Savoir utiliser la volatilité

Salima Barragan

2 minutes de lecture

Analyse des opportunités d’investissement en Europe avec Guillaume Jourdan de La Financière de l’Échiquier.

La dynamique de croissance économique européenne est plus forte que celle des États-Unis. Ceci n’a pourtant pas empêché les marchés européens d’être quelque peu chahutés en février. Une dépréciation injuste selon Guillaume Jourdan, co-gérant du fonds diversifié Échiquier ARTY.

En 2017, les marchés avaient expérimenté trois pics de volatilité liés à des événements contre lesquels le gérant avait mis en place des stratégies de couverture. Ces dernières lui ont permis de surperformer son benchmark*. «Début 2018, notre stratégie d’investissement reposait sur la hausse de l’inflation et des taux. En février, si nous étions prêts à affronter une hausse de la volatilité, celle-ci fut exceptionnelle; l’opportunité de revenir sur des valeurs excessivement attaquées» explique le gérant.

Pour 2018, d‘autres épisodes de volatilité sont à prévoir. «Les prochains résultats trimestriels des entreprises ainsi que les effets de la réforme fiscale américaine et des nouvelles barrières douanières vont créer des points d’entrée intéressants. Ce sont ces distorsions qui généreront des opportunités d’arbitrage sur les valeurs européennes».

L'objectif est de composer la meilleure combinaison
de titres possible selon une approche centrée «value».

Guillaume Jourdan a pour objectif de composer la meilleure combinaison de titres possible selon une approche centrée «value». Ses critères de base sont le rendement de l’action, l’arbitrage entre valeurs cycliques et valeurs de croissance et une répartition européenne optimale. «Notre philosophie d’investissement consiste à se positionner sur des titres qui suivent la croissance européenne», affirme le gérant. Il privilégie ainsi actuellement, par exemple, certains constructeurs automobiles qui en bénéficient, et notamment des titres tels que Volkswagen, à la fois décoté et leader sur son marché.

Tenir compte de l’évolution des monnaies

Le gérant est fortement sous-pondéré sur la Grande-Bretagne par rapport à son benchmark afin de ne pas être impacté par la volatilité importante sur le change entre l’euro et la livre sterling. «Les compagnies britanniques ont beaucoup de mal à anticiper les conséquences du Brexit et les profits warnings se font ressentir dans plusieurs secteurs.» commente Guillaume Jourdan. Il reste cependant positif sur des multinationales pharmaceutiques telles qu’Astrazeneca dont le chiffre d’affaires ne se limite pas à la Grande-Bretagne. «L’élément le plus important est le périmètre du chiffre d’affaires. Celui de Saint-Gobain, par exemple, n’est pas uniquement exposé à la France mais aussi aux autres pays européens.» Par ailleurs, Guillaume Jourdan surpondère la France (37,1% vs 17%). Sa connaissance affinée des entreprises françaises ainsi qu’un très bon accès à leur management lui permet de faire la différence.

En une année, l’euro s’est renforcé de 16% contre le dollar ce qui pénalise les entreprises européennes largement tributaires de leurs exportations. «Aujourd’hui, l’effet devise est un des vecteurs de volatilité sur les résultats d’entreprises.» D’après le gérant, un point d’équilibre à 1,20 profiterait à la croissance européenne mais au-delà de 1,30, la croissance entrerait probablement en zone de turbulence. Le taux de change sera un élément primordial face à une guerre commerciale. Pour contrecarrer l’effet devise, il cible des valeurs leaders de leur secteur qui ont un «pricing power» pouvant justifier les hausses de prix à venir.

Et du côté des obligations

Face à un environnement contraignant pour la gestion obligataire, le gérant reste optimiste. Il voit des segments de valeur sur les spreads de crédit grâce à une sélectivité sur les titres. Son exposition au taux longs est actuellement complètement couverte. Guillaume Jourdan estime que les spreads de crédit ne vont pas s’écarter de façon substantielle. «Au cours du mois de février, la baisse de 5% de l’Eurostoxx ne s’est pas transmise aux obligations, ce qui a eu un faible impact sur les spreads de crédit de 5 à 10 points de base».

Les obligations convertibles sont une classe d’actifs pertinente
dans un environnement caractérisé par une volatilité accrue.

Les obligations convertibles sont une classe d’actifs particulièrement pertinente dans un environnement caractérisé par une volatilité accrue et des hausses des taux. Le fonds en détient 6% et cette poche sera renforcée lors de nouvelles opportunités. «Nous avons ainsi acheté des titres Nexity dont les obligations convertibles sont plus intéressantes que les actions ou les obligations.»

En 2018, sa stratégie de gestion continuera à être centrée sur l’arbitrage du meilleur couple rendement/risque émis par les entreprises européennes à travers ces trois classes d’actifs sur lesquelles le gérant possède une triple expertise. Tactiquement, il utilisera la volatilité comme vecteur principal pour déceler des opportunités d’achat.

* Il s’agit d’un indice composite: 25% MSCI Europe, 25% Eonia, 50% Iboxx Euro Corporate 3-5