Bons baisers de Russie

Gianni Pugliese, Mirabaud

1 minute de lecture

Sur le front de l’inflation, les gérants obligataires apprécient la rigueur de la banque centrale.

La détermination de la Russie dans sa lutte contre l’inflation gagne les faveurs du marché obligataire. Les investisseurs étrangers ont récemment accumulé des milliards de roubles de dette souveraine russe et certains établissements financiers encouragent leurs clients à prendre des positions haussières. C’est le cas de Morgan Stanley, par exemple, qui recommande l'achat d’obligations de maturité à 10 ans. L’idée sous-jacente est que les hausses de taux agressives de la banque centrale permettront de contenir l'inflation et que les risques de sanctions américaines s’apaiseront. Sur l’inflation, les gérants obligataires apprécient la rigueur de la banque centrale, soulignant qu’elle a agi tôt et de manière décisive. 

Ils relèvent également la différence entre la Russie et la plupart des autres marchés émergents qui réside dans la certitude et la clarté en matière de politique monétaire. C’est pourquoi un nombre d’entre eux surpondèrent leur exposition au rouble et aux emprunts russes. Ce sentiment positif intervient après des mois d'inquiétude alimentée par le ton beaucoup plus ferme de Joe Biden à l’égard de Moscou que celui de son prédécesseur. La crainte des sanctions américaines avait d’abord pesé sur les obligations russes. 

Les sanctions interdisent aux institutions financières américaines d'acheter de la dette étatique russe en roubles sur le marché primaire.

Mais en avril dernier, le marché ayant considéré que les sanctions annoncées ne menaceraient pas la stabilité financière du pays, le rendement russe à 10 ans a amorcé une première baisse. Pour rappel, les sanctions interdisent aux institutions financières américaines d'acheter de la dette étatique russe en roubles sur le marché primaire. La seconde baisse a lieu en juillet, lorsque la banque centrale a relevé son taux d'intérêt d’un point à 6,5%, égalant ainsi la plus forte augmentation depuis la crise du rouble de 2014. 

Le 10 ans se traite à présent en-dessous de la barre des 7%, contre plus de 7,3% en juin et 6% en début d'année. La flambée des prix des denrées alimentaires et des matières premières a contribué à attiser l'inflation dans les marchés émergents comme la Russie et le Brésil, et contraint les autorités monétaires à agir. A 6,46% en base annuelle au mois de juillet, l'inflation russe navigue à son plus haut niveau depuis 5 ans, largement au-dessus de l’objectif de 4%. La banque centrale a par ailleurs révisé sa fourchette de prévision pour fin 2021 à 5,7%-6,2% contre 4,7%-5,2% précédemment, laissant la porte ouverte à de nouvelles hausses de taux d’intérêts. Il n’en demeure pas moins que les investisseurs étrangers ont augmenté leurs avoirs d’emprunts russes de 169,2milliards de roubles (2,3milliards de dollars) en juillet (Bloomberg), le montant le plus élevé depuis février 2020. 

Selon la banque centrale, environ un cinquième du marché est en mains étrangères. La vague d’achats est également visible sur le marché primaire malgré l’absence d’investisseurs américains. Ceci est illustré par les dernières adjudications où le Ministère des finances a levé 110,6 milliards de roubles à 8 et 15 ans, le montant le plus important depuis mi-avril. La banque centrale est crédible et les investisseurs achètent.

A lire aussi...