Obligations des marchés émergents, quelles opportunités?

Salima Barragan

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Les secteurs non-cycliques ont les meilleures perspectives, estime Alejandro Arevalo de Jupiter AM.

Les marchés émergents comptent pour près de 70% de la croissance mondiale et leurs indices obligataires (en devise forte) ont augmenté de plus de 10% sur les 12 derniers mois (performance à fin février). Où trouver les meilleures opportunités d’investissement tandis que le commerce mondial est pris entre deux feux – l’épidémie de COVID-19 et la guerre des tarifs? Pour Alejandro Arevalo, de Jupiter Asset Management, gestionnaire de portefeuilles, le thème de la consommation locale et la dette en devise forte résisteront le mieux aux turbulences.

Le BRIC sans la Chine

Au Brésil, en Russie et en Inde, la croissance provient principalement de la consommation domestique. Leur taux d'intérêt bas et l’inflation maîtrisée continueront de soutenir un rythme de croissance mis à mal par la guerre des tarifs. «Les banques centrales sont en phase initiale de leur cycle de crédit; les banques commerciales sont plus disposées à prêter et les consommateurs plus enclins à dépenser», estime Alejandro Arevalo qui mise sur les secteurs des protéines et de la pulpe de papier: «Lors de l’épidémie de la grippe porcine, la Brésil était le pays mieux positionné pour prendre l’avantage du marché des protéines. Aussi, les entreprises exportatrices de pulpe de papier sont des couvertures naturelles lors des mouvements de fuite vers la qualité qui impactent les devises locales».

Les dernières réformes en Russie ont amené le pays à une
bien meilleure position fiscale que lors de la dernière crise pétrolière.

Des réformes salutaires pour l’économie, deuxième facteur de croissance, prennent effet dans ces pays. «Le gouvernement brésilien a réussi à créer un environnement amical pour les marchés. Sa réforme sur les pensions qui été en discussion pendant une décennie est enfin passée», souligne Alejandro Arevalo. En Inde, même si le gouvernement Modi est limité par des contraintes budgétaires, la volonté de mise en place des réformes reste intacte. Enfin, les dernières réformes en Russie ont amené le pays à une bien meilleure position fiscale que lors de la dernière crise pétrolière. «La Russie est préparée à la guerre contre l’Arabie Saoudite», affirme-t-il.

Mitiger la volatilité

Avec des ratios dette sur PIB de 28% et 21% respectivement, le Guatemala et le Kazakhstan sont des émetteurs aux fondamentaux solides. Le Guatemala se distingue dans la région LATAM par sa stabilité politique et ses émetteurs d'obligations d'entreprises sont souvent les leaders du marché. Le Kazakhstan est utilisé comme substitut de la Russie en raison de spreads de crédit plus élevés. Aussi, ce pays qui n’est soumis à aucune sanction - contrairement à son grand voisin - est une bonne alternative pour s’exposer à la région. «Ces marchés de connaisseurs ont tendance à passer inaperçus si on les compare aux plus grands marchés de l'Union européenne. Seuls les investisseurs qui ont fait leur devoir de diligence et qui savent exactement dans quoi ils investissent ont tendance à se lancer dans ces économies peu connues, ce qui réduit la volatilité en cas de mouvements de panique», explique Alejandro Arevalo.  Les entreprises des secteurs non cycliques et les fournisseurs d'énergie, dont les contrats sont libellés en dollars, contribuent également à atténuer la volatilité d'un portefeuille d'obligations.

Sous-pondérer le secteur du pétrole

Depuis quelques temps, Alejandro Arevalo est sous-pondéré dans les sociétés pétrolières dont les risques n’étaient pas correctement rémunérés: «Suite aux vagues de liquidité, les entreprises ont commencé à émettre des obligations à des prix en-dessous de leur juste valeur». Néanmoins certains noms quasi souverains de qualité comme Petrobras, Sinopec ou Kazmunaigas au Kazakhstan font partis de ses investissements. «Ces émissions paient un bon différentiel vis-à-vis de leur dette gouvernementale», précise-t-il. Avec la guerre du prix du baril déclarée par l’Arabie Saoudite, les perspectives sur le secteur de l’or noir se sont assombries, notamment pour certains pays dépendants comme la Sultanat d’Oman, le Bahreïn, l'Angola, l'Equateur et le Nigeria.