Où va le smart money?

Salima Barragan

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«Notre devoir est de faire comprendre aux clients leurs devoirs en matière d’investissement responsable», estime Oliver Bilal de Natixis IM.

En cette fin d’année, quelles sont les grandes tendances dans l’asset management? Olivier Bilal, Directeur ventes et marketing international chez Natixis Investment Managers, décortique les récents flux. L’appétit pour les investissements durables reste la grande tendance du moment: «Notre devoir, en tant qu’asset manager, est de faire comprendre aux clients leurs devoirs en matière d’investissement responsable».

Un trimestre difficile pour les fonds actifs 

Dans un environnement où certains fonds actifs ont sous-performé, ce sont clairement les gérants actifs de haute conviction et générateurs d’alpha qui ont remporté le plus de succès. De même, Olivier Bilal a observé une forte demande pour les solutions alternatives liquides, plus particulièrement les stratégies long short equity, unconstraint fixed income et global macro.

Les clients «retail» plus conservateurs

Auprès des clients des banques privées, la tendance est clairement à la diminution du risque et leurs choix se portent sur des fonds plus conservateurs. Ainsi, les solutions d’allocation d’actifs, permettant d’obtenir des retours nets positifs, ont été très prisées en Allemagne, en Italie, en France et en Grande-Bretagne. Néanmoins, la demande en fonds thématiques reste soutenue: «Ces clients peuvent rapidement saisir la thématique et y trouver un sens comme dans la robotique, l’intelligence artificielle, la digitalisation ou les stratégies ISR».  

Les marchés émergents, sous pression et volatils, ont vu passablement de flux sortant. Mais Olivier Bilal estime que la demande sur ce marché de niche s’intensifiera dans le futur pour s’inscrire dans une perspective d’investissement à long terme.

Les investisseurs institutionnels se replient sur les poches alternatives.

Les fonds «high yield US», ainsi que «global credit», où la part du crédit américain reste importante, ont souffert des ventes massives des investisseurs institutionnels européens et japonais. L’impact du change contre dollar avait généré des rendements totaux négatifs. A la place, ils ont privilégié les obligations convertibles. Olivier Bilal a aussi observé un appétit croissant pour les obligations de qualité inférieure ainsi que les ABS, ces titres adossés à des actifs: «Notre acquisition de MV Credit, qui émet des obligations mezzanines, reflète cette tendance». Bien que la dette souveraine européenne soit actuellement une classe d’actif peu attractive, la demande ne fléchit pas de la part des fonds de pension désireux de couvrir leurs engagements libellés en euro avec des titres sans risque. Enfin, la part allouée dans les poches alternatives comme le global macro, le unconstraint fixed income et l’absolute return, est en nette augmentation. 

Une consolidation inévitable de l’offre 

Dans le marché de la gestion active, où l’offre de produits est surabondante, encore faut-il séparer le grain de l’ivraie. «Il y a une multitude de gérants actifs mais ceux capables de battre leur benchmark vont regagner des parts de marché», estime Olivier Bilal. 

Quant au marché des ETFs, déjà très concentré, il est dominé par quelques grands émetteurs: Blackrock, Vanguard, State Street et Amundi en Europe. «Ces émetteurs profitent d’économies d’échelle, mais je crains que le marché ne se resserre encore, ce qui ne serai pas souhaitable», souligne Olivier Bilal.  

Avec les nouvelles directive MiFID, les exigences en matière de transparence vont augmenter. Ce qui implique que les gestionnaires qui ne battent pas leur benchmark vont devoir justifier leur commission de gestion. «L’Italie est un très bon exemple. Les nouvelles exigences de transparence des frais forçent les managers à effectuer les changements nécessaires», explique Olivier Bilal. Ces tendances vont ainsi profondément transformer l’industrie. «Les gestionnaires aux performances médiocres seront condamnés à disparaître d’ici quelques années, laissant leurs parts de marché aux émetteurs d’ETF ou aux boutiques de gestion d’actifs capables de véritablement générer de l’alpha», rajoute-il

Les investissements durables: la grande tendance 

Les nouveaux investisseurs, les Millenials, sont plus sensibles à l’impact de leurs investissements. Leur approche explique le franc succès des fonds ESG (environnement, sociaux, gouvernance). 

Le dernier rapport IPCC des Nations Unies a présenté les conséquences d’un réchauffement climatique de 1,5 degré Celsius. «Pour éviter de mettre la planète en péril, l’on doit fondamentalement changer la façon de mener les affaires», souligne Olivier Bilal. Afin de de combattre le réchauffement climatique, les émissions de carbone devront devenir nulles d’ici 2040. Ce revirement pourrait être atteint en dirigeant les investissements vers les sociétés et les gouvernements alignés avec les objectifs des Nations-Unis. «Nous avons un rôle important à jouer et pour ce faire, nous avons augmenté nos ambitions. D’ailleurs notre filiale Mirova a commencé à réduire l’empreinte carbone de ses portefeuilles de 2,5 à 1,7». Ce gestionnaire français de fond ESG a également lancé le premier fonds d’intégration territorial en coopération avec la World Bank. Il vise à assurer l’intégrité de l’écosystème. «La finance peut changer l’état de la planète et notre devoir, en tant qu’asset manager, est de faire comprendre aux clients leur devoir», conclut-il.