Rebond des prix du blé, après une révision à la baisse de la récolte mondiale

AWP

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Le cours du blé tendre est monté en séance à 237,5 euros la tonne, sur l’échéance la plus rapprochée, effaçant quasiment les baisses de la semaine.

Les prix du blé grimpaient mercredi, après l’abaissement de l’estimation américaine de production mondiale de la céréale, dans un marché toujours dominé par les exportations russes.

Sur Euronext, le cours du blé tendre est monté en séance à 237,5 euros la tonne, sur l’échéance la plus rapprochée, effaçant quasiment les baisses de la semaine.

Une orientation à la hausse initiée à la Bourse de Chicago mardi soir, où le contrat le plus échangé sur le blé d’hiver américain de variété SRW («soft red winter») a terminé en légère augmentation de 0,51%, à 5,875 dollars le boisseau (environ 27 kg).

Cette remontée du blé, qui avait atteint aux Etats-Unis son plus bas niveau depuis décembre 2020, est largement due aux prévisions du ministère américain de l’Agriculture (USDA) dans son dernier rapport mensuel Wasde publié mardi soir, très suivi par le monde agricole.

L’USDA a réduit de 6 millions de tonnes ses prévisions de récolte, estimant la production mondiale de blé à 787 millions de tonnes pour la campagne 2023-24, en repli par rapport à la campagne précédente.

Dans le détail, l’USDA voit les volumes moissonnés se contracter de 3 millions de tonnes en Australie, où les grandes régions de production sont affectées par une sécheresse attribuée au phénomène météorologique El Niño, qui commence à produire ses premiers effets.

La sécheresse a également frappé le Canada, premier producteur mondial de blé dur, qui voit ses prévisions de récolte amputées de 2 millions de tonnes. Le manque d’eau a conduit à une nouvelle révision à la baisse d’un million de tonnes en Argentine et dans l’Union européenne.

«Demande en berne»

Face à la réduction des disponibilités exportables, les pays importateurs puisent dans leurs stocks, ce qui explique une baisse estimée à 7 millions de tonnes du stock mondial de blé, souligne le cabinet Agritel (Groupe Argus Media).

Aucune surprise de taille, mais «le marché n’était pas prêt à ce que le niveau des stocks de fin d’année soit si bas», à leur plus faible niveau depuis sept ans, a observé Michael Zuzolo, de Global Commodity Analytics and Consulting.

Sur le marché européen, la nette hausse des cours du blé «tient aussi compte des bombardements russes de la nuit sur les infrastructures portuaires ukrainiennes» dans la région d’Odessa, visant notamment les ports de Reni et Izmaïl sur le Danube, estime Damien Vercambre, du cabinet Inter-Courtage.

«Il est trop tôt pour connaître l’ampleur des dégâts», mais les opérateurs sont attentifs aux conséquences des bombardements dans cette zone frontalière avec la Roumanie, la voie fluviale danubienne concentrant l’essentiel des flux de grains ukrainiens vers l’Europe depuis la fin de l’accord céréalier de la mer Noire cet été, a-t-il expliqué.

Les analystes soulignent par ailleurs que rien n’est venu remettre en cause la domination russe dans les exportations de blé.

Selon l’USDA, la Russie représenterait désormais quasiment 24% des exportations mondiales de blé contre 16% en 2021-22. Ce chiffre s’élèverait même à «30% hors blé dur», selon l’Etablissement national français FranceAgriMer.

Depuis des semaines, ce sont les énormes volumes de blé russe exportés qui font baisser les prix. L’USDA n’a toutefois pas révisé en hausse les prévisions de récolte russe, «maintenue à 85 millions de tonnes alors que le consensus chez les analystes la situe autour de 90 Mt», relève Sébastien Poncelet, spécialiste des céréales au cabinet Agritel.

La France, premier producteur de blé européen et dont la récolte - estimée à 35 Mt - s’annonce «de bonne qualité», selon FranceAgriMer, peine à écouler ses productions.

«Les critères de qualité sont là», la France devrait avoir un «avantage logistique» (proximité et coûts de transport) avec ses clients traditionnels en Afrique du Nord et sub-saharienne, mais «l’offre russe continue d’inonder le marché», a relevé Marc Zribi, chef de l’unité grains et sucre de FranceAgriMer, lors d’un point presse.

Parallèlement, les exportations ukrainiennes, moindres sur le marché mondial, pèsent sur le marché européen par lequel ses grains transitent.

Au-delà du poids de l’offre russe, «la réalité commerciale est celle d’une demande en berne sur le marché des exportations européennes», s’expliquant par une inflation toujours élevée et une certaine «peur de l’avenir» des pays importateurs, estime M. Poncelet.

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