Japon: vague d’émotion après l’assassinat de Shinzo Abe

AWP

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Le célèbre premier ministre de 2012 à 2020 prononçait un discours lors d’un rassemblement de campagne électorale en vue des élections sénatoriales de dimanche lorsqu’un homme a tiré sur lui.

L’ancien premier ministre japonais Shinzo Abe est décédé vendredi à l’hôpital des suites de l’attaque par balles dont il a été victime en plein meeting électoral à Nara (ouest), suscitant une vive émotion au Japon et à l’étranger.

«Shinzo Abe a été transporté (à l’hôpital) à 12h20. Il était en état d’arrêt cardio-respiratoire à son arrivée. (Les médecins ont) tenté de le réanimer. Cependant, il est malheureusement décédé à 17h03» (08h03 GMT), a déclaré Hidetada Fukushima, professeur de médecine d’urgence à l’hôpital de l’université médicale de Nara, situé dans la ville voisine de Kashihara.

M. Abe a été atteint de deux balles au cou, a précisé ce médecin.

Visiblement très ému, le premier ministre japonais Fumio Kishida a déclaré avoir «prié» pour la survie de M. Abe, son ancien mentor politique dont il a été ministre des Affaires étrangères de 2012 à 2017.

«Mais malgré cela, j’ai appris la nouvelle (de sa mort). C’est vraiment regrettable. Je ne trouve pas de mots. Je présente mes sincères condoléances et prie pour que son âme repose en paix», a dit le dirigeant aux journalistes.

Les préparatifs électoraux se poursuivront, a précisé M. Kishida, car «nous devons absolument défendre les élections libres et équitables, qui sont le fondement de la démocratie» et «nous ne céderons jamais à la violence», a-t-il déclaré.

L’ancien chef de l’exécutif prononçait un discours en fin de matinée près d’une gare à Nara lors d’un rassemblement de campagne électorale en vue des élections sénatoriales de dimanche, lorsque des coups de feu ont été entendus.

Un suspect interpellé

Un homme d’une quarantaine d’années a été aussitôt désarmé et arrêté. Selon plusieurs médias locaux, le suspect serait un Japonais de 41 ans ayant par le passé appartenu à la Force maritime d’autodéfense japonaise, la marine nippone.

Des images de la NHK ont montré des policiers portant des équipements de protection pénétrer vendredi après-midi dans un bâtiment identifié par la chaîne de télévision comme le domicile du suspect à Nara.

Sur des images de la NHK montrant le moment de l’attaque, on voit M. Abe debout sur un podium, puis une forte détonation retentit et de la fumée qui se dégage. Les spectateurs surpris par la détonation se baissent et plusieurs personnes en plaquent une autre à terre.

M. Abe «prononçait un discours et un homme est arrivé par derrière», a déclaré à NHK une jeune femme présente sur les lieux.

«Le premier tir a fait le bruit d’un jouet. Il (M. Abe) n’est pas tombé et il y a eu une grosse détonation. Le deuxième tir était plus visible, on pouvait voir l’étincelle et de la fumée», a-t-elle ajouté.

Après le deuxième tir, des gens ont entouré M. Abe tombé à terre «et lui ont fait un massage cardiaque», a-t-elle encore témoigné.

Des responsables locaux du PLD ont précisé n’avoir reçu aucune menace avant l’attaque et que cette prise de parole de M. Abe avait été annoncée publiquement.

«Très, très triste»

Ancien chef du PLD, Shinzo Abe était le premier ministre japonais à être resté le plus longtemps au pouvoir. Il avait été en poste en 2006-2007, puis de nouveau de 2012 à 2020. Il avait été contraint de démissionner pour des raisons de santé mais restait très influent au sein du PLD, dont il contrôlait la principale faction au Parlement.

Les réactions ont afflué du monde entier après l’attaque.

«C’est un moment très, très triste», a déclaré vendredi le secrétaire d’État américain Antony Blinken, ajoutant que les Etats-Unis étaient «profondément tristes et profondément préoccupés».

«Le Japon perd un grand Premier ministre, qui dédia sa vie à son pays et oeuvra à l’équilibre du monde», a réagi le président français Emmanuel Macron.

A Moscou, le président Vladimir Poutine a déploré une «perte irréparable». A Bruxelles, les chefs de l’Union européenne ont dénoncé «le meurtre brutal» d’un «grand démocrate».

Les principaux dirigeants en Asie étaient aussi sous le choc, le président sud-coréen Yoon Suk-yeol dénonçant un «acte criminel inacceptable».

Le Japon n’a rien connu de tel «depuis plus de 50 à 60 ans», a déclaré à l’AFP Corey Wallace, maître de conférences à l’université de Kanagawa et spécialiste de la politique nippone.

Selon lui, le dernier incident similaire au Japon était l’assassinat en 1960 de Inejiro Asanuma, le dirigeant du Parti socialiste japonais, poignardé par un étudiant proche de l’extrême-droite.

«Mais deux jours avant une élection (et un homme) si important (...) c’est profondément triste et choquant», a-t-il ajouté.

Le Japon dispose de l’une des législations les plus strictes au monde en matière de contrôle des armes à feu, et le nombre annuel de décès par de telles armes dans ce pays de 125 millions d’habitants est extrêmement faible.

L’obtention d’un permis de port d’armes est un processus long et compliqué, même pour les citoyens japonais, qui doivent d’abord obtenir une recommandation d’une association de tir, puis se soumettre à de stricts contrôles de police.

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