Pourquoi OVH décroche en bourse

Jocelyn Jovène, Morningstar

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Dans un environnement économique plus volatil, le modèle économique du spécialiste européen de l’hébergement et du cloud doit encore faire ses preuves.

Par rapport au marché américain, l’Europe compte peu de grandes valeurs de technologie, en particulier dans l’univers du «Cloud».

Cette rareté aurait dû théoriquement profiter à une société comme OVH Cloud, introduite en bourse en octobre 2021 au cours de 18,50 euros, et qui cote aujourd’hui 14,74 euros.

Le titre de ce spécialiste de l’hébergement de sites et des solutions de cloud public et privé, qui faisait plutôt preuve de résistance malgré la correction boursière qui affecte en particulier le secteur de la technologie dans le monde, a décroché après la publication de son chiffre d’affaires du troisième trimestre, le 30 juin dernier.

La société a annoncé un chiffre d’affaires de 202 millions d’euros (pour la période de 3 mois close fin mai 2022), en croissance de 25,9% sur un an.

Sur neuf mois, les ventes d’OVH atteignent 584,5 millions d’euros contre 495,1 millions d’euros sur les neuf premiers mois de l’exercice 2021.

Surtout, dans cette publication, OVH relevait ses prévisions pour l’exercice, visant une croissance de 16% à 18% de ses ventes et une marge d’EBITDA ajusté «proche de 40%».

Mais depuis cette publication, le cours de bourse d’OVH a plongé de 15% (il avait même commencé à fortement reculer la veille de l’annonce des ventes trimestrielles).

Dans une note du 30 juin, les analystes de BNP Paribas Exane observent: «les commentaires prudents sur la demande des clients, qui représentent plus de la moitié des ventes d’OVH, ont effrayé le marché en ce qui concerne les perspectives de l’exercice fiscal 2023, lorsque l’environnement macro-économique incertain testera le modèle économique de la société.»

Un sentiment que confirment les analystes de Société Générale: «nous aimerions qu’OVH publie des indicateurs de performance [KPI] dès le début de l’exercice 2023 pour faire la preuve de sa réussite [dans le domaine des solutions PaaS] et nous permettre de mieux évaluer le revenu potentiel de cette activité d’ici 2025 [nous anticipons 100 millions d’euros de ventes]», écrivent-ils dans une note du 1er juillet 2022.

La prudence des investisseurs semble également alimentée par l’intensification de la concurrence dans le domaine de la protection des données.

Parmi les arguments clefs de la société au moment de son introduction en bourse figuraient sa capacité à défendre la souveraineté des données en Europe, dans un marché dominé par les « hyperscalers » américains (Amazon («Wide Moat»), Microsoft («Wide Moat»), Google/Alphabet («Wide Moat»)) ou asiatiques (Alibaba («Wide Moat»)), ainsi que sa maîtrise de bout en bout de son infrastructure.

OVH possède en effet la quasi-totalité de ses centres de données et construit elle-même les serveurs informatiques, ce lui confèrerait un avantage concurrentiel en offrant des services à bas coûts.

En dépit d’une croissance très rapide, la société est encore loin de disposer d’une taille critique qui puisse lui assurer une rentabilité suffisante pour faire face à la concurrence des leaders mondiaux du cloud.

En 2021, OVH a enregistré un chiffre d’affaires de 663 millions d’euros et une marge d’EBITDA ajusté de 39,5%.

Au moment de son introduction en bourse, la société revendiquait la position de numéro deux du cloud privé en Europe (62% de ses ventes), et de numéro 5 dans le cloud public (13% des ventes).

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