Qu’est-ce qui fait courir les marchés financiers?

Nicolas Mougeot, Indosuez Wealth Management Suisse

2 minutes de lecture

Les investisseurs tablent aujourd’hui sur un appui inconditionnel des banques centrales et des Etats, poussant certaines actions à de hauts niveaux.

«Attachez vos ceintures!», c’est ce qu’aurait dû annoncer la bourse de New York tant les investisseurs ont eu l’impression d’être sur le grand huit depuis le début de l’année. Après le fort rebond des marchés de fin mars à juin, les résultats des entreprises au deuxième trimestre devaient permettre de confirmer si l’optimisme des marchés n’était pas synonyme d’exubérance.

Surprise, surprise

Avant que la saison des résultats ne commence, les analystes de Wall Street s’attendaient à ce que les profits des entreprises américaines baissent de 43,8% au deuxième trimestre. Or plus de 80% d’entre elles ont annoncé des résultats supérieurs aux attentes, ce qui a limité la baisse des bénéfices des entreprises de l’indice S&P 500 à «seulement» 33,8%. Ces bonnes surprises ont permis aux investisseurs de rester confiants quant à la capacité des entreprises à garder le cap dans la tempête et au S&P 500 de croître de près de 10% depuis fin juin malgré la hausse des cas de contaminations au COVID-19 dans de nombreuses régions du monde.

Nombre d’entreprises ont dû s’adapter très rapidement
à la nouvelle donne et combler des années de sous-investissement en IT.

Bien sûr, tous les secteurs n’ont pas été égaux face à cette crise. Trois secteurs (la technologie, la santé et les utilities) ont même eu l’arrogance d’afficher des croissances positives au deuxième trimestre. La bonne santé du secteur de la technologie est en partie due au fait que la crise du COVID-19 et le confinement ont servi d’accélérateurs au changement, mettant en évidence la nécessité d’investir dans la digitalisation. Le confinement a mis à nu les entreprises qui n’étaient pas prêtes à ce changement. Nombre d’entre elles ont dû s’adapter très rapidement à cette nouvelle donne et combler des années de sous-investissement en IT. Le commerce en ligne est par exemple un grand gagnant de la crise et les entreprises en retard dans ce domaine n’ont eu d’autre choix que de s’adapter.

Le rebond particulièrement fort de l’indice Nasdaq s’explique notamment par la bonne santé de sociétés comme Alphabet, Amazon, Apple ou encore Facebook. Les investisseurs sont prêts à payer des niveaux de valorisation plus élevés pour ces sociétés technologiques que pour des entreprises de secteurs plus cycliques. La publication de résultats au-dessus des attentes justifie en effet un investissement plus important pour détenir des actifs de qualité dont les bénéfices continuent de croître fortement.

Le yo-yo observé sur plusieurs grands titres, comme Hertz, peut s’expliquer
par l’explosion des ouvertures de comptes de courtage sur des plateformes gratuites.
Attention à l’exubérance

Le rebond des marchés actions depuis le mois de mars peut s’expliquer par la combinaison de politiques monétaires et fiscales accommodantes, par une perception du risque plus faible et des résultats d’entreprises meilleurs qu’attendus. Il n’en reste pas moins que certains comportements exubérants commencent à poindre. Ainsi Hertz, au bord de la faillite, a vu le prix de son action passer de moins de 1 dollar à plus de 5 en quelques jours, et l’action Eastman Kodak a grimpé d’environ 2 dollars à plus de 30. Ces deux compagnies ont vu leur cours s’effondrer par la suite. Le phénomène s’explique probablement en partie par l’explosion du nombre d’individus qui ont ouvert des comptes de courtage sur des plateformes gratuites telles que Robinhood et qui spéculent à court terme sur des titres peu liquides. 

Croissance soutenue exigée

Les investisseurs tablent aujourd’hui sur un appui inconditionnel des banques centrales et des Etats, poussant certaines actions à traiter à de hauts niveaux de valorisation. Ces niveaux ne pourront être justifiés à long-terme que si la croissance revient comme attendu en fin d’année ou l’année prochaine. Reste à espérer que les investisseurs ne soient pas déçus par les résultats du troisième trimestre, au risque de voir les marchés corriger un peu.

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