Les recommandations de la BCE affectent les banques italiennes

AWP

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La BCE demande d’en faire davantage pour réduire les stocks de créances douteuses. Les titres chutent.

Un vent d’inquiétude soufflait mardi, pour le deuxième jour consécutif, sur les banques italiennes, en raison des recommandations plus drastiques faites par la Banque centrale européenne (BCE) pour qu’elles réduisent sensiblement leurs importants stocks de créances douteuses.

Vers 16H20 (15H20 GMT), la BMPS cédait 7,17% à 1,256 euro, Ubi Banca 4,64% à 2,343 euros, Bper Banca 4,39% à 3,006 euros, Banco BPM 4,36% à 1,84 euro et UniCredit 2,93% à 10,086 euros.

Lundi soir, elles avaient déjà clôturé en nette baisse: la BMPS avait perdu 10,19%, Creval 5,57%, Bper 3,85%, Banco BPM 2,39%, Ubi Banca 2,34% et UniCredit 1,91%.

Le tout est parti d’un communiqué de la BMPS (Monte dei Paschi di Siena) vendredi soir annonçant qu’elle avait reçu en décembre une ébauche de décision de la BCE concernant des exigences en terme de patrimoine et de couverture des créances douteuses.

La BCE lui recommande d’agir encore davantage sur son niveau de crédits détériorés, en augmentant «graduellement les niveaux de couverture».

«La BCE demande d’augmenter la couverture sur les crédits détériorés à 100% en sept ans, pas seulement sur les nouveaux flux mais aussi sur le stock existant: c’est une surprise pour nous», soulignent les analystes de Banca Akros, qui ont par conséquent abaissé leur recommandation sur les actions BMPS d’»acheter» à «neutre».

«C’est une nouvelle négative et inattendue», confirme Giovanni Razzoli, analyste chez Equita.

La BMPS, qui a bénéficié d’une sauvetage public en 2017, est en fait loin d’être la seule à avoir reçu une telle lettre. Les quelque 120 grandes banques en zone euro ont en effet dû toutes recevoir le mois dernier une proposition de plan individualisé en vue de résorber leur stock de créances douteuses, des prêts risquant de ne jamais être remboursés.

Horizon 2026

L’horizon visé est autour de 2026, a indiqué à l’AFP une source proche de la BCE, en précisant que la finalisation des objectifs devrait intervenir au premier trimestre, à l’issue d’un dialogue avec chaque banque.

La BCE ne donne pas de «vademecum» précis aux établissements sur la façon de réduire leur stock et il s’agit de recommandations qui n’ont pas de caractère obligatoire, a précisé la source.

En effet, les banques qui estiment ne pas pouvoir parvenir à se plier à ces demandes devront simplement expliquer pourquoi, a ajouté cette source.

En juillet 2018, le superviseur unique des banques logé au sein de la BCE avait communiqué son intention de s’attaquer au stock de créances douteuses dans les grandes banques de la zone euro, avec l’objectif de les voir réduire de manière homogène leur ratio.

Celui-ci, qui s’élevait à 8% des prêts totaux en 2014, a reculé à 4,4% au second trimestre 2018 pour un échantillon de près de 110 grandes banques, ce qui correspond à un stock de 657 milliards d’euros, selon la BCE, qui voudrait accélérer cette baisse.

Le ratio atteignait à la même date près de 10% en Italie, pour un stock avoisinant 160 milliards d’euros, près de 45% en Grèce, 1,67% en Allemagne et près de 3% en France.

Colère de Salvini

A la suite du vent de panique à la Bourse de Milan, plusieurs banques ont publié des communiqués pour tenter de rassurer les investisseurs.

Intesa Sanpaolo a souligné ne pas voir «d’impact significatif» des recommandations de la BCE sur ses objectifs et son plan stratégique 2018-2021.

Même vocabulaire chez Ubi Banca, qui a expliqué que les recommandations de la BCE étaient «formulées en tenant compte des spécificités de chaque banque», et chez Banco BPM qui a dit être déjà au-dessus des recommandations.

Mais le dossier a provoqué la colère de la coalition populiste au pouvoir à Rome, toujours prête à monter au créneau contre les institutions européennes.

«La nouvelle attaque de la BCE contre le système bancaire italien et la BMPS démontre une fois encore que l’Union bancaire, voulue par l’UE et votée par le PD (parti italien de centre gauche), n’a non seulement pas rendu plus stable notre système financier, mais cause de l’instabilité», a affirmé le vice-Premier ministre et patron de la Ligue (extrême droite), Matteo Salvini.

«Une institution non politique peut-elle prendre avec légèreté des décisions qui influent profondément sur la vie et l’épargne des citoyens? Indépendance ne veut pas dire irresponsabilité», a-t-il martelé, en réclamant «une transparence totale» sur les décisions de la BCE.

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