Solide demande de Global Macro

Cyril Gomez

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Les segments Multistratégies et CTA attirent le gros des capitaux mais les stratégies plus fondamentales des fonds Equity Hedge pourraient réitérer leurs performances impressionnantes de 2017.

Après une année 2017 exceptionnelle pour l’industrie des fonds spéculatifs, aussi bien en termes d’actifs sous gestion (AuM) que de performances, que peut bien réserver l’exercice en cours? Les dernières statistiques relatives aux flux de fonds montrent que les investisseurs ont commencé à réduire leur allocation dans les stratégies les plus exposées au risque systématique du marché ou beta. Ce, depuis le dernier trimestre 2017.

C’est le cas de l’ensemble des stratégies sur actions de type Equity Hedge (EH), dont l’exposition nette des fonds est souvent supérieure à 50%. Ce sous-groupe, mesuré par le HFRI Equity Hedge Total Index, affiche un rendement de plus de 13% en 2017 contre 8,7% pour l’indice général HFRI Fund Weighted Composite Index.

Les investisseurs réduisent les gérants fondamentaux

Cette famille réalise la meilleure performance parmi l’ensemble des stratégies alternatives calculées par Hedge Fund Research (HFR), portée par le segment de croissance (Fundamental Growth, +19,23%) et de rendement (Fundamental Value, +13,56%). Ces deux sous-stratégies ont pourtant souffert de sorties de fonds significatives au quatrième trimestre et à hauteur de plus de 13 milliards de dollars sur l’ensemble de l’année 2017.

Cela dit, la valeur des investissements des stratégies EH a néanmoins progressé à un total de 939 milliards de dollars (la première catégorie de stratégies en termes d’AuM), précisément grâce aux gains précités. À l’inverse, les apports de capitaux en direction des gérants Global Macro ont augmenté au cours du quatrième trimestre.

Ce, alors que leurs performances ont été limitée à un peu plus de 2% sur l’ensemble de l’année (3,89% si l’on exclut les fonds de fonds). Les rares stratégies de cette famille ayant le mieux navigué les marchés sont celles faisant appel à plusieurs approches d’investissement au sein d’une même équipe, autrement dit les fonds Multistratégies (+5,33% en 2017).

Deux approches opposées de l’investissement

En dépit de ces modestes performances, les stratégies Global Macro ont pourtant attiré vers elles près de 11 milliards de dollars de capitaux nouveaux sur les trois derniers mois de 2017, portant le total des AuM à 600 milliards de dollars. Cette rotation interpelle, dès lors que les fonds Global Macro appliquent des processus décisionnels et de placement à l’opposé de ceux de la plupart des gérants alternatifs de la catégorie EH.

Les gérants Global Macro tentent en effet de prédire ou anticiper des événements de nature macroéconomique susceptibles de produire un impact plus ou moins important sur certaines catégories d’actifs et d’instruments financiers. Ils procèdent donc d’abord par l’analyse des actifs détenus en portefeuille avant d’en élaborer la stratégie, qui utilisera de façon intensive des produits dérivés tels que les contrats à terme et les options.

À l’opposé, la plupart des gérants EH procèdent d’abord en établissant une stratégie, avant de prendre en compte les actifs s’y prêtant le mieux. Ils s’appuient égaement davantage sur des données historiques (fondamentales ou quantitatives) pour identifier le jeu de relations que des titres entretiennent entre eux et/ou les anomalies de prix (stratégies factorielles, arbitrage statistique), le plus souvent dans le but de neutraliser l’impact de marché (stratégie Market Neutral, par exemple).

Des opportunités en 2018 qui favorisent l’Equity Hedge

L’exercice 2018 «présente un tout autre type de défis et d’opportunités», commente le président de HFR, Kenneth J. Heinz, à l’occasion de la publication du rapport de flux de fonds alternatifs publié le 19 janvier dernier. Celui-ci invoque le nouveau président de la Fed, le paquet fiscal de l’Administration Trump, la dynamique des fusions et acquisitions (M&A) ou encore «les puissantes tendances des secteurs du détail, des nouvelles technologies et des médias».

Toutefois, ces facteurs devraient normalement privilégier les stratégies EH et dans une moindre mesure les gérants Global Macro, dont la rotation d’une classe d’actifs à une autre est intense. Du reste, les données propriétaires de la Plateforme de Comptes Gérés (Managed Account Platform) de Lyxor Asset Management (Lyxor) montrent que les stratégies Global Macro «souffrent» en ce début d’année, leurs positionnements acheteurs sur le dollar ayant été contrariés par sa dépréciation de 4% durant le premier mois de l’année 2018.

«Les analystes et les gestionnaires de portefeuille évaluent toujours dans le détail les implications possibles de la réforme fiscale américaine», écrivent les experts de la recherche Hedge Funds de Lyxor. Telles que la déduction de la charge d’intérêt, par exemple, désormais limitée à 30% du bénéfice avant intérêts, impôts et amortissements et qui devrait, selon Lyxor, «favoriser les entreprises affichant les marges EBITDA les plus importantes».

Le coût non récurrent du rapatriement des réserves des multinationales américaines à l’étranger (taxées au forfait de 15,5%) devrait quant à lui favoriser les entreprises jouissant d’un différentiel fiscal avantageux par rapport aux taux d’imposition des autres juridictions. En ajoutant les futures dépenses d’infrastructures et le processus de numérisation transformatrice des processus industriels, le contexte incite les entreprises à investir. Et devrait créer du coup des situations spéciales (M&A, IPO, flux de capitaux, modification de la structure du capital) attrayantes.

Lyxor voit du potentiel dans les fonds L/S Actions

Soit, un environnement, exigeant en termes de capacité d’analyse des titres au cas par cas, qui conduit Lyxor à privilégier les «gérants fondamentaux» (bottom-up managers). «Une discrimination accrue des titres devrait soutenir la génération d’alpha pour les fonds Long/Short Actions», estiment les experts de la division de gestion d’actifs de Société Générale.

Les fonds L/S Equity de la plateforme de Lyxor, en hausse de 1,8% depuis le début de l’année (au 22 janvier 2018), continuent de susciter l’intérêt des investisseurs (+979 millions d’euros au mois de novembre), aidés par une faible corrélation, une dispersion élevée concomitante à une progression positive des marchés actions.

Enfin, à noter, dans le camp des stratégies Global Macro, que le segment CTA, en hausse de 3,5% depuis début janvier, doit ses performances à ses paris sur les matières premières (positions acheteuses sur l’aluminium et vendeuses sur le blé et le maïs), ainsi qu’à son allocation longue sur les actions, en particulier les actions américaines et asiatiques.