Ces start-up qui démocratisent l’espace

Salima Barragan

2 minutes de lecture

Devenu entrepreneurial, le marché spatial pèsera 2’700 milliards de dollars en 2045. Avec Rolando Grandi de La Financière de l’Echiquier.

Moins de soixante jours après les deux vols dans l’espace ultra médiatisés des milliardaires Jeff Bezos et Richard Branson, quatre astronautes amateurs ont décollé pour une mission spatiale touristique inédite à bord d’une fusée de la société SpaceX, marquant le pas d’une nouvelle ère pour l’industrie. Une réalité qui dépasse la fiction grâce à l’ouverture de l’espace – autrefois réservé aux entreprises militaires – à des sociétés financées par des capitaux privés et prêtes à prendre des risques. Les pépites de Rolando Grandi qui gère un fonds thématique dédié à l’espace et à son écosystème auprès de La Financière de L’Echiquier (LFDE).

L’ESPACE DEVIENT ACCESSIBLE AU SECTEUR PRIVé

Un record: 1’200 satellites ont été lancés en 2020. Il se passe quelque chose dans la conquête de l’espace. Parce que les entreprises militaires n’ont jamais été compétitives, les Etats ont progressivement coupé le budget alloué aux activités spatiales, qui furent durant la Guerre Froide au centre de la compétition géostratégique entre les superpuissances. «Les entreprises d’Etat n’avaient pas d’incitation économique à baisser leurs coûts, rendant ainsi l’espace cher et les lancements peu fréquents», analyse Rolando Grandi. Dans une perspective de basculement de l’Etat au privé, les gouvernements ont adapté les réglementations durant ces dix dernières années afin de permettre aux entreprises privées d’envoyer leurs propres satellites et fusées dans l’espace. «Très rapidement, la concurrence privée a accéléré l’innovation. En vingt ans, les entreprises privées ont divisé les coûts pour aller dans l’espace par 10», relève-il. A titre d’exemple, jamais une société publique n’avait réussi à réutiliser une fusée pour réduire les frais.

On estime qu’environ 90 pays disposent de leur propre agence spatiale.
UN Marché QUI S’élargit

Leader historique de la conquête spatiale, les Etats-Unis s’imposent toujours sur ce marché très convoité qui pèse aujourd’hui 400 milliards de dollars. Mais l’Europe et la Russie, ainsi que de nouveaux acteurs dont la Chine et l’Inde sont également animés par des projets ambitieux. On estime qu’environ 90 pays disposent de leur propre agence spatiale. «Des acteurs variés sont en train de capturer des capitaux et les programmes s’accélèrent, ce qui explique pourquoi nous voyons davantage de lancements» explique Rolando Grandi qui s’attend également à voir les IPO s’intensifier significativement au cours de ces prochaines années.

à LA Conquête DE L’ESPACE

En marge de la mission Inspiration de la société SpaceX appartenant à Elon Musk, qui a emmené 4 astronautes amateurs sur orbite, d’autres entreprises déploient leurs activités plus discrètement entre la Terre et l’espace. C’est le cas de la société américaine Spire, qui opère dans l’imagerie satellite et radar. Elle collecte des données spatiales via sa propre constellation de 110 nanosatellites envoyés sur basse orbite (à moins 1’350 de kilomètres de notre planète). «Spire est une des sociétés les plus avancées dans l’observation terrestre. Elle a construit ses propres satellites permettant d’observer la Terre et utilise des sociétés comme Rocket Lab et SpaceX pour les envoyer sur orbite. «Depuis l’espace, Spire peut identifier une multitude d’éléments sur Terre comme la pêche clandestine ou contribuer à l’agriculture de précision. Mais sa constellation voyage plus vite que la Terre, et durant une heure, son satellite est hors d’atteinte ce qui nécessite de densifier son réseau de satellites », note le spécialiste. 

Afin de disposer d’une couverture permanente, la société canadienne Maxar gravite à plus de 35’000 kilomètres de la Terre. «Leur approche est différente de Spire car ils travaillent sur des très grands satellites dont les prix varient entre 300 à 500 millions de dollars en fonction des clients et des applications, ce qui reste un coût d’accès important mais qui assure que le satellite bougera en même temps que la Terre», relève Rolando Grandi.

Garmin se distingue de ses concurrents grâce à sa technologie de communication satellitaire et son accès aux données.
LE BUSINESS LUCRATIF DES LANCEMENTS DE FUSéES

Opérateur de Spire pour le lancement de ses satellites, la société californienne Astra lance des fusées plus petites en orbite basse pour déployer des actifs spatiaux de manière très ciblée. Elle a également démocratisé le lancement des fusées depuis n’importe quel endroit du globe, jusqu’alors réservé aux bases situées en Equateur. 

Déjà bien établi dans l’industrie naissante, son grand concurrent Rocket Lab a effectué depuis le début de l’année quatre lancements de fusées pour le compte d’entités privées et publiques. «En très forte dynamique de croissance, son introduction en bourse lui a donné les moyens de se développer davantage. Au deuxième trimestre, elle a dégagé 30 milliards de revenus et son chiffre d’affaires est en croissance de plus de 200%», commente Rolando Grandi. 

UN SYSTÈME DE PARTAGE DE Données

Sans géo-positionnement, la communication satellitaire ne fonctionnerait pas. Et c’est là qu’intervient Garmin, qui a développé les premiers navigateurs GPS pour l’armée, l’aviation et la navigation, puis qui est devenu incontournable pour ses montres connectées. «Garmin se distingue de ses concurrents grâce à sa technologie de communication satellitaire et son accès aux données, car elle fait le lien avec son fournisseur. Il y a une demande structurelle forte pour ses produits dans le domaine de la communication. Par exemple, la société Iridium, également dans la communication satellitaire et qui possède une constellation de 75 satellites en orbite basse, lui fournit ses données spatiales», précise-t-il.

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