Turquie: défis économiques et optimisme des entreprises

Andrea Astone, BMO Global Asset Management

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Si la victoire d’Erdogan atténuera les inquiétudes concernant les risques politiques à court terme, des zones d’ombre continuent de planer sur l’économie nationale.

La victoire d’Erdogan aux élections n’a pas de quoi restaurer la confiance des investisseurs en Turquie, à moins que de véritables mesures ne soient prises pour remédier aux vulnérabilités extérieures et à la surchauffe économique. Nous nous sommes rendus en Turquie afin d’essayer d’évaluer si les entreprises s’engagent dans des pratiques commerciales durables dans un contexte économique et politique actuellement difficile.

Les résultats des récentes élections présidentielles et parlementaires en Turquie conduiront à un système présidentiel puissant qui confère des pouvoirs sans précédent à Recep Tayyip Erdogan. En revendiquant la victoire, M. Erdogan a surmonté un certain nombre de défis, y compris une opposition résurgente, une monnaie glissante et des préoccupations croissantes au sujet des pressions inflationnistes et des déséquilibres économiques.

La confiance des investisseurs mise à rude épreuve

A l’approche des élections présidentielles et législatives cruciales, l’incertitude politique et économique, conjuguée à un marché des entreprises lourdement endetté et fortement tributaire de la dette en devises étrangères, ont mis la confiance des investisseurs à rude épreuve. Si la victoire d’Erdogan atténuera probablement les inquiétudes concernant les risques politiques à court terme, des zones d’ombre continuent de planer sur l’économie nationale.

Des entreprises optimistes

Malgré les conditions difficiles, les entreprises continuent d’espérer que leur croissance se poursuive. La résilience historique des affaires en dépit de multiples revers, la croissance économique impressionnante que le pays est en train de vivre (le PIB a augmenté de 7.3% sur l’année 2017) ainsi qu’un marché national de consommation de près de 80 millions de personnes soutiennent leur optimisme. De plus, la façon dont les équipes de direction de la plupart des entreprises intègrent activement les questions de développement durable dans leurs stratégies commerciales est impressionnante.

Approche remarquable concernant la problématique de viabilité.

Les principales institutions financières, dont Garanti Bank, investissent massivement dans l’amélioration de leurs services bancaires numériques pour cibler les segments de la population ne bénéficiant peu ou pas de services bancaires, tout en veillant à ce que les données des utilisateurs restent protégées des cyberattaques. Les allocations aux projets d’énergie renouvelable et d’efficacité énergétique ont également été augmentées. Les équipes de direction d’Anadolu Efes et d’autres grandes entreprises d’alimentation et de boissons ont adopté des pratiques d’approvisionnement agricole durable dans le but de devenir de puissants acteurs régionaux. Enfin, les entreprises de vente au détail de produits alimentaires, en particulier les épiceries à rabais, ont commencé à tenir compte de l’efficacité énergétique et des déchets alimentaires dans la logistique, la conception et l’exploitation des magasins au fur et à mesure qu’elles prennent de l’ampleur à l’échelle du pays.

Nos recherches avant le voyage ainsi que les rencontres que nous avons faites nous ont donné l’assurance que pour bon nombre de grandes entreprises de premier ordre en Turquie, la durabilité est devenue une partie intégrante de la conduite des affaires. Cela dit, les progrès réalisés jusqu’à présent ont eu lieu dans un contexte économique favorable qui n’existe plus.

Observation objective

Une économie en surchauffe et vulnérable, associée à des principes économiques potentiellement peu orthodoxes, à une pression plus large sur les marchés émergents ainsi qu’à des tensions géopolitiques croissantes remet en question l’optimisme des entreprises. Un tel contexte peut, à long terme, entraver leur potentiel de croissance et, éventuellement, leur volonté de rester engagées en faveur d’une certaine stabilité. Il est donc important de surveiller de près les investissements des entreprises dans la gestion du développement durable et de la gouvernance. 

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