Scénario de reprise: le stress test c’est maintenant

François-Xavier Chauchat, Dorval Asset Management

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Attendue par tous pour l’été, la signature de l'accord commercial entre la Chine et les États-Unis semble maintenant remise en question.

L'augmentation surprise des droits de douane américains de 10% à 25% sur 200 milliards de dollars d'importations chinoises, et la menace d'une extension à toutes les importations en provenance de Chine ont logiquement secoué les marchés financiers. Attendue par tous pour l’été, la signature de l'accord commercial entre la Chine et les États-Unis semble maintenant remise en question. La Chine s'inquiète d'un accord excessivement contraignant pour sa souveraineté, et Donald Trump craint qu'un accord rapide ne soit perçu par l'électorat comme un signe de faiblesse sur cette question stratégique. Les représailles de la Chine sur les importations américaines et l'extension possible des droits de douane américains aux biens de consommation, dont les nombreux produits américains fabriqués en Chine, menacent Wall Street. De plus, Donald Trump a toujours la possibilité d’étendre sa guerre commerciale à l’UE. Les dernières nouvelles sur le commerce réduisent donc la probabilité d'un redressement industriel mondial, après déjà 16 mois de ralentissement.

Le renversement brutal des marchés boursiers va probablement
relancer le débat éternel sur la valorisation des actions.

Cette salve de mauvaises nouvelles doit cependant être mise en perspective. Après déjà 18 mois de guerre commerciale, les investisseurs sont plus difficiles à impressionner. Ils se souviennent que la rhétorique violente de Donald Trump sur l’ALENA avait accouché d’une souris, et voient que les négociations entre les deux géants ne sont pas rompues. De plus, avec l’enjeu de la réélection de Trump, les investisseurs peuvent douter que les États-Unis soient prêts à payer un prix économique élevé. Ensuite, l’impact macro et microéconomique de cette guerre est limité. L’axe commercial États-Unis / Chine ne touche que 3,5% du commerce mondial, et une grande partie de la production des multinationales américaines se fait hors du sol américain. L'inflation US augmentera certes un peu, mais ce phénomène temporaire n’empêchera pas la Fed de garder un biais accommodant qui limitera les dégâts sur les marchés financiers. Enfin, les dernières statistiques de PIB et de consommation dans le G20 plaident plutôt pour un arrêt des révisions à la baisse de la croissance 2019.

Comme toujours, le renversement brutal des marchés boursiers va probablement relancer le débat éternel sur la valorisation des actions. Warren Buffet suggérait récemment que celle-ci restait très attrayante, les taux d’intérêt à long terme étant à des plus bas record. L’histoire montre toutefois que la tendance à la baisse des rendements obligataires n’a produit aucune tendance à la hausse des PER au cours des 20 dernières années. Inversement, le haut niveau du PER corrigé du cycle (ou «Shiller») du S&P 500 est présenté par les oiseaux de mauvais augure comme un présage néfaste. Mais le même PER de Shiller hors des États-Unis reste bas, ce qui affaiblit clairement l’argument en faveur d'une surévaluation générale des actions mondiales. Notre propre opinion reste inchangée: les actions mondiales nous semblent correctement valorisées.

Avec des valorisations normales, une croissance économique résiliente mais pas encore en reprise, et des risques politiques et commerciaux en nette hausse, nous avons récemment réduit notre exposition aux actions, et plus particulièrement aux valeurs cycliques. En outre, tant que les incertitudes commerciales subsisteront, la prime de liquidité des petites valeurs demeurera, car les flux ne reviendront pas. Toutefois, nous nous tenons prêts à réajuster substantiellement nos portefeuilles en fonction des nouvelles économiques et commerciales, ou si Wall-Street se détériore suffisamment pour générer une réaction politique de la part de la Réserve fédérale ou de l'administration américaine – ou des deux.

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