Les experts s'attendent à une reprise rapide du healthcare

Christian Lach, Stefan Blum, Oliver Kubli, Bellevue Asset Management

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Le secteur offre des possibilités de croissance qui supportent assez bien les ralentissements économiques.

Les gérants de fonds Christian Lach, Stefan Blum et Oliver Kubli.

Le secteur de la santé a relativement bien résisté à la chute des marchés. D'un point de vue fondamental, ce secteur offre des possibilités de croissance qui supportent assez bien les ralentissements économiques et il peut aussi se montrer performant lors d’un rebond de marché. Voici un aperçu de la situation actuelle ainsi qu’une première vue sur les développements futurs.

La chute brutale des bourses déclenchée par la pandémie du coronavirus a mis les marchés financiers en état de choc. En raison du manque d'informations, il est difficile pour l'heure d'évaluer de manière fiable l'effet de la maladie COVID-19 sur l'économie mondiale. La stabilisation des marchés à court terme dépend en grande partie de la manière dont le taux des nouvelles infections peut être ralenti afin de ne pas perturber gravement le traitement des patients. Cela est particulièrement important aux Etats-Unis.

Healthcare peu impacté par les cycles économiques

Les données historiques des dernières décennies montrent que le secteur des soins de santé s'est mieux comporté lors des fortes corrections du marché et qu'il s'est également redressé plus rapidement que le marché en général. Stefan Blum, gérant du fonds BB Adamant Medtech & Services, souligne que les entreprises medtech et les prestataires de services de santé commencent à se redresser lorsque la santé fondamentale de ces entreprises peut être évaluée après que le choc initial ne se soit dissipé. La demande pour les produits et services de ces entreprises n'est guère sensible aux variations macroéconomiques, ce qui est un atout essentiel en temps de crise, tout comme le sont des marges bénéficiaires stables et des bilans solides avec un faible endettement et des flux de trésorerie élevés.

Les marchés à croissance rapide comme les soins de santé numériques
ne sont guère touchés par les cycles économiques.

Le portefeuille du fonds est, selon le gérant, très bien positionné pour résister à la tempête actuelle. Les sociétés large cap représentent plus de 80% des investissements du portefeuille, ce qui lui confère un profil défensif et une grande liquidité. Les marchés à croissance rapide comme les soins de santé numériques, qui représentent 30% du portefeuille, ne sont guère touchés par les cycles économiques. Les revenus de nombreuses entreprises du portefeuille sont basés sur les ventes et certaines connaîtront même une reprise de leurs activités suite à la crise sanitaire. Blum cite en particulier les prestataires de services de télésanté Teladoc, Ping An Healthcare Technology et One Medical (1Life Healthcare) en raison de leur capacité à traiter les patients dans un cadre virtuel.

Pour Christian Lach, gérant du fonds BB Adamant Biotech Fund, les fabricants d'agents antiviraux attirent à nouveau l’attention des investisseurs en raison de la pandémie. Les leaders de l'innovation, en particulier, devraient pouvoir en bénéficier. Toutefois, les perturbations prolongées de la chaîne d'approvisionnement dans l'industrie du développement de médicaments pourraient avoir un impact négatif sur les fabricants dont les produits proviennent de Chine ou Inde. Les entreprises pharmaceutiques européennes spécialisées sont les plus exposées à ce risque.

La Chine semble déjà remise

En Asie, la situation est complètement différente. Il semblerait que la pandémie ait dépassé son pic. «Les manufactures des entreprises de healthcare chinoises sont dans le pays et elles ont l'expérience dans la lutte contre les épidémies», déclare Oliver Kubli, expert des marchés émergents healthcare et gestionnaire du fonds BB Adamant Healthcare Asia Pacific Fund.

Les entreprises qui devraient profiter le plus de cette crise
sont les sociétés comme Alibaba Healthcare et Ping An Healthcare.

«Ces pays ont tiré de nombreux enseignements de la crise du SRAS, comme l'importance de l'élaboration de protocoles d'urgence et de sécurité, afin d'être mieux préparés à cette pandémie». Les entreprises chinoises produisent de nombreux ingrédients pharmaceutiques et Oliver souligne que leur taux d'utilisation des capacités était déjà remonté à 80-90% à la fin du mois de février. Oliver pense également que la crise du coronavirus a envoyé un signal clair aux dirigeants politiques de Pékin, à savoir que leur approche «Made in China» pour fournir des soins de santé à la vaste population du pays est une priorité absolue. La recherche et le développement dans le pays, en particulier dans le domaine de la biotechnologie et des plates-formes technologiques, recevra probablement encore plus de ressources sans dépendre du savoir-faire étranger. Les évolutions structurelles à long terme, telles que la modernisation du système de santé chinois, sont totalement restées intactes. 

Les entreprises qui devraient profiter le plus de cette crise sont les sociétés healthcare sur Internet comme Alibaba Healthcare et Ping An Healthcare, qui ont mis en place avec succès des écosystèmes de soins de santé entiers au cours des dix dernières années. De nouvelles mesures réglementaires permettent désormais aux médecins de délivrer des ordonnances en ligne pour des médicaments, qui peuvent également être remplis et expédiés. Le Fonds BB Adamant pour les soins de santé en Asie-Pacifique a pour l’heure relativement bien résisté à la crise actuelle. Oliver a récemment ajouté des positions défensives dans des sociétés pharmaceutiques japonaises au portefeuille et il a augmenté la pondération d'autres sociétés qui ont fait des progrès considérables dans la lutte contre les infections virales.

Le remdesivir de Gilead est le médicament le plus susceptible
d'être approuvé en premier pour traiter les coronavirus.

Les sociétés liées de près ou de loin à la lutte contre la pandémie du coronavirus représentent 28,5% du fonds que Christian Lach gère. La plupart d'entre elles sont des fabricants de médicaments, mais le portefeuille comprend également des spécialistes du diagnostic et des fournisseurs de services d'essais cliniques. On dénombre huit sociétés, les géants de la biotechnologie Gilead Sciences et Regeneron étant les plus importantes. M. Lach estime que le remdesivir de Gilead est le médicament le plus susceptible d'être approuvé en premier pour traiter les coronavirus. Comme le médicament antigrippal Tamiflu, le remdesivir est un médicament antiviral qui empêche les virus de se répliquer. Le Tamiflu a également été développé par Gilead, mais il est commercialisé par Roche et rapporte des milliards chaque année à l'approche de la saison de la grippe. En termes scientifiques, le remdésivir est un inhibiteur de l'ARN polymérase. Les inhibiteurs de protéase utilisés pour traiter le VIH ou l'hépatite sont également testés pour voir s'ils seront efficaces contre les coronavirus. Il s'agit de la classe de médicaments à laquelle appartient Kaletra, une combinaison lopinavir-ritonavir approuvée pour le traitement du VIH/SIDA, qui est actuellement testée par la société biopharmaceutique AbbVie comme traitement du Covid-19. La société biotech Alnylam se concentre sur le niveau des gènes avec sa plateforme d'interférence ARN, en partenariat avec Vir Biotechnology, une société de traitement des anticorps. Les scénarios positifs laissent à penser que le remdesivir pourrait être approuvé à l'automne. De grands espoirs reposent également sur des médicaments permettant de contrôler la réponse immunitaire excessive qui se produit dans les cas graves. Il s'agit notamment de l'anticorps sarilumab de Regeneron et du tocilizumab de Chugai. L'espoir est ici de prévenir les dommages aux poumons afin d'augmenter les chances de guérison.

Les vaccins agissent un peu plus tôt en prévenant l'infection par les voies respiratoires. L'objectif de la vaccination est d'assurer une protection permanente par une immunisation active en apprenant à l'organisme à produire ses propres substances pour combattre la maladie, ou à obtenir une protection pour une période de temps limitée (immunité passive). Les différentes approches vont des anticorps et des immunoglobulines pour l'immunité passive aux vaccins à ARN et aux vaccins classiques pour la protection active. Elles ont toutes en commun le fait que les essais cliniques viennent à peine de commencer ou commenceront bientôt. Les approbations prendront au moins 12 à 18 mois supplémentaires. Moderna Therapeutics, Regeneron et Wuxi Biologics figurent parmi les leaders.

Compte tenu de la volatilité persistante et importante sur les marchés, ces véhicules d'investissement peuvent offrir de bons profils risque/rendement pour entrer sur le marché. Les évaluations sectorielles dans la biotech et dans les marchés émergents sont actuellement à des niveaux historiquement bas.

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