Tensions pré-électorales

Eric Vanraes, Banque Eric Sturdza

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Chronique des taux de la banque Eric Sturdza.

©Keystone
Cash is king

Les derniers jours avant le verdict des urnes aux Etats-Unis ont été particuliers: au cours de la semaine passée, les marchés actions ont baissé, les taux gouvernementaux sont remontés, les spreads de crédit se sont écartés, l’or n’a pas fait grand-chose et pour ne pas perdre d’argent en dollars, il était préférable de rester cash! Cette situation, temporaire selon nous, va pouvoir ajouter de l’eau au moulin des stratégistes qui estiment que le rôle de couverture des actions par les taux longs a disparu. Cela dit, les tensions sur les taux à 10 et 30 ans sont pour l’instant raisonnables et nous sommes toujours en-dessous des niveaux-clés de 1% et 1,75%. Il va falloir attendre quelques jours (en tout cas espérons-le) pour y voir plus clair, à la fois en termes de résultats électoraux et en termes d’évolution de la crise sanitaire outre-Atlantique. Cette dernière, qui a depuis le début un temps de retard par rapport à l’Europe, pourrait inciter la Fed à plus d’interventionnisme, surtout une fois passées les élections. 

Des remontées de taux plus significatives jetteraient
de l’huile sur le feu et commenceraient à inquiéter Wall Street. 

Nous sommes toujours convaincus que la banque centrale américaine ne peut pas se permettre de «laisser filer» les taux longs. La légère remontée que nous avons connue lors des dernières séances n’est pas pour lui déplaire car elle pourrait entretenir les craintes inflationnistes qui ont tant de mal à se concrétiser. Des remontées de taux plus significatives, dans ce contexte si particulier, jetteraient de l’huile sur le feu et commenceraient à inquiéter Wall Street. 

Il est urgent de ne rien faire

Essayer de jouer au plus malin avec les marchés en ce moment n’est pas une tactique appropriée. A très court terme, si l’on estime que les portefeuilles sont bien positionnés avec des allocations en duration pure et en crédits adéquate, il est plus prudent de ne plus toucher à rien et de voir dans quel sens le vent va tourner dans quelques jours. Si jamais les spreads venaient à s’écarter, ce serait sans nul doute une opportunité d’investissement qu’il ne faudrait pas laisser passer. Encore faut-il avoir des munitions et détenir des Treasuries courtes ainsi qu’un peu plus de cash que d’habitude nous apparait justifié. En effet, nous nous tenons prêts à augmenter significativement nos investissements en high-bêta et en hybrides si les rendements proposés redeviennent attrayants. Nous sommes donc en quelque sorte au milieu du gué, prêts à remettre un peu de duration si les rendements des Treasuries venaient à augmenter mais également (et surtout) préparés pour une stratégie crédits un peu plus agressive pour 2021 si les spreads s’écartent. Reste à savoir de quel côté le vent va tourner. Il va falloir faire preuve de pragmatisme et d’humilité!

Christine Lagarde, un an déjà!

Le plus grand succès de Madame Lagarde est sans doute d’avoir si rapidement fait oublier Mario Draghi et ce n’était pas une mince affaire! Nous ne saurons jamais comment Super Mario aurait géré la crise COVID mais il n’aurait probablement pas pu faire mieux ni plus. Au bout d’une année extrêmement compliquée, la BCE peut s’enorgueillir d’avoir traversé la tempête en faisant de son mieux, avec une patronne qui n’a pas hésité de mettre les gouvernements au pied du mur lorsqu’il fallait travailler main dans la main avec la banque centrale. 

Nous continuons de penser qu’un jour ou l’autre,
la classe d’actifs des hybrides sera rajoutée dans le CSPP.

Confrontée aujourd’hui à une deuxième vague agressive, synonyme de reconfinements un peu partout sur le vieux continent, l’institution de Francfort va devoir intervenir de nouveau et peut-être plus massivement que prévu initialement. C’est la raison pour laquelle, dans notre recherche d’opportunités sur les marchés de crédits, nous favoriserons sans doute les corporates européens qui seront soutenus par le Quantitative Easing massif de la BCE. Il est sans doute prématuré pour elle d’ajouter les hybrides à son programme mais nous continuons de penser qu’un jour ou l’autre, cette classe d’actifs sera rajoutée dans le CSPP. Il faudra donc y songer au moment d’envisager les structures de portefeuilles pour 2021 car dans ce cas, les spreads hybrides seraient bien orientés mais nous devrions composer avec un revers de la médaille du côté de la liquidité. Il n’y en aura pas pour tout le monde et nous devrons anticiper ce moment afin de ne pas arriver trop tard. 

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