Prime de risque actions, croissance des bénéfices et allocation d’actifs

Daniel Jakobovits, Hyposwiss Private Bank

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La dispersion des valorisations par secteur, niveaux de capitalisation et styles d’investissement est extrême, à cause du phénomène des «7 magnifiques».

L’exercice annuel d’allocation d’actifs pour 2024 est obscurci par un certain nombre d’éléments inhabituels: la déconnexion des cycles d’inflation et d’activité économique, l’effet retard de la politique monétaire sur l’activité économique et les divergences de valorisation au sein de la classe d’actifs actions. Les difficultés de ce cycle post-Covid rendent donc encore plus périlleuse que d’habitude l’exercice annuel, la fixation arbitraire d’un horizon d’investissement à 12 mois n’aidant pas.

Les sommets du cycle d’inflation ont été atteints au courant de la première moitié de 2023 et la tendance depuis est vers la désinflation. Ce sont d’abord les prix des biens qui ont décliné, suivis par ceux des services avec quelques mois de retard. Ce cycle de désinflation est déconnecté du cycle économique, puisque la croissance aux Etats-Unis s’est située au-dessus de la croissance potentielle de toute cette période de désinflation. Le Covid a eu des effets profonds sur les chaînes d’approvisionnement et sur les marchés du travail, et nous assistons maintenant à leur lente normalisation.

Cela ne signifie pas que le cycle de hausse des taux des banques centrales n’était pas nécessaire. Il fallait normaliser la politique monétaire post-Covid, et aussi s’assurer que l’inflation ne soit pas transmise circulairement aux salaires. Mais maintenant que les taux ont été normalisés, il est très difficile de déterminer, dans ce nouveau régime d’investissement, le niveau d’équilibre. De ce point de vue, les banques centrales étaient fatalement condamnées à déborder. Ceci est d’autant plus vrai que, ayant commis une erreur en début de cycle en retardant la normalisation des taux, les banques centrales se sont enfermées dans un mode de fonctionnement «data dependant» qui ne laissait que peu de place aux prévisions économiques.

La Reserve fédérale a resserré sa politique monétaire de mars 2022 à juillet 2023, les taux courts passant de 0,25% à 5,50%. Force est de constater que ce resserrement massif n’a eu que peu d’effet sur l’activité économique. Plutôt que de rechercher des explications, observons que le pic d’influence des taux courts est sans doute derrière nous.

Du point de vue d’un allocateur d’actifs, le point de départ du raisonnement est en général constitué des taux et rendements obligataires hors risque. Ceux-ci sont en train de se détendre, mais restent   élevés par rapport à leur histoire des 10 dernières années.

Mécaniquement, ces rendements obligataires élevés rendent les actions moins attrayantes, puisque le rendement attendu qu’elles offrent doit être comparé à des taux plus élevés, conduisant fatalement à une prime de risque plus réduite. Est-ce une raison pour réduire l’allocation actions? Nous estimons qu’il s’agit-là d’un raisonnement dangereux a l’heure actuelle, pour plusieurs raisons. Tout d’abord, la valorisation peut paraitre précise, mais elle est sujette à l’incertitude des flux de bénéfices futurs. Le point bas des bénéfices des sociétés ayant très probablement été atteint courant 2023, leur trajectoire à partir de ce point d’inflexion est difficile à estimer, mais les risques à la hausse existent. De plus, la dispersion des valorisations par secteur, niveaux de capitalisation et styles d’investissement est extrême, à cause du phénomène largement discuté des «7 magnifiques» qui représentent 28% de la capitalisation boursière des Etats-Unis. Dans ces circonstances, nous préférons donc effectuer une analyse par zone géographique et secteurs. Celle-ci nous conduit à des portefeuilles qui divergent des indices basés sur la capitalisation boursière.


 
Source: IBES, LSEG Datastream, MSCI, J.P. Morgan Asset Management. Forward P/E ratio is price to 12-month forward earnings, calculated using IBES earnings estimates. Past performance is not a reliable indicator of current and future results.
Guide to the Markets - Europe. Data as of 30 November 2023.

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