Cinq ans ferme pour l’ex-gestionnaire de Credit Suisse

AWP

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Le prévenu a été reconnu coupable d’avoir détourné 143 millions de francs à l’insu de ses clients et de la banque qui l’employait.

Le Tribunal correctionnel de Genève a condamné vendredi un ancien gestionnaire vedette de Credit Suisse (CS) à cinq ans de prison. Le prévenu, 54 ans, a été reconnu coupable d’avoir détourné 143 millions de francs et de s’être enrichi à hauteur de 30 millions en menant des opérations à l’insu de ses clients et de la banque qui l’employait.

L’accusé a mis en place un système extrêmement efficace qui lui a rapporté des millions de francs, a souligné la présidente du Tribunal correctionnel Alexandra Banna. Le premier procureur Yves Bertossa, dans son réquisitoire, avait utilisé le terme de «holding du crime financier» pour décrire la structure créée par le prévenu.

L’ex-gestionnaire avait ouvert une constellation de sous-comptes cachés pour effectuer des transactions non autorisées avec l’argent de ses clients. Il a notamment floué Bidzina Ivanishvili, un milliardaire géorgien qui a fait fortune lors de l’effondrement de l’URSS et qui a été Premier ministre de son pays entre 2012 et 2013.

APPÂT DU GAIN

Ce trading effectué sous les radars permettait au prévenu de toucher de confortables commissions et de s’enrichir dans le dos de CS. Certaines transactions étaient même menées à perte par l’accusé dans l’unique objectif de se faire rémunérer. Pour le tribunal, l’appât du gain a joué un rôle moteur dans cette affaire.

Parallèlement à ces opérations non autorisées, l’accusé s’est aussi livré à des détournements de fonds massifs. Il siphonnait les comptes appartenant à notamment Bidzina Ivanishvili pour créditer des comptes de riches clients russes dont il avait la charge, afin de dissimuler à ces derniers les pertes qu’ils subissaient.

Le tribunal correctionnel a retenu qu’une somme de 143 millions de francs environ avait ainsi changé de mains. Le prévenu justifiait les opérations en utilisant divers subterfuges astucieux, et en falsifiant des documents. Il mentait à ses clients et leur envoyait des relevés de compte truqués.

ARGENT À RENDRE

Lors du procès, les clients qui ont reçu de l’argent de l’accusé qui ne leur appartenait pas ont plaidé pour pouvoir le garder, du moins en partie. Le tribunal n’a pas accédé à leur requête, rejetant leurs prétentions civiles dans cette affaire. Selon lui, seule la banque peut se prévaloir d’avoir subi un dommage au sens pénal.

Le prévenu a été condamné à verser à Credit Suisse le montant de 130 millions de francs environ. Une partie de cet argent sera récupérée sur les comptes des anciens clients du gestionnaire. Les fonds devront ensuite être reversés par la banque aux personnes qui ont été lésées dans cette affaire, notamment Bidzina Ivanishvili.

Les biens immobiliers et mobiliers que l’ancien gestionnaire a acquis grâce à de l’argent détourné ou gagné illégitimement ont été confisqués par la justice genevoise. Il s’agit notamment de propriétés, d’un bolide et de bijoux. Le tout représente un montant d’environ 22 millions de francs.

FAUTE LOURDE

Le tribunal a souligné dans son jugement la faute lourde commise par le prévenu, qui a agi de façon criminelle pendant près de 8 ans et causé des dommages très importants. Le gestionnaire aurait pu arrêter à tout moment ses activités criminelles, mais il les a poursuivies pour un motif essentiellement égoïste.

Les juges ont reconnu l’ancienne star du trading, spécialiste de la clientèle russe, coupable d’escroquerie par métier, de gestion déloyale simple et aggravée et de faux dans les titres. Ils ont condamné le prévenu à la peine qu’avait réclamée le premier procureur Yves Bertossa dans son réquisitoire.

Le gestionnaire de fortune se trouve déjà depuis deux ans en prison. Il a effectué 154 jours de détention préventive et est actuellement derrière les barreaux en exécution anticipée de peine. En principe, le prévenu pourra bénéficier d’une libération conditionnelle en avril 2019, a déclaré son avocat Simon Ntah.