La nature, acteur clé de la réduction des émissions de CO2

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Lors de sessions organisées par Lombard Odier lors de la COP26, des experts ont insisté sur l’importance de la préservation du capital naturel.

Comment faire face aux défis posés par le changement climatique? Une partie de la solution consiste justement à «investir dans la nature», est convaincue Nathalie Seddon, professeure en biodiversité et directrice de la Nature-based Solutions Initiative à l’Université d’Oxford. Qu’il s’agisse de la protection des forêts primaires ou des océans, investir à grande échelle dans la préservation ou la régénération de certaines zones naturelles jouera un rôle décisif pour respecter les objectifs fixés dans le cadre de l’Accord de Paris. La professeure s’exprimait jeudi lors d’une session portant sur les investissements consacrés à la préservation de la nature qui s’inscrivait dans le cadre d’une série de cinq conférences organisées la semaine dernière par Lombard Odier à l’occasion de la COP26 à Glasgow.

Les organisateurs de la session de jeudi, organisée en collaboration avec Terra Carta Action de HRH le Prince de Galles ainsi qu’avec le soutien de la Natural Capital Investment Alliance (NCIA) et de la Circular Bioeconomy Alliance (CBA), ont souligné en préambule que la nature peut, à elle seule, contribuer à hauteur de plus de 30% à la réduction des émissions de dioxydes de carbone (CO2) requise pour atteindre les objectifs définis par l’Accord de Paris, alors que la moitié du PIB mondial dépend directement ou indirectement de la nature.

Priorité à la lutte contre la déforestation

Marc Palahi, directeur de l’Institut forestier européen (EFI) a rappelé que la nature reste complexe. «La forêt contribue à absorber une partie des émissions de CO2 mais, dans certaines régions, comme cela a été le cas par exemple au Canada ou en Russie suite à des incendies, elle peut aussi même devenir un émetteur net», a souligné l’expert.

Le secteur des énergies renouvelables a une plus forte intensité en capital que celui des énergies fossiles. Il faudra mettre en place des solutions pour réduire les coûts du financement.

En fonction de la manière dont elles sont exploitées, les grandes zones forestières de la planète peuvent, elles aussi, devenir des émetteurs nets de CO2, a souligné de son côté Lee White, ministre en charge des forêts, des océans, de l’environnement et du changement climatique de la République du Gabon. S’il cite l’exemple de ce pays pour sa contribution à la réduction des émissions de gaz à effet de serre, il a déploré en même temps le manque d’efforts entrepris par les investisseurs internationaux au Gabon pour soutenir la préservation de ses zones naturelles.

Le Gabon, un «absorbeur net» de CO2

«Le Gabon ne remplit pas seulement les objectifs du net zéro - il est même un absorbeur net de CO2», a-t-il souligné. Pour autant, «n ne voit pas souvent des investisseurs venir au Gabon pour aider le pays à protéger ses zones forestières. Il y a beaucoup de promesses mais l’action se fait attendre», déplore-t-il. L’occasion pour lui de comparer aussi la situation du Gabon avec celle de la République démocratique du Congo (RDC) qui est, elle, au contraire un émetteur net de CO2. «Malgré ses immenses surfaces forestières, la RDC n’assure plus un rôle de puit à carbone», regrette Lee White. S’il salue les engagements pris par une centaine de pays pour lutter contre la déforestation qui ont été annoncés dans le cadre de la COP26, l’expert avertit que «si nous ne résolvons pas le problème de la déforestation, alors nous perdrons le combat contre le changement climatique.» La professeur Nathalie Seddon abonde dans le même sens : «Il faut cesser de se focaliser uniquement sur la mesure des tonnes de CO2 émises mais accorder davantage d’attention aux progrès réalisés, ou non, en matière de biodiversité».

Combinaison prometteuse entre différents objectifs

Pour Hubert Keller, senior managing partner chez Lombard Odier, il y a actuellement de nombreuses raisons de se montrer confiant quant aux développements en cours. Il cite notamment «la combinaison de l’alignement des portefeuilles sur les objectifs net zéro, des nouvelles opportunités pour développer la bio-économie circulaire et des grandes opportunités qui existent potentiellement sur le marché volontaire du carbone ainsi que de la capacité à débloquer une grande quantité de capital». Selon lui, il existe une réelle opportunité pour connecter l’énorme quantité de capital non investi pour le redéployer au bénéfice de la nature. Si l’on fait le lien entre ces deux aspects, il sera alors possible selon Hubert Keller d’atteindre un triple objectif : celui d’assurer à la fois la transition vers une économie «net zéro», la transition vers une économie positive pour la nature ainsi que la création de nouvelles opportunités économiques pour les communautés locales.

La dernière partie du chemin sera la plus difficile

Quelle peut être la contribution du secteur financier pour atteindre les objectifs dits de «net zéro»? Lors d’une autre session organisée la veille par Lombard Odier, Cameron Hepburn, professeur et directeur de la Smith School of Enterprise and the Environment à l’Université d’Oxford, a souligné le rôle clé que peut jouer le secteur financier dans le cadre de la transition énergétique. «Le secteur des énergies renouvelables a une plus forte intensité en capital que celui des énergies fossiles. Il faudra mettre en place des solutions pour réduire les coûts du financement. L’accès au capital sera essentiel pour développer les énergies renouvelables», a souligné le professeur mercredi. S’il se montre confiant au sujet des efforts entrepris actuellement pour atteindre l’objectif de «net zéro», Cameron Hepburn avertit toutefois aussi que la dernière partie du chemin sera la plus difficile. «Il est aujourd’hui possible de réduire les émissions de CO2 dans toutes sortes de domaines. En revanche, pour les 20 à 25% d’émissions restantes dues à des activités pour lesquelles il est difficile de se passer des énergies fossiles, comme le trafic maritime par exemple, la tâche sera très ardue», a prévenu le professeur à Oxford.

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