UE: désaccord persistant sur les «coronabonds»

AWP

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L’absence de consensus sur un emprunt commun, réclamé par Paris, Rome et Madrid, jette une ombre sur les chances d’un accord.

Les ministres des Finances de l’UE espèrent surmonter leurs divisions pour s’entendre mardi sur de premières mesures économiques face au coronavirus, mais l’absence de consensus sur un emprunt commun, réclamé par Paris, Rome et Madrid, jette une ombre sur les chances d’un accord.

Cette réunion est un test décisif pour l’unité des 27 qui ne peuvent se permettre d’étaler une nouvelle fois leurs divisions, après l’échec d’un sommet des chefs d’Etat et de gouvernement consacré à la crise le 26 mars.

Face à la pandémie, la réponse européenne devrait s’orienter selon trois axes: des prêts du fonds de secours de la zone euro, un fonds de garantie pour les entreprises et un soutien au chômage partiel.

Il y a de bonnes chances que ces trois leviers soient acceptés par les ministres réunis en visioconférence à partir de 15H00 (13H00 GMT). Mais les pays les plus affectés par la pandémie continuent de réclamer la création d’un instrument de dette commun -- sous la forme d’euro-obligations parfois appelées «coronabonds» ou «eurobonds» -- face à la récession d’ampleur qui s’annonce. Et ils menacent de bloquer un accord.

«Les eurobonds représentent une réponse sérieuse et adaptée à la crise que nous vivons», a insisté lundi soir le chef du gouvernement italien Giuseppe Conte, dont le pays est le plus touché par la pandémie en Europe (plus de 16’523 morts et plus de 132’000 cas).

C’est l’Italie, confrontée à l’opposition des pays du Nord de l’Europe (Allemagne et Pays-Bas en tête), qui avait déjà, avec Madrid, entraîné l’échec du sommet consacré à la riposte de l’Union fin mars.

Fonds de relance

Alors que les pays du Nord mettent en avant les instruments déjà existants pour contrer le choc économique, en particulier le Mécanisme européen de stabilité (MES), doté d’une force de frappe de 410 milliards d’euros, Rome juge ce fonds très insuffisant.

«Le Mécanisme européen de stabilité est un instrument inadapté», a jugé M. Conte, résumant sa position par un slogan: «MES non, eurobond oui».

La France veut également faire entendre sa voix. Elle réclame un instrument plus puissant, sous la forme d’un «fonds de relance» ou un «fonds de solidarité» capable d’émettre de la dette commune aux Etats membres. Une proposition qui divise elle aussi les 27.

Le ministre français des Finances Bruno Le Maire veut que cette «option» soit «mentionnée» dans les conclusions des ministres, quitte à se laisser «deux ou trois mois pour en définir les détails de fonctionnement».

Ce fonds temporaire de plusieurs centaines de milliards d’euros («3% du PIB européen») financerait les services publics essentiels (santé), les filières menacées (transport, tourisme...) et les nouvelles technologies, avec des prêts remboursables sur 15 à 20 ans.

Paris, comme Rome et Madrid risquent cependant de se heurter une nouvelle fois aux Pays-Bas et à l’Allemagne.

Pour ces deux pays, pas question de partager le risque d’une mutualisation d’un emprunt commun avec des Etats très endettés comme l’Italie ou l’Espagne, qu’ils considèrent comme laxistes dans leur gestion.

Selon une source diplomatique cependant, l’idée française pourrait être évoquée de façon plus ou moins vague dans les conclusions de manière à éviter un blocage.

«A la fin, chacun pourra dire: les +coronabonds+ sont toujours là. Ou pas. Et le débat se poursuivra», explique ce diplomate.

Les propositions des ministres devront encore être soumises aux chefs d’Etat et de gouvernement de l’UE.

Outre le MES, créé en 2012 lors de la crise de la dette de la zone euro, qui pourrait octroyer des prêts à un Etat en difficulté allant jusqu’à 2% de son PIB, avec des contreparties plus limitées qu’à l’habitude, la Banque européenne d’investissement (BEI) est également à la manoeuvre.

Elle propose de créer un fonds de garantie paneuropéen, doté de 25 milliards d’euros, afin de mobiliser jusqu’à 200 milliards d’euros supplémentaires pour les entreprises.

Les ministres devraient aussi valider le plan de la Commission européenne, visant à créer un instrument pour garantir jusqu’à 100 milliards d’euros les plans nationaux de chômage partiel, renforcés ou créés en raison de l’épidémie.

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