Pékin et Washington se menacent avant la reprise des négociations

AWP

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Le FMI met en garde contre un «conflit durable entre les deux premières puissances du monde qui risquerait de saper la croissance mondiale».

Les Etats-Unis et la Chine se retrouvent jeudi à Washington pour des négociations commerciales à l’issue des plus incertaines, les deux puissances se menaçant mutuellement de nouvelles mesures protectionnistes.

«La Chine ne capitulera pas face à la pression et nous avons la détermination ainsi que les moyens de défendre nos intérêts», a mis en garde à Pékin le porte-parole du ministère chinois du Commerce, Gao Feng, quelques heures avant la reprise des discussions à Washington.

Le porte-parole du Fonds monétaire international (FMI), Gerry Rice, a averti de son côté qu’un conflit durable entre les deux premières puissances du monde risquait de saper la croissance mondiale.

La session de tractations, qui doit se tenir tout près de la Maison Blanche, était présentée il y a quelques jours encore comme la dernière avant un sommet entre Donald Trump et son homologue chinois Xi Jinping, destiné à sceller un accord historique.

Mais le vent a tourné et l’optimisme a laissé place à l’incertitude, qui mine les marchés financiers: Hong Kong a perdu plus de 2% jeudi, Shanghai plus de 1%, et à Wall Street, le Dow Jones perdait 1,55% et le Nasdaq 1,44% peu avant la mi-séance.

Donald Trump a violemment accusé la Chine de ne pas respecter ses principaux engagements, justifiant ainsi l’imposition à partir de vendredi d’une hausse des droits de douanes supplémentaire sur 200 milliards de marchandises chinoises. Une interprétation démentie par le porte-parole chinois du ministère du Commerce.

«La Chine a tenu ses promesses et cela n’a jamais changé», a assuré M. Gao.

«Nous allons accroître les tarifs douaniers en Chine jusqu’à ce qu’ils cessent de voler nos emplois», a lancé mercredi soir le président américain lors d’une réunion publique en Floride. «L’ère de la capitulation économique est terminée», a-t-il déclaré.

«Vous voyez les droits de douane que nous appliquons? C’est parce qu’ils n’ont pas respecté l’accord», a encore dit Donald Trump. «Ils viennent ici, le vice-Premier ministre vient ici demain (jeudi, ndlr), c’est bien, mais ils n’ont pas respecté l’accord. Ils ne peuvent pas faire ça, alors ils vont payer».

Pékin n’a toutefois pas l’intention de faire le dos rond.

«La Chine n’aura guère d’autre choix que de prendre les contre-mesures nécessaires», a prévenu le ministère du Commerce.

Craintes pour la croissance mondiale

Pour autant, Pékin n’a pas annulé le déplacement de ses négociateurs. Son vice-Premier ministre Liu He, considéré comme très proche du président Xi Jinping, doit même diriger les discussions.

Il sera à partir de jeudi après-midi face à son homologue, l’austère Robert Lighthizer, représentant américain au commerce (USTR), qui l’accueillera dans ses bureaux.

Donald Trump a opté avec Pékin pour la stratégie de la pression maximale, infligeant d’abord en mars 2018 des tarifs douaniers sur l’acier et l’aluminium chinois puis, l’été dernier, sur 250 milliards de dollars de produits chinois.

Il est également prêt à imposer des droits de douane additionnels sur toutes les importations de Chine (539,5 milliards de dollars en 2018), faisant craindre pour la croissance économique mondiale et la stabilité des marchés financiers.

Et coïncidence ou non du calendrier, les Etats-Unis ont annoncé jeudi refuser à l’opérateur China Mobile l’accès à leur marché, relevant «des risques substantiels et sérieux pour la sécurité nationale».

Les économistes du monde entier préviennent depuis des mois qu’une guerre commerciale durable entre la Chine et les Etats-Unis provoquerait une onde de choc bien au-delà de leurs frontières, la reprise après la récession mondiale de 2008 ayant été largement nourrie par les échanges commerciaux à travers le monde.

La pression sur les épaules des négociateurs est d’autant plus forte que trouver un consensus sur les dossiers épineux revient à demander à la Chine de réduire ses ambitions économiques.

L’administration Trump exige en effet la fin des pratiques commerciales jugées «déloyales», des «changements structurels», c’est-à-dire la fin des transferts forcés des technologies américaines ainsi que la protection de la propriété intellectuelle américaine.

Elle souhaite aussi un accord sur les devises pour empêcher Pékin de dévaluer sa monnaie pour doper ses exportations.

Elle demande également la fin des subventions aux entreprises d’Etat, celles-là mêmes qui portent le plan stratégique de l’Etat chinois, «Made in China 2025».

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