommées, la loi se contentant de parler de conseillers. D’autres aspects techniques, comme les transactions financières intra-familiales ou les donations, ne seront pas visées par la loi.

Sur tous ces points, le socialiste genevois a appelé en vain à retourner au projet du Conseil fédéral. Il a échoué à chaque fois par 31 voix contre 11.

«Effet Boomerang»

Les décisions prises sont un pas dans la bonne direction, mais cela n’est pas suffisant, a prévenu la ministre des finances, Karin Keller-Sutter. A l’étranger, la mise en oeuvre de telles mesures existe déjà et on constate qu’elle peut se faire de manière pragmatique et sans empêcher le travail des conseillers juridiques.

Et de mettre en garde: avec les assouplissements décidés par la majorité, la Suisse risque de subir un effet «boomerang». «Nous nous retrouverons pour reparler de ce thème», a dit la St-Galloise. La pression ne faiblira pas.

Le dossier part au Conseil national.

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